Du 14 au 25 mai 2014, la 67e édition du Festival de Cannes agite à la fois cinéma d'auteur et paillettes. Tout le cinéma mondial est là, vitrine des problématiques de la planète. Du 14 au 25 mai 2014, la 67e édition du Festival de Cannes agite à la fois cinéma d'auteur et paillettes. Tout le cinéma mondial est là, vitrine des problématiques de la planète. L'Afrique et ses diasporas (qui ne peuvent être dissociées) en sont souvent quasi absentes, mais cette fois, une série de films les représente dans toutes les sélections. Plus encore, une nouvelle génération de cinéastes s'affirme tandis que les problématiques interculturelles en France sont largement abordées. C'était un message sur Facebook le 1er mars 2013 : "Pour le deuxième long métrage de Djinn Carrénard, nous cherchons des figurants majeurs tous critères, pour les jours à venir, concernant des scènes dans des lieux publics. Prestation rémunérée. Comme vous le savez sûrement nous aimons le suspens et les secrets donc pour plus d'infos merci de nous contacter par mail". Signé : La Donoma Guerilla Team. Et bien voilà : le film s'appelle Fla (pour Faire : l'amour) et a été sélectionné en ouverture de la Semaine de Critique ! En 2011, le Haïtien Djinn Carrénard avait cartonné avec Donoma, film "fait avec 20 Û" mais qui avait obtenu le prestigieux prix Louis Delluc : 11.000 entrées France et une tournée mémorable dans un gros bushôtel avec les 18 acteurs et techniciens du film ! Si Fla se retrouve à Cannes en si belle visibilité, c'est grâce à sa liberté. "L'auteur prodige, écrit la Semaine de la critique, insuffle dans son second long métrage toute l'énergie du précédent dans un récit où la puissance dramatique, alliée à la profondeur des personnages et des situations, font de ce film un véritable choc." Le film raconte une histoire d'amour entre un musicien et une mère célibataire incarcérée, avec le rappeur Despo Rutti dans le rôle principal. Habitué d'un "cinéma guérilla", fait dans l'improvisation collective et avec des bouts de ficelles, Carrénard avait accepté une production plus classique pour son deuxième film. Il a démarré le tournage en avril 2012, mais l'a arrêté quelques jours après, sentant qu'il allait dans le mur. Il l'a repris sur d'autres bases quelques mois plus tard... Comment l'amour se construit- il ? Comment faire l'amour ? Sur un tel thème, il fallait innover ! Signe des temps, le seul film français sélectionné par la Semaine de la critique, Hope, raconte l'odyssée d'un jeune couple noir africain qui, du sud du Sahara aux côtes du Maroc, tente de rallier l'Europe. Léonard, un jeune Camerounais, vient en aide à Hope, une Nigériane. Dans un monde hostile où chacun doit rester avec les siens, ils vont tenter d'avancer ensemble et de s'aimer. Venu du documentaire, Boris Lojkine traite cette réalité déjà souvent abordée au cinéma avec un réalisme et une intransigeance impressionnants qui justifient cette mise en avant. Car Cannes est une extraordinaire vitrine pour les films. C'est grâce à sa sélection à ACID que Carrénard a pu faire connaître Donoma. Et si bien sûr un film est en sélection officielle, c'est toute la presse internationale qui en parle : 4.589 journalistes de 86 pays étaient accrédités à Cannes en 2013 (et 29.626 professionnels du cinéma de 124 pays !). Ainsi, en 2006, Bamako du Mauritanien Abderrahmane Sissako n'avait été présenté que hors compétition, des séances que la presse n'a souvent pas le temps de couvrir. Les 226.000 entrées France du film sont venues confirmer l'erreur des sélectionneurs de ne pas avoir saisi cette occasion de remettre un film africain dans la compétition officielle, où l'Afrique noire avait disparu depuis 1997. Elle n'y est revenue qu'en 2010 avec Un homme qui crie du Tchadien Mahamat-Saleh Haroun qui a obtenu le prix du Jury et été à nouveau sélectionné en, 2013 avec Grigris. Agréable revanche, c'est cette année Timbuktu, le chagrin des oiseaux d'Abderrahmane Sissako qui représente l'Afrique parmi les 18 longs-métrages de la compétition. Tourné à l'extrême Est de la Mauritanie, près de la frontière malienne, dans un village hautement sécurisé, le film aborde ce qui s'est passé à Tombouctou durant l'occupation djihadiste : le simulacre de justice (amputations, flagellations), la situation des femmes, les interdits. Il met en avant le combat silencieux de la population prise en otage, attendant d'être libérée : le film raconte ainsi plus les rues que les maisons, et restaure une image vivante d'une population souvent enfermée dans des préjugés négatifs. Mais