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Albert Camus, un pouvoir qui échappe
50e anniversaire de sa mort
Publié dans Le Midi Libre le 04 - 01 - 2010

Paradoxalement, Camus (Prix Nobel de littérature 1957), qui a écrit des romans, est perçu souvent comme un théoricien dont les écrits devraient être pris pour argent comptant. Du côté des ex-colonisés, son roman "l'Etranger" est considéré comme la pièce à conviction de son parti pris pour l'Algérie coloniale.
Paradoxalement, Camus (Prix Nobel de littérature 1957), qui a écrit des romans, est perçu souvent comme un théoricien dont les écrits devraient être pris pour argent comptant. Du côté des ex-colonisés, son roman "l'Etranger" est considéré comme la pièce à conviction de son parti pris pour l'Algérie coloniale.
Le romancier a-t-il un pouvoir ? En principe la réponse est non quand surtout cette notion de pouvoir renvoie à la sphère politique. Pour autant, les écrivains ne laissent pas indifférents. Quant ils accèdent à la postérité, tout le monde cherche à se les concilier même si en même temps, il se trouvera toujours des détracteurs qui vont les prendre pour cible. Albert Camus (1913-1960), dont on célèbre cette semaine le cinquantième anniversaire de sa mort, n'y a pas échappé. Il est l'humaniste invétéré pour certains et l'icône littéraire du colonialisme français en Algérie pour d'autres. Paradoxalement Camus, qui a écrit des romans, est perçu souvent comme un théoricien dont les écrits devraient être pris pour argent comptant. Du côté des ex- colonisés, son roman l'Etranger est considéré comme la pièce à conviction de son parti pris pour l'Algérie coloniale. Du moins c'est la lecture faite par la majorité des critiques. Le roman met en scène le meurtre de «l'Arabe» tué par le soleil sous l'œil de Meursault, c'est-à-dire du personnage campant le rôle du colon, le tueur «sympathique» qui va ensuite au cinéma voir un film au lieu d'assister à l'enterrement de sa mère. Mais en Algérie même, des voix se sont élevées ces dernières années pour plaider «l'algérianité» de Camus. Beaucoup ont exhumé ses articles parus dans le quotidien Alger Républicain datant de l'été 1939 et dénonçant la misère qui régnait en Kabylie. C'est cette facette de l'homme qui a du reste été mise en exergue par les médias français qui, à l'occasion ont aménagé leur programme pour inclure des émissions sur l'écrivain. «Il disait qu'il voulait parler pour ceux qui n'ont pas la parole ou ceux qui sont opprimés», témoigne-t-on. Il est vrai que la biographie de Camus a de quoi surprendre, c'est l'un des rares intellectuels français de cette envergure qui ne soit pas issu de la bourgeoisie. Sa mère est loin d'être une aristocrate, elle est tout juste une femme de ménage, un peu sourde, ne sachant ni lire ni écrire tandis que son père était un caviste que le petit Albert n'aura pas le temps de connaître puisqu'il meurt à la guerre. L'écrivain a marqué certes de son empreinte le débat intellectuel de l'époque, il est avec le philosophe Jean-Paul Sartre, une des personnalités les plus marquantes du 20ème siècle. Ses romans portent pour la plupart la touche philosophique liée à la thématique de l'absurde développé par Sartre et Heidegger. Dans Le Mythe de Sisyphe, L'homme révolté ou bien même La Peste, roman qui a pour cadre la ville d'Oran, on décèle ce romantisme pessimiste ayant marqué la littérature française de l'après-guerre mondiale. La France qui a une tradition littéraire assez ancienne ne pouvait donc passer sous silence un personnage dont le symbolisme reste toujours prégnant. Le Panthéon français ne pouvant supporter d'être déserté par les écrivains, est sans cesse appelé à être «renouvelé» sinon renforcé. Ce n'est pas un hasard si le président français, Nicolas Sarkozy, a émis le souhait de voir la dépouille de l'écrivain transférée du cimetière de Lourmarin, en Provence, au Panthéon où reposent déjà des monuments de la littérature française, à l'instar de Jean-Jacques Rousseau ou Emile Zola. C'est dire que les écrivains ont toujours un pouvoir qui, souvent, leur échappe…
L. G.
Le romancier a-t-il un pouvoir ? En principe la réponse est non quand surtout cette notion de pouvoir renvoie à la sphère politique. Pour autant, les écrivains ne laissent pas indifférents. Quant ils accèdent à la postérité, tout le monde cherche à se les concilier même si en même temps, il se trouvera toujours des détracteurs qui vont les prendre pour cible. Albert Camus (1913-1960), dont on célèbre cette semaine le cinquantième anniversaire de sa mort, n'y a pas échappé. Il est l'humaniste invétéré pour certains et l'icône littéraire du colonialisme français en Algérie pour d'autres. Paradoxalement Camus, qui a écrit des romans, est perçu souvent comme un théoricien dont les écrits devraient être pris pour argent comptant. Du côté des ex- colonisés, son roman l'Etranger est considéré comme la pièce à conviction de son parti pris pour l'Algérie coloniale. Du moins c'est la lecture faite par la majorité des critiques. Le roman met en scène le meurtre de «l'Arabe» tué par le soleil sous l'œil de Meursault, c'est-à-dire du personnage campant le rôle du colon, le tueur «sympathique» qui va ensuite au cinéma voir un film au lieu d'assister à l'enterrement de sa mère. Mais en Algérie même, des voix se sont élevées ces dernières années pour plaider «l'algérianité» de Camus. Beaucoup ont exhumé ses articles parus dans le quotidien Alger Républicain datant de l'été 1939 et dénonçant la misère qui régnait en Kabylie. C'est cette facette de l'homme qui a du reste été mise en exergue par les médias français qui, à l'occasion ont aménagé leur programme pour inclure des émissions sur l'écrivain. «Il disait qu'il voulait parler pour ceux qui n'ont pas la parole ou ceux qui sont opprimés», témoigne-t-on. Il est vrai que la biographie de Camus a de quoi surprendre, c'est l'un des rares intellectuels français de cette envergure qui ne soit pas issu de la bourgeoisie. Sa mère est loin d'être une aristocrate, elle est tout juste une femme de ménage, un peu sourde, ne sachant ni lire ni écrire tandis que son père était un caviste que le petit Albert n'aura pas le temps de connaître puisqu'il meurt à la guerre. L'écrivain a marqué certes de son empreinte le débat intellectuel de l'époque, il est avec le philosophe Jean-Paul Sartre, une des personnalités les plus marquantes du 20ème siècle. Ses romans portent pour la plupart la touche philosophique liée à la thématique de l'absurde développé par Sartre et Heidegger. Dans Le Mythe de Sisyphe, L'homme révolté ou bien même La Peste, roman qui a pour cadre la ville d'Oran, on décèle ce romantisme pessimiste ayant marqué la littérature française de l'après-guerre mondiale. La France qui a une tradition littéraire assez ancienne ne pouvait donc passer sous silence un personnage dont le symbolisme reste toujours prégnant. Le Panthéon français ne pouvant supporter d'être déserté par les écrivains, est sans cesse appelé à être «renouvelé» sinon renforcé. Ce n'est pas un hasard si le président français, Nicolas Sarkozy, a émis le souhait de voir la dépouille de l'écrivain transférée du cimetière de Lourmarin, en Provence, au Panthéon où reposent déjà des monuments de la littérature française, à l'instar de Jean-Jacques Rousseau ou Emile Zola. C'est dire que les écrivains ont toujours un pouvoir qui, souvent, leur échappe…
L. G.


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