La Première ministre britannique Theresa May, qui a réuni son cabinet mardi, est décidée à rester au pouvoir malgré la menace d'un vote de défiance après les démissions de deux poids lourds de son gouvernement en désaccord avec son approche du Brexit. Le ministre du Brexit, David Davis, et celui des Affaires étrangères, Boris Johnson, deux adeptes d'une rupture nette des liens avec l'Union européenne, ont fait défection, reprochant à Mme May d'avoir consenti de trop nombreuses concessions. Après des semaines de rumeurs de départ, David Davis a claqué la porte du gouvernement dimanche soir et Boris Johnson lui a emboîté le pas lundi après-midi, dénonçant un Royaume-Uni sur la route d'un "semi-Brexit" en voie de devenir une "colonie" de l'UE. Theresa May leur a rapidement trouvé des remplaçants et tente de maintenir son cap dans la tempête. Mais la menace d'un vote de défiance pèse sur elle si les partisans d'une rupture franche avec l'UE s'allient pour la renverser. Selon les statuts du parti, un minimum de 48 députés est requis pour saisir le Comité 1922, responsable de l'organisation interne des Tories et du déclenchement d'un vote de défiance. Il faudrait ensuite le vote de 159 députés conservateurs -sur 316 - pour faire tomber la cheffe du gouvernement, ce qui n'est pas gagné. "Malgré le brouhaha, l'arithmétique au Parlement n'a pas changé. Pour l'instant, les Brexiters purs et durs ne sont pas assez nombreux pour chasser May du pouvoir et ne peuvent pas imposer leur version préférée du Brexit à la Chambre des communes", soulignait mardi le site Politico. Theresa May n'est pas sauvée pour autant et d'autres démissions sont possibles. C'est ce qu'ont assuré sous couvert d'anonymat des partisans du Brexit au quotidien The Guardian: les départs "vont continuer un par un, juste qu'à ce qu'elle jette à la poubelle (le plan adopté vendredi lors d'une réunion de son gouvernement dans sa résidence de campagne de Chequers) ou qu'elle s'en aille". Chaos Mardi, la presse britannique revenait sur la journée "chaotique" de lundi. Le Times, pour qui Boris Johnson avait travaillé comme journaliste avant de se faire renvoyer pour avoir inventé une citation, a jugé sa démission "ni inattendue ni regrettable". Le tabloïd Daily Mail (pro-Brexit) a dit "comprendre -et partager- la frustration des Brexiters" mais s'inquiétait des risques de déstabilisation du gouvernement en cette période critique pour le Royaume-Uni qui doit quitter l'UE dans moins de neuf mois. Les négociateurs britanniques et européens, qui doivent reprendre les discussions la semaine prochaine, espèrent parvenir à un accord sur les conditions du retrait britannique de l'UE et convenir d'un plan pour les futures relations commerciales, lors du sommet de l'UE en octobre. "Il ne reste que quelques semaines pour conclure les négociations sur la sortie de l'UE, c'est un moment crucial pour le pays", souligne le Financial Times. "En déstabilisant le gouvernement, les rebelles déstabilisent le Brexit lui-même. Préparez-vous à une sortie sans accord", prévient Nick Timothy, ancien conseiller de Theresa May dans les colonnes du Sun. Seul The Telegraph, ancien employeur de Boris Johnson, défendait la décision du ministre. Le quotidien conservateur a appelé Theresa May à revoir sa stratégie et qualifie l'accord de Chequers "d'un ensemble mauvais de propositions qui encourageront l'UE à exiger encore plus de concessions". Boris Johnson a démissionné alors que de nombreux rendez-vous internationaux de premier plan sont prévus cette semaine dont le sommet de l'Otan à Bruxelles mercredi et jeudi et la visite du président américain Donald Trump à Londres à partir de jeudi. "BoJo" a aussi déserté le sommet des ministres des Affaires étrangères des Balkans organisé lundi et mardi à Londres.
Deux poids lourds perdus La Première ministre Theresa May a fait face lundi à une violente tempête gouvernementale avec la démission de deux poids lourds de son équipe, signe de désaccords sur l'avenir de la relation du Royaume-Uni avec l'Union européenne après le Brexit. Le ministre du Brexit, l'eurosceptique David Davis, a claqué la porte dimanche soir, en signe de protestation contre le plan de Mme May de maintenir des relations économiques étroites avec Bruxelles après le Brexit, prévu le 29 mars 2019. Une option qualifiée de "Brexit doux" par opposition au "Brexit dur" souhaité par les partisans d'une rupture nette avec Bruxelles. Lundi après-midi, le chef de la diplomatie britannique Boris Johnson a suivi la même voie, peu avant que Mme May ne défende devant les députés britanniques son plan adopté vendredi lors d'une réunion de son gouvernement dans sa résidence de campagne de Chequers. Aux Affaires étrangères, M. Johnson est remplacé par le ministre de la Santé Jeremy Hunt, a annoncé lundi soir Downing Street, lui-même remplacé par le ministre de la Culture Matt Hancock. M. Hunt, âgé de 51 ans, avait soutenu le maintien du Royaume-Uni dans l'Union européenne en 2016 avant de changer d'avis et de se rallier derrière les pro-Brexit, déçu par l'approche "arrogante" de Bruxelles dans les négociations, selon une interview à LBC radio en 2017. Ancien homme d'affaires parlant couramment le japonais, marié à une Chinoise, il s'est taillé une réputation de quelqu'un ne craignant pas les défis, après avoir présidé durant six ans aux destinées du service public de santé (NHS), confronté à une crise profonde. Dans sa lettre de démission, Boris Johnson a regretté que le "rêve (du Brexit) est en train de mourir" et estimé que son pays se dirigeait "vraiment vers le statut de colonie" de l'UE. Mme May, qui s'est dite "désolée et un peu surprise" par cette démission, a expliqué qu'il y avait "désaccord sur la meilleure manière de mettre à exécution" le résultat du référendum de juin 2016, favorable au retrait du Royaume-Uni de l'UE, tout en défendant sa stratégie comme la meilleure pour l'avenir du pays. Les rumeurs allaient bon train depuis des mois sur le départ de M. Davis, 69 ans, visiblement mécontent du chemin que prenaient les négociations, même si en public il se montrait loyal envers Mme May. En revanche, le flamboyant Boris Johnson, 54 ans, l'un des leaders de la campagne pour sortir de l'UE, ne s'est pas privé de critiquer ouvertement la Première ministre. David Davis a lui été remplacé par Dominic Raab, jusque-là secrétaire d'Etat au Logement. Ce député eurosceptique de 44 ans aura la lourde tâche de ferrailler avec les dirigeants européens, qui s'impatientent de plus en plus de voir les négociations patiner à moins de neuf mois du Brexit. La Commission européenne a affirmé lundi que la démission de David Davis ne constituait pas pour elle un problème pour les négociations.