le duo Haroun-Sissako, sur qui se centrent les sélections dans les grands festivals internationaux, est talonné par une nouvelle génération. C'est ainsi qu'en sélection officielle, Un certain regard présente Run, le premier long-métrage du Franco-Ivoirien Philippe Lacôte dont le projet avait été sélectionné en 2012 par l'Atelier de la Cinéfondation du Festival de Cannes. Le film aborde la crise qui a secoué la Côte d'Ivoire de 2002 à 2011 (sur laquelle il avait déjà fait le documentaire Chroniques de guerre en Côte d'Ivoire) et suit les pas d'un paisible adolescent qui doit devenir féticheur de son village, mais qui rejoindra les "jeunes patriotes", partisans parfois très violents de l'exprésident Laurent Gbagbo, actuellement emprisonné à La Haye, en attente d'un jugement de la Cour pénale internationale. En revenant ainsi sur l'Histoire récente du pays à travers un prisme individuel, ce réalisateur de 42 ans, qui avait déjà fait un documentaire sur le sujet, voudrait surtout questionner les chemins qui mènent à la violence. Si l'Afrique est cette année absente à la Quinzaine des Réalisateurs, le film d'ouverture, Bande de filles de Céline Sciamma a lui un casting entièrement noir : la réalisatrice de 35 ans, qui s'est fait connaître pour ses films sur la naissance du désir et l'identité féminine (Mélange des Pieuvres, Tomboy), suit une ado de 16 ans, Marième, qui va entrer dans une bande de filles déterminées pour s'affranchir des interdits. Habituée des problématiques interculturelles, la sélection ACID (Association du cinéma indépendant pour sa diffusion) qui s'est maintenant fait sa place dans les sélections historiques. On y trouve Qui vive, de Marianne Tardieu où Chérif (Reda Kateb) est vigile dans un grand magasin, confronté à des ados qui le harcèlent, jusqu'à ce qu'un fait divers tragique ne fasse basculer sa vie. Mais aussi Brooklyn de Pascal Tessaud, qui avait déjà abordé le rap dans son documentaire Slam, ce qui nous brûle. La rapeuse suisse, KT Gorique, y joue la jeune Coralie qui débarque à Paris pour y tenter sa chance. C'est avec Challat de Tunis, un "mocumentaire" (mélange moqueur de fiction et de documentaire), que la Tunisienne Kaouther Ben Hania accède à la sélection Acid, seul film d'Afrique du Nord sélectionné. Le film fait un tabac dans les salles de Tunis. Il revient sur l'été 2003, où un homme à moto, lame de rasoir à la main, s'est donné pour mission de balafrer les plus belles paires de fesses des femmes qui arpentent les trottoirs de la ville. On l'appelle le Challat. Tout le monde en parle mais personne ne l'a jamais vu... Au château des mineurs de la Napoule, en marge mais de plus en plus partie prenante du festival, la sélection Visions sociales de la CCAS, rencontre un succès toujours croissant. La conscience du monde, chère à cette programmation, se retrouve, notamment, dans la sélection qui concerne les problématiques africaines et diasporiques : Enfants des nuages - la dernière colonie d'Alvaro Longoria où Javier Bardem cherche à éveiller les consciences sur les relents coloniaux de la géopolitique au Sahara occidental et la nécessité d'y préserver les droits humains ; Assistance mortelle où le Haïtien Raoul Peck dévoile les terribles perversités du système d'aide occidentale à la reconstruction après le terrible tremblement de terre de janvier 2010 ; Ya oulidi ! le prix de la douleur où Joseph El Aouadi-Marando revient sur les traces laissées par le meurtre d'un adolescent de 17 ans, Lahouari Ben Mohamed, victime d'une bavure policière. Au niveau professionnel, la Fabrique des Cinémas du monde, dispositif organisé par l'Institut français avec le soutien de l'Organisation Internationale de la Francophonie et de France Média Monde, invite chaque année des réalisateurs et des producteurs qui développent leur premier ou deuxième long métrage invite. Il s'agit cette année de la Sénégalaise Angèle Diabang pour Une si longue lettre, adaptation du célèbre roman de Mariama Bâ, de l'Algérien Damien Ounouri pour Chedda sur une femme algérienne, et du Sud-Africain John Trengove pour La Blessure / Inbexa, sur les tabous sexuels. Avec en plus Aïssa, le court-métrage de Clément Tréhin-Lalanne en compétition, sur une Congolaise en situation irrégulière sur le territoire français, et le court-métrage The aftermath of the inauguration of the public toilet at kilometer 375 de l'Egyptien Omar El Zohairy qui représente le High Cinema Institute du Caire dans la compétition dédiée aux films de fin d'études de la Cinéfondation, sur la peur d'un