Le Conseil de sécurité des Nations unies a condamné vendredi le raid aérien qui a fait 53 morts au début de la semaine dans un centre libyen de détention pour migrants, près de Tripoli, et a réclamé l'instauration d'un cessez-le-feu. Le conseil s'était déjà réuni mercredi, au lendemain du raid, mais les Etats-Unis se sont opposés à la publication de la déclaration qui avait été rédigée, rapportent des diplomates. Les déclarations du Conseil sont adoptées par consensus. Le texte approuvé vendredi serait toutefois pratiquement similaire à celui de mercredi. "Les membres du Conseil de sécurité ont souligné la nécessité pour toutes les parties de désamorcer de toute urgence la situation et de s'engager en faveur d'un cessez-le-feu", peut-on y lire. "La paix et la stabilité durables en Libye ne seront possibles que grâce à une solution politique." Les forces fidèles au maréchal Khalifa Haftar, qui tiennent l'est du pays, ont lancé fin avril une offensive à Tripoli, où siège le gouvernement d'union reconnu internationalement. Le bombardement du centre pour migrants est le plus meurtrier depuis le début de ce siège. Haftar et ses hommes sont soutenus depuis des années par les Emirats arabes unis et l'Egypte, tandis que la Turquie a récemment expédié des armes à Tripoli pour aider les forces fidèles au gouvernement à se défendre, dit-on de sources diplomatiques. Dans sa déclaration, le Conseil de sécurité exige "un respect absolu de l'embargo sur les armes de la part de tous les Etats membres" et les invite "à ne pas intervenir dans le conflit ni à prendre des mesures susceptibles de l'exacerber". Il exprime en outre "sa profonde préoccupation face à l'aggravation de la situation humanitaire" et "appelle les parties à autoriser les agences humanitaires à exercer pleinement leurs activités". Il se dit enfin "préoccupé par les conditions de vie dans les centres de détention relevant de la responsabilité du gouvernement libyen". Six mille personnes y sont détenues, souvent dans des conditions inhumaines, selon les mouvements de défense des droits de l'homme.
Tripoli bombardée, des victimes parmi les migrants Pas moins de 40 personnes ont trouvé la mort et 70 autres ont été blessés dans une frappe aérienne, attribuée aux troupes de Khalifa Haftar, contre un centre d'hébergement de migrants à Tajoura dans la banlieue de la capitale libyenne, Tripoli. "Le bilan pourrait s'aggraver", a indiqué Oussama Ali, un porte-parole des services de secours libyens, précisant que 120 migrants étaient regroupés dans le hangar qui a été atteint de plein fouet par la frappe. Le gouvernement d'union nationale (GNA) libyen basé à Tripoli et reconnu par la communauté internationale a qualifié, dans un communiqué, cette frappe de "crime odieux", attribuant l'attaque au "criminel de guerre, Khalifa Haftar", qui tente vainement depuis trois mois de s'emparer de la capitale libyenne Tripoli. Le GNA a accusé les forces pro-Haftar d'avoir mené une attaque "préméditée" et "précise" contre le centre de migrants. Les services de secours ont indiqué être encore à la recherche d'éventuels survivants sous les décombres, tandis que des dizaines d'ambulances se précipitaient sur place. L'attaque des forces de Khalifa Haftar, intervient quelques heures seulement après les menaces faites par ces dernières annonçant "l'intensification des frappes aériennes contre les objectifs de GNA", et ce, en guise d'une vengeance suite à leur défaite dans la ville de Gharyan (75 km au sud de Tripoli), qui servait de centre des opérations aux troupes de Haftar mais reprise désormais totalement par les forces du GNA. Les défaites des forces de Haftar ont été, en outre, signalées ces derniers jours dans d'autres villes, à l'instar d'Esbiaa au sud de Tripoli. Dans la ville de Gharyan, les forces du GNA ont ,en plus du fait d'avoir repris le contrôle de la ville, ont pu détenir 150 hommes parmi les troupes de Haftar et saisir un arsenal de guerre des plus importants. "Nous avons pu emprisonner 150 éléments pro-Haftar et saisi 70 véhicules armés et blindés émiratis", a fait savoir Mohamad Gnounou, porte-parole des forces du GNA, en marge d'une conférence de presse animée conjointement avec le maire de la ville de Gharyan . La frappe des forces "du criminel Haftar" contre le centre de détention de migrants n'est pour le gouvernement d'union nationale dirigé par Fayez-al Sarradj qu'un "crime odieux", a noté le GNA dans un communiqué. "L'attaque contre le centre de détention de migrants était "préméditée" et "précise", a fait également observer le GNA. Le général Khalifa Haftar qui avait parié le 4 avril dernier que son offensive contre Tripoli serait une "promenade de quelques jours" est confronté à une farouche résistance l'empêchant d'avancer sur tous les axes, alors ses forces sont acculées partout, au point où ses hommes sont démoralisés, notent des observateurs. Les accusations de Haftar contre la Turquie lui reprochant d'aider les forces du GNA,n'étaient, relèvent les analystes, qu'une énième tentative de la part de ce dernier, afin de remonter un tant soit peu le moral de ses hommes et de redorer son blason auprès de la communauté internationale auprès de laquelle,il s'est fait humilié et discrédité. En témoignent, les réserves exprimées par des puissances étrangères, à l'image des Etats-Unis, la France et la Grande Bretagne, quant à l'inutilité du conflit en Libye.
Condamnations en série contre l'attaque de Haftar La frappe contre le centre de migrants a suscité l'indignation de plusieurs pays et ONG, condamnant un "acte horrible" dont les auteurs doivent rendre des comptes. Dans ce contexte, le président de la commission de l'Union africaine, Moussa Faki Mahamat, qui a "fermement" condamné la frappe tuant des migrants, a demandé également que soit menée une enquête indépendante pour s'assurer que les responsables du meurtre horrible de ces civils rendent des comptes", poursuit le communiqué. De son côté, le ministre italien des Affaires étrangères, Enzo Moavero, a fait part de sa "consternation". "Cette nouvelle tragédie montre l'impact atroce de la guerre sur la population civile", a-t-il déclaré dans un communiqué assorti d'une condamnation. Pour sa part, le bureau du Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) s'est dit "extrêmement préoccupé" par des informations sur des frappes aériennes contre le centre de détention de Tajoura, et "sur la mort de réfugiés et de migrants". La situation des migrants en Libye est devenue plus critique depuis le début le 4 avril de l'offensive des troupes de Haftar pour tenter de s'emparer de la capitale Tripoli, siège du GNA. La mission d'appui de l'ONU en Libye (Manul) a maintes fois exprimé son inquiétude sur le sort d'environ 3500 migrants et réfugiés "en danger dans des centres de détention situés près de zones d'affrontements". L'agression militaire menée depuis avril dernier par les troupes de Haftar pour contrôler Tripoli ont fait plus de 700 morts et 4 000 blessés ainsi que près de 100 000 déplacés, selon l'ONU, alors l'armée du GNA fortifie jour après jour ses positions autour de la capitale et mène une résistance ayant repoussé l'agresseur sur plusieurs axes.