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Selon BNP Paribas : Les marchés financiers déconnectés des fondamentaux
Publié dans Le Maghreb le 23 - 01 - 2019

L'année douloureuse que viennent de vivre toutes les classes d'actifs s'explique par un décalage entre les anticipations pessimistes des marchés financiers et les fondamentaux de l'économie mondiale, qui demeurent robustes, explique Florent Bronès, responsable de la stratégie d'investissement de BNP Paribas Wealth Management.

Le stratège de la banque privée voit certes la croissance décélérer cette année mais estime que les marchés ont intégré à tort dans les cours une récession qu'il ne voit pas venir. "Il y a eu une déconnexion l'an dernier entre ce qu'il s'est passé pour l'économie réelle et ce à quoi l'on a assisté sur les marchés financiers", dit-il à Reuters. "Les marchés sont à des niveaux qui, à notre sens, anticipent des récessions, notamment aux Etats-Unis, ce qui n'est pas du tout notre scénario, qui est celui d'un ralentissement de la croissance mondiale, notamment aux Etats-Unis, mais pas d'une récession." La croissance n'est pas morte, selon lui, ni pour l'économie, ni pour les bénéfices des entreprises, un facteur que les intervenants de marché suivront avec la plus grande attention lors de la saison de résultats trimestriels sur le point de débuter. "Les marchés sont en train d'intégrer dans les cours une contraction des bénéfices alors que nous voyons leur croissance ralentir mais se poursuivre", dit-il. La tendance l'an dernier a été pénalisée en outre par une multitude de risques politiques, des tensions commerciales entres les Etats-Unis et la Chine aux incertitudes entourant les négociations sur le Brexit et le bras de fer entre Rome et Bruxelles sur le budget de l'Italie, autant de dossiers qui devraient continuer de peser cette année. "Les questions politiques ne font pas partie des choses que l'on peut prévoir et cela crée de l'incertitude, ce qui est un aspect négatif pour les marchés financiers et génère de la volatilité", commente Florent Bronès. "Pour que les fondamentaux positifs reprennent le dessus, il faut que l'incertitude politique diminue."

Deux hausses de taux en vue aux États-Unis
Autre dossier chaud, le resserrement monétaire en cours aux Etats-Unis et la communication parfois mal comprise sur les marchés du président de la Réserve fédérale, Jerome Powell, soumis en outre à une pression constante du président américain, adversaire déclaré de la politique de hausse de taux conduite par l'institution. "Quand Donald Trump a commencé à remettre en cause l'indépendance de la Fed, ça a généré de la nervosité sur les marchés, ce qui a été un signal de l'accélération de la baisse à Wall Street, mais cela a été bref parce que dans les 48 heures qui ont suivi, plusieurs responsables de l'administration américaine sont intervenus pour corriger le tir", souligne l'expert de BNP Paribas WM. "La Fed a changé sa communication, désormais un peu plus accommodante, mais personne n'a dit qu'elle ne remonterait pas les taux. Elle a dit prévoir deux hausses de taux cette année, en précisant que le calendrier dépendrait des données, ce qui est également notre scénario privilégié." Autre élément ayant contribué à la baisse des marchés à la fin de l'année dernière, et non sans lien avec la politique monétaire de la Fed, l'amorce d'une inversion de la courbe des taux aux Etats-Unis, un signal annonçant historiquement une entrée en récession à moyen terme. "Ce qui domine les marchés obligataires, c'est l'aplatissement de la courbe des taux américains, avec les taux longs qui ont monté beaucoup moins que les taux courts", explique Florent Bronès. "Les pessimistes y voient le signe de l'approche d'une récession mais notre vision est que la courbe reste légèrement positive et qu'il ne faut pas anticiper sur la base d'indicateurs avancés".

Les taux trop bas pour couvrir l'inflation
Le pilotage des anticipations par les banques centrales, aux Etats-Unis comme en Europe, où la Banque centrale européenne (BCE) vient d'arrêter ses rachats d'actifs mais n'a pas commencé à relever ses taux, promet d'animer l'année qui vient de démarrer. "Notre scénario de base chez BNP Paribas est que la BCE pourrait remonter légèrement son taux de dépôt, mais pas avant septembre ou octobre", dit Florent Bronès. "A un moment ou un autre, il va falloir normaliser les politiques monétaires, qui restent anormalement accommodantes. Globalement, nous pensons que la normalisation des politiques monétaires va rester modérée parce que l'inflation ne pose pas de problème." Dans ce contexte, BNP Paribas WM continue de préférer les actions aux obligations. "Les niveaux des taux sont trop bas pour couvrir l'inflation, quels que soient les investissements défensifs que l'on décide de faire", argumente le responsable de la stratégie d'investissement de la banque privée. "Notre conseil à nos clients est donc d'augmenter la part des actifs risqués dans leur portefeuille mais de diversifier en termes de géographie, de secteurs et d'actifs". "En matière de géographie, nous recommandons les pays émergents, le Japon et la zone euro et nous sommes 'neutres' sur les actions américaines."

Légère baisse des places européennes
Hormis Londres, les Bourses européennes ont terminé en baisse lundi, l'absence de Wall Street, les chiffres de croissance en Chine et les incertitudes persistantes sur le Brexit ayant incité à des prises de profits. À Paris, le CAC 40 a terminé en repli de 0,17% à 4.867,78 points et le Dax allemand a perdu 0,62%. De son côté, le Footsie britannique a grappillé 0,03% au terme d'une séance indécise. L'indice EuroStoxx 50 s'est replié de 0,31%, le FTSEurofirst 300 a cédé 0,3% et le Stoxx 600 a abandonné 0,19%. Les marchés américains sont restés fermés ce lundi, férié aux Etats-Unis pour le "Martin Luther King Day". L'absence des investisseurs américains, à laquelle s'est ajoutée l'incertitude sur le Brexit qui a pesé une longue partie de la séance, ont limité les prises d'initiatives. La Première ministre Theresa May s'est exprimé à 15h30 GMT sur son nouveau plan pour le Brexit, après le rejet la semaine dernière par les députés du projet d'accord avec l'Union. Elle a promis d'essayer de débloquer la situation sur un accord de Brexit en recherchant de nouvelles concessions auprès de l'Union européenne qui permettraient d'éviter l'établissement d'une nouvelle frontière en Irlande. Elle aussi dit vouloir être plus à l'écoute du Parlement lorsqu'il s'agira de négocier les futures relations avec Bruxelles. Les chiffres de croissance en Chine pour le quatrième trimestre et l'ensemble de 2018, publiés lors de la séance en Asie, ont par ailleurs confirmé le ralentissement de la deuxième économie mondiale, mais sans créer d'émoi particulier. L'annonce séparée d'une production industrielle chinoise supérieure aux prévisions et d'une hausse des ventes au détail pour le mois de décembre a en effet contribué à rassurer les investisseurs en éloignant la perspective d'un coup de frein brutal à l'activité économique en Chine. La nouvelle révision à la baisse des prévisions économiques du Fonds monétaire international (FMI), dévoilée à la veille de l'ouverture du Forum économique mondial de Davos, montre toutefois un panorama peu encourageant pour la croissance mondiale.

Valeurs
La tendance générale à la prudence a pénalisé la majorité des secteurs de la cote, la seule hausse notable profitant au compartiment des transports et des loisirs, qui a pris 0,27% grâce entre autres à Air France-KLM; le titre s'est adjugé 5,24% après une recommandation d'achat de Davy Research. A la baisse, le groupe chimique allemand Henkel a chuté de 9,75%, le recul le plus marqué du Stoxx 600, après la présentation de ses prévisions 2019, qui incluent une augmentation des investissements. A Paris, Alstom a fini en hausse de 2,18% après avoir souffert dans un premier temps des informations de Reuters sur la volonté de la Commission européenne de bloquer le projet de rapprochement avec Siemens (+0,20%) dans le ferroviaire. La Commission européenne mène une analyse "nuancée" et en profondeur, prenant en compte notamment la compétition chinoise, pour statuer sur ce projet de rapprochement, a déclaré lundi la commissaire européenne à la Concurrence, après une rencontre avec le ministre de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire. A Londres, Dixons Carphone a terminé en hausse de 1,62% après avoir gagné jusqu'à plus de 7%, en réaction à des informations de presse selon lesquelles le fonds activiste Elliott Advisors envisagerait de prendre "une participation importante" dans le distributeur britannique spécialisé dans l'électronique et la téléphonie. Seul indicateur au programme de la journée en Europe, les prix à la production en Allemagne sont ressortis en baisse de 0,4%, plus marquée qu'attendu, en décembre et leur hausse en rythme annuel revient à 2,7% après +3,3% en novembre. La livre sterling, qui évoluait sur une note stable avant les annonces de Theresa May, a progressé à l'issue de l'intervention de la Première ministre britannique. Elle gagnait 0,2% face au dollar et 0,15% face à l'euro. De son côté, le dollar se maintient à un plus haut de deux semaines face à un panier de devises de référence, bénéficiant de son statut de devise refuge. La séance a été peu animée en Europe avec la fermeture du marché obligataire américain, hormis sur les emprunts d'Etat britanniques et italiens. Le rendement du Gilt britannique à dix ans a réduit son repli après les annonces de Theresa May, cédant trois points de base, à 1,323%. Celui du dix ans italien a au contraire rebondi de plus de deux points de base, à 2,768%, après avoir touché un plus bas de trois semaines vendredi. Le rendement du Bund allemand de même échéance, référence pour la zone euro, a clôturé à 0,255% avant la décision de politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE) jeudi.


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