fonctionnaire de sortir de son cadre habituel, les problématiques de l'Afrique et de ses diasporas sont bien prises en compte à Cannes cette année : exception ou nouveau départ ? L'Afrique et ses diasporas (qui ne peuvent être dissociées) en sont souvent quasi absentes, mais cette fois, une série de films les représente dans toutes les sélections. Plus encore, une nouvelle génération de cinéastes s'affirme tandis que les problématiques interculturelles en France sont largement abordées. C'était un message sur Facebook le 1er mars 2013 : "Pour le deuxième long métrage de Djinn Carrénard, nous cherchons des figurants majeurs tous critères, pour les jours à venir, concernant des scènes dans des lieux publics. Prestation rémunérée. Comme vous le savez sûrement nous aimons le suspens et les secrets donc pour plus d'infos merci de nous contacter par mail". Signé : La Donoma Guerilla Team. Et bien voilà : le film s'appelle Fla (pour Faire : l'amour) et a été sélectionné en ouverture de la Semaine de Critique ! En 2011, le Haïtien Djinn Carrénard avait cartonné avec Donoma, film "fait avec 20 Û" mais qui avait obtenu le prestigieux prix Louis Delluc : 11.000 entrées France et une tournée mémorable dans un gros bushôtel avec les 18 acteurs et techniciens du film ! Si Fla se retrouve à Cannes en si belle visibilité, c'est grâce à sa liberté. "L'auteur prodige, écrit la Semaine de la critique, insuffle dans son second long métrage toute l'énergie du précédent dans un récit où la puissance dramatique, alliée à la profondeur des personnages et des situations, font de ce film un véritable choc." Le film raconte une histoire d'amour entre un musicien et une mère célibataire incarcérée, avec le rappeur Despo Rutti dans le rôle principal. Habitué d'un "cinéma guérilla", fait dans l'improvisation collective et avec des bouts de ficelles, Carrénard avait accepté une production plus classique pour son deuxième film. Il a démarré le tournage en avril 2012, mais l'a arrêté quelques jours après, sentant qu'il allait dans le mur. Il l'a repris sur d'autres bases quelques mois plus tard... Comment l'amour se construit- il ? Comment faire l'amour ? Sur un tel thème, il fallait innover ! Signe des temps, le seul film français sélectionné par la Semaine de la critique, Hope, raconte l'odyssée d'un jeune couple noir africain qui, du sud du Sahara aux côtes du Maroc, tente de rallier l'Europe. Léonard, un jeune Camerounais, vient en aide à Hope, une Nigériane. Dans un monde hostile où chacun doit rester avec les siens, ils vont tenter d'avancer ensemble et de s'aimer. Venu du documentaire, Boris Lojkine traite cette réalité déjà souvent abordée au cinéma avec un réalisme et une intransigeance impressionnants qui justifient cette mise en avant. Car Cannes est une extraordinaire vitrine pour les films. C'est grâce à sa sélection à ACID que Carrénard a pu faire connaître Donoma. Et si bien sûr un film est en sélection officielle, c'est toute la presse internationale qui en parle : 4.589 journalistes de 86 pays étaient accrédités à Cannes en 2013 (et 29.626 professionnels du cinéma de 124 pays !). Ainsi, en 2006, Bamako du Mauritanien Abderrahmane Sissako n'avait été présenté que hors compétition, des séances que la presse n'a souvent pas le temps de couvrir. Les 226.000 entrées France du film sont venues confirmer l'erreur des sélectionneurs de ne pas avoir saisi cette occasion de remettre un film africain dans la compétition officielle, où l'Afrique noire avait disparu depuis 1997. Elle n'y est revenue qu'en 2010 avec Un homme qui crie du Tchadien Mahamat-Saleh Haroun qui a obtenu le prix du Jury et été à nouveau sélectionné en, 2013 avec Grigris. Agréable revanche, c'est cette année Timbuktu, le chagrin des oiseaux d'Abderrahmane Sissako qui représente l'Afrique parmi les 18 longs-métrages de la compétition. Tourné à l'extrême Est de la Mauritanie, près de la frontière malienne, dans un village hautement sécurisé, le film aborde ce qui s'est passé à Tombouctou durant l'occupation djihadiste : le simulacre de justice (amputations, flagellations), la situation des femmes, les interdits. Il met en avant le combat silencieux de la population prise en otage, attendant d'être libérée : le film raconte ainsi plus les rues que les maisons, et restaure une image vivante d'une population souvent enfermée dans des préjugés négatifs. Mais le duo Haroun-Sissako, sur qui se centrent les sélections dans les grands festivals internationaux, est talonné par une nouvelle génération. C'est ainsi qu'en sélection officielle, