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Le mal du siècle
Allergies
Publié dans Le Midi Libre le 27 - 03 - 2014

Classée quatrième maladie chronique mondiale par l'OMS, les allergies ne cessent d'augmenter. Rien ne semble arrêter ce mal du siècle, alimenté par nos modes de vie. Enquête.
Classée quatrième maladie chronique mondiale par l'OMS, les allergies ne cessent d'augmenter. Rien ne semble arrêter ce mal du siècle, alimenté par nos modes de vie. Enquête.
Pour certains, pas besoin d'aller en Irak pour risquer sa vie, une simple tartine de beurre de cacahuète suffit à les envoyer à l'hôpital à l'article de la mort. Pour d'autres, ce sera un crustacé, une piqûre de guêpe, un antibiotique, un tatouage au henné noir...
Pour la grande majorité, le calvaire se traduira par des yeux irrités, le nez qui coule, des plaques et démangeaisons, de la toux et des difficultés à respirer, et ce au simple contact d'acariens, de poils de chat, de particules polluantes ou de pollens disséminés par le vent. Avec des périodes culminantes comme l'arrivée du printemps, porteur de son fameux rhume des foins, ou les pics de pollution comme celui qui vient de sévir sur une grande partie de la France.
Loin d'être anodin, ce mal en augmentation exponentielle sur toute la planète est en passe de compter parmi les pathologies du siècle. L'OMS classe les allergies au 4e rang des maladies chroniques dans le monde. Plus inquiétant encore, l'organisation estime que, d'ici à 2050, une personne sur deux sera allergique.
En France, 25 à 30 % de personnes en souffrent aujourd'hui. Un nombre qui a doublé en 20 ans, et notamment chez les enfants et les adolescents.Mais d'où nous viennent ces allergies et pourquoi cette soudaine flambée, alors que la maladie n'était pas un sujet dans les années 50, 60 et même 70? «L'allergie, c'est une réponse inappropriée et excessive du système immunitaire lorsque l'organisme est mis en contact avec une substance étrangère identifiée à tort comme dangereuse, explique Denise-Anne Moneret-Vautrin, professeur à la faculté de médecine de l'université Henri-Poincaré de Nancy.
C'est une maladie multifactorielle, complexe, qui naît de la rencontre d'une prédisposition génétique avec plusieurs facteurs environnementaux. Elle peut survenir à tout moment, à n'importe quel âge.»
Une défaillance du système immunitaire
En fait, il s'agit d'une défaillance du système immunitaire qui se met en branle mal à propos. Et ce dysfonctionnement peut avoir une multitude de facteurs déclenchant. Le plus notoire et le plus répandu reste le pollen. Le mal est saisonnier. Il apparaît au printemps et disparaît en été. Il se manifeste par des crises d'éternuements, des démangeaisons nasales, des conjonctivites, le nez qui coule, avec le risque de complications et de dérive vers un asthme chronique. Or la maladie semble se développer alors qu'il n'y a pas plus d'arbres ou de fleurs qu'auparavant. Et peut-être même moins, compte tenu de l'urbanisation galopante.
Que s'est-il passé ? Les pollens ont-ils changé ? Notre organisme y est-il plus sensible ? Les allergologues mettent en cause la pollution de l'air et les particules dégagées par les gaz d'échappement des automobiles. "Ces derniers libèrent du dioxyde d'azote (NO2), lequel pourrait modifier la structure biochimique des pollens et stimulerait leur puissance, explique le Pr Michel Aubier, chef du service de pneumologie de l'hôpital Bichat.
Les allergènes fixés sur les particules émises par les moteurs diesel pénètrent aussi plus profondément dans l'appareil respiratoire." Le dioxyde d'azote pourrait même, selon les travaux d'un chimiste allemand, Ulrich Pöschl, rendre allergènes des protéines issues de pollens a priori inoffensives. De quoi s'alarmer. Les intérieurs confinés, mal ventilés, chauds et humides favorisent la prolifération d'acariens.
Les intérieurs confinés, mal ventilés, chauds et humides
Plus pernicieux encore, l'ennemi se nicherait jusque dans nos alcôves et s'épanouirait dans nos intérieurs de plus en plus confinés et le plus souvent mal ventilés et mal aérés. Christine Rolland, directrice de l'association Asthme & Allergies, observe que : "L'origine de la flambée d'allergies est concomitante au premier choc pétrolier. Un événement à l'origine de mesures d'économies d'énergie dont l'isolation et le calfeutrage des habitations." Celles-ci sont devenues de vrais bouillons de culture où prolifèrent microbes, acariens et moisissures.
De fait, la pollution intérieure serait de loin la plus grande pourvoyeuse de maladies respiratoires, selon les allergologues, qui ne disposent toutefois pas de données chiffrées à l'appui de leurs observations. Mais il faut savoir que nous passons en moyenne vingt-deux heures par jour en espace clos. Et, si dans les bâtisses anciennes, l'air se renouvelle toutes les trente minutes en moyenne, il faut compter au moins dix heures dans un bâtiment moderne bien isolé. En outre, les rejets de tabac, le monoxyde de carbone et les substances chimiques et composés organiques volatiles issus des peintures et autres produits d'entretien amplifient le phénomène. Le cocktail d'allergènes est plus agressif et nocif en intérieur qu'à l'extérieur.
Nos amies les bêtes ont leur part de responsabilité
Qu'elles soient domestiques ou exotiques. L'allergène se dissimule dans leurs poils, leur salive, leurs débris de peau... Sans oublier les méfaits de nouveaux intrus aussi inattendus qu'improbables. Le Pr Michel Aubier cite ainsi la coccinelle Harmonia axyridis, originaire d'Asie, introduite dans les jardins pour lutter naturellement contre les pucerons et qui envahit les habitations durant l'hiver. Sans parler d'objets aussi insoupçonnables que les oreillers bio en cosse de sarrasin.
On compte officiellement plus d'une centaine d'allergènes Le mal est partout. Il est aussi grandement dans nos assiettes. Dans les pays industrialisés, les allergies alimentaires (à distinguer des intolérances alimentaires, qui ne font pas intervenir le système immunitaire et ne présentent pas les mêmes symptômes) affecteraient 10 à 25 % des enfants et jusqu'à 10 % des adultes. Celles-ci sont d'autant plus sournoises qu'elles risquent d'entraîner des réactions violentes comme un œdème de
Quincke ou un choc anaphylactique.
On compte officiellement plus d'une centaine d'allergènes mais, selon le Pr Denise-Anne Moneret-Vautrin: "Tout aliment risque de provoquer une allergie. Les échanges et l'arrivée de nouveaux produits alimentaires, tels les fruits exotiques, comme les kiwis, en ont fait la démonstration". Et les procédés de fabrication renforcent le phénomène. Le Pr Moneret-Vautrin note une intensification de la fréquence des consultations dans les années 85-90, qui coïncident avec l'essor de l'alimentation industrielle.
"Le fait d'ajouter des substances ou d'isoler des protéines pour les incorporer dans des aliments, sans leur matrice complexe, a eu pour effet d'agir négativement sur la flore intestinale." Enfin, et surtout, les allergologues s'interrogent sur l'effet pervers d'une trop grande hygiène face aux germes et autres microbes. Assainissement des eaux, stérilisation généralisée, usage intensif des antibiotiques ont détruit des micro-organismes, qu'ils soient bons ou mauvais. Plusieurs études ont montré que les nouveau-nés exposés, tôt dans leur vie, à un large éventail de bactéries, ont beaucoup moins de risques de développer des réactions allergiques plus tard.
Notre mode de vie toujours plus aseptisé devient notre talon d'Achille.
Les chercheurs ont par ailleurs observé que les bébés nés par voie basse sont moins soumis aux allergies que ceux nés par césarienne. Notre mode de vie, que l'on souhaite toujours plus aseptisé, deviendrait ainsi notre talon d'Achille. Et, au lieu d'être mithridatisé, notre système de défense s'en trouverait affaibli. En fait, la stimulation précoce du système immunitaire par certaines bactéries joue un rôle de prévention des maladies allergiques.
Pire encore, nous pourrions être conditionnés par un environnement allergène. "De récents travaux montrent que la qualité de l'environnement dans lequel évolue une femme enceinte aura des conséquences sur la formation du système immunitaire de l'enfant à naître", affirme le Pr Pascal Demoly, du CHU de Montpellier. La fumée de tabac, la pollution atmosphérique, l'exposition aux parasites, l'alimentation ou les médicaments peuvent agir et modifier l'expression des gènes de l'embryon, le rendant plus sujet à déclencher une allergie.
La situation, on le voit, s'avère pour le moins complexe, ce que confirment les atermoiements et volte-face de nos allergologues, qui tâtonnent, conseillent et déconseillent. Ainsi, après avoir incité les mamans à avancer la diversification alimentaire de leurs jeunes enfants, ils recommandent l'inverse face à l'échec de cette stratégie. De même, après avoir mis en cause la consommation de produits à base d'arachide chez la femme enceinte, ils estiment aujourd'hui, en s'appuyant sur de nouvelles études, que cette consommation est sans danger. C'est peu dire qu'en la matière, il n'y a guère de certitudes.
La pathologie est trop souvent banalisée
Reste que pour ceux qui souffrent d'allergie, la vie est compliquée, même si la pathologie est trop souvent banalisée. "Et pour les enfants, toujours plus nombreux à souffrir d'allergies alimentaires, le parcours du combattant est de tous les instants, témoigne Christine Rolland. Il faut éviter les allergènes à la maison, à l'école, à la cantine, en vacances..."
Face à ce fléau croissant, pourtant, la lutte s'organise. Un peu dans tous les sens, et de façon parcellaire. S'agissant des pollens, des réseaux de surveillance ont été mis en place et une proposition de loi a été déposée pour lutter contre l'ambroisie, allergène par excellence, qui ne cesse de proliférer. Les industriels de l'agroalimentaire réagissent, de leurs côtés, en proposant des produits sans gluten et sans lactose. Un marché en progression de 10% par an.
Et des réglementations viennent imposer aux produits de grande consommation un étiquetage signalant la présence d'allergènes. Des mesures que les associations jugent encore très insuffisantes face à l'ampleur de ce fléau dans l'air du temps.
Pour certains, pas besoin d'aller en Irak pour risquer sa vie, une simple tartine de beurre de cacahuète suffit à les envoyer à l'hôpital à l'article de la mort. Pour d'autres, ce sera un crustacé, une piqûre de guêpe, un antibiotique, un tatouage au henné noir...
Pour la grande majorité, le calvaire se traduira par des yeux irrités, le nez qui coule, des plaques et démangeaisons, de la toux et des difficultés à respirer, et ce au simple contact d'acariens, de poils de chat, de particules polluantes ou de pollens disséminés par le vent. Avec des périodes culminantes comme l'arrivée du printemps, porteur de son fameux rhume des foins, ou les pics de pollution comme celui qui vient de sévir sur une grande partie de la France.
Loin d'être anodin, ce mal en augmentation exponentielle sur toute la planète est en passe de compter parmi les pathologies du siècle. L'OMS classe les allergies au 4e rang des maladies chroniques dans le monde. Plus inquiétant encore, l'organisation estime que, d'ici à 2050, une personne sur deux sera allergique.
En France, 25 à 30 % de personnes en souffrent aujourd'hui. Un nombre qui a doublé en 20 ans, et notamment chez les enfants et les adolescents.Mais d'où nous viennent ces allergies et pourquoi cette soudaine flambée, alors que la maladie n'était pas un sujet dans les années 50, 60 et même 70? «L'allergie, c'est une réponse inappropriée et excessive du système immunitaire lorsque l'organisme est mis en contact avec une substance étrangère identifiée à tort comme dangereuse, explique Denise-Anne Moneret-Vautrin, professeur à la faculté de médecine de l'université Henri-Poincaré de Nancy.
C'est une maladie multifactorielle, complexe, qui naît de la rencontre d'une prédisposition génétique avec plusieurs facteurs environnementaux. Elle peut survenir à tout moment, à n'importe quel âge.»
Une défaillance du système immunitaire
En fait, il s'agit d'une défaillance du système immunitaire qui se met en branle mal à propos. Et ce dysfonctionnement peut avoir une multitude de facteurs déclenchant. Le plus notoire et le plus répandu reste le pollen. Le mal est saisonnier. Il apparaît au printemps et disparaît en été. Il se manifeste par des crises d'éternuements, des démangeaisons nasales, des conjonctivites, le nez qui coule, avec le risque de complications et de dérive vers un asthme chronique. Or la maladie semble se développer alors qu'il n'y a pas plus d'arbres ou de fleurs qu'auparavant. Et peut-être même moins, compte tenu de l'urbanisation galopante.
Que s'est-il passé ? Les pollens ont-ils changé ? Notre organisme y est-il plus sensible ? Les allergologues mettent en cause la pollution de l'air et les particules dégagées par les gaz d'échappement des automobiles. "Ces derniers libèrent du dioxyde d'azote (NO2), lequel pourrait modifier la structure biochimique des pollens et stimulerait leur puissance, explique le Pr Michel Aubier, chef du service de pneumologie de l'hôpital Bichat.
Les allergènes fixés sur les particules émises par les moteurs diesel pénètrent aussi plus profondément dans l'appareil respiratoire." Le dioxyde d'azote pourrait même, selon les travaux d'un chimiste allemand, Ulrich Pöschl, rendre allergènes des protéines issues de pollens a priori inoffensives. De quoi s'alarmer. Les intérieurs confinés, mal ventilés, chauds et humides favorisent la prolifération d'acariens.
Les intérieurs confinés, mal ventilés, chauds et humides
Plus pernicieux encore, l'ennemi se nicherait jusque dans nos alcôves et s'épanouirait dans nos intérieurs de plus en plus confinés et le plus souvent mal ventilés et mal aérés. Christine Rolland, directrice de l'association Asthme & Allergies, observe que : "L'origine de la flambée d'allergies est concomitante au premier choc pétrolier. Un événement à l'origine de mesures d'économies d'énergie dont l'isolation et le calfeutrage des habitations." Celles-ci sont devenues de vrais bouillons de culture où prolifèrent microbes, acariens et moisissures.
De fait, la pollution intérieure serait de loin la plus grande pourvoyeuse de maladies respiratoires, selon les allergologues, qui ne disposent toutefois pas de données chiffrées à l'appui de leurs observations. Mais il faut savoir que nous passons en moyenne vingt-deux heures par jour en espace clos. Et, si dans les bâtisses anciennes, l'air se renouvelle toutes les trente minutes en moyenne, il faut compter au moins dix heures dans un bâtiment moderne bien isolé. En outre, les rejets de tabac, le monoxyde de carbone et les substances chimiques et composés organiques volatiles issus des peintures et autres produits d'entretien amplifient le phénomène. Le cocktail d'allergènes est plus agressif et nocif en intérieur qu'à l'extérieur.
Nos amies les bêtes ont leur part de responsabilité
Qu'elles soient domestiques ou exotiques. L'allergène se dissimule dans leurs poils, leur salive, leurs débris de peau... Sans oublier les méfaits de nouveaux intrus aussi inattendus qu'improbables. Le Pr Michel Aubier cite ainsi la coccinelle Harmonia axyridis, originaire d'Asie, introduite dans les jardins pour lutter naturellement contre les pucerons et qui envahit les habitations durant l'hiver. Sans parler d'objets aussi insoupçonnables que les oreillers bio en cosse de sarrasin.
On compte officiellement plus d'une centaine d'allergènes Le mal est partout. Il est aussi grandement dans nos assiettes. Dans les pays industrialisés, les allergies alimentaires (à distinguer des intolérances alimentaires, qui ne font pas intervenir le système immunitaire et ne présentent pas les mêmes symptômes) affecteraient 10 à 25 % des enfants et jusqu'à 10 % des adultes. Celles-ci sont d'autant plus sournoises qu'elles risquent d'entraîner des réactions violentes comme un œdème de
Quincke ou un choc anaphylactique.
On compte officiellement plus d'une centaine d'allergènes mais, selon le Pr Denise-Anne Moneret-Vautrin: "Tout aliment risque de provoquer une allergie. Les échanges et l'arrivée de nouveaux produits alimentaires, tels les fruits exotiques, comme les kiwis, en ont fait la démonstration". Et les procédés de fabrication renforcent le phénomène. Le Pr Moneret-Vautrin note une intensification de la fréquence des consultations dans les années 85-90, qui coïncident avec l'essor de l'alimentation industrielle.
"Le fait d'ajouter des substances ou d'isoler des protéines pour les incorporer dans des aliments, sans leur matrice complexe, a eu pour effet d'agir négativement sur la flore intestinale." Enfin, et surtout, les allergologues s'interrogent sur l'effet pervers d'une trop grande hygiène face aux germes et autres microbes. Assainissement des eaux, stérilisation généralisée, usage intensif des antibiotiques ont détruit des micro-organismes, qu'ils soient bons ou mauvais. Plusieurs études ont montré que les nouveau-nés exposés, tôt dans leur vie, à un large éventail de bactéries, ont beaucoup moins de risques de développer des réactions allergiques plus tard.
Notre mode de vie toujours plus aseptisé devient notre talon d'Achille.
Les chercheurs ont par ailleurs observé que les bébés nés par voie basse sont moins soumis aux allergies que ceux nés par césarienne. Notre mode de vie, que l'on souhaite toujours plus aseptisé, deviendrait ainsi notre talon d'Achille. Et, au lieu d'être mithridatisé, notre système de défense s'en trouverait affaibli. En fait, la stimulation précoce du système immunitaire par certaines bactéries joue un rôle de prévention des maladies allergiques.
Pire encore, nous pourrions être conditionnés par un environnement allergène. "De récents travaux montrent que la qualité de l'environnement dans lequel évolue une femme enceinte aura des conséquences sur la formation du système immunitaire de l'enfant à naître", affirme le Pr Pascal Demoly, du CHU de Montpellier. La fumée de tabac, la pollution atmosphérique, l'exposition aux parasites, l'alimentation ou les médicaments peuvent agir et modifier l'expression des gènes de l'embryon, le rendant plus sujet à déclencher une allergie.
La situation, on le voit, s'avère pour le moins complexe, ce que confirment les atermoiements et volte-face de nos allergologues, qui tâtonnent, conseillent et déconseillent. Ainsi, après avoir incité les mamans à avancer la diversification alimentaire de leurs jeunes enfants, ils recommandent l'inverse face à l'échec de cette stratégie. De même, après avoir mis en cause la consommation de produits à base d'arachide chez la femme enceinte, ils estiment aujourd'hui, en s'appuyant sur de nouvelles études, que cette consommation est sans danger. C'est peu dire qu'en la matière, il n'y a guère de certitudes.
La pathologie est trop souvent banalisée
Reste que pour ceux qui souffrent d'allergie, la vie est compliquée, même si la pathologie est trop souvent banalisée. "Et pour les enfants, toujours plus nombreux à souffrir d'allergies alimentaires, le parcours du combattant est de tous les instants, témoigne Christine Rolland. Il faut éviter les allergènes à la maison, à l'école, à la cantine, en vacances..."
Face à ce fléau croissant, pourtant, la lutte s'organise. Un peu dans tous les sens, et de façon parcellaire. S'agissant des pollens, des réseaux de surveillance ont été mis en place et une proposition de loi a été déposée pour lutter contre l'ambroisie, allergène par excellence, qui ne cesse de proliférer. Les industriels de l'agroalimentaire réagissent, de leurs côtés, en proposant des produits sans gluten et sans lactose. Un marché en progression de 10% par an.
Et des réglementations viennent imposer aux produits de grande consommation un étiquetage signalant la présence d'allergènes. Des mesures que les associations jugent encore très insuffisantes face à l'ampleur de ce fléau dans l'air du temps.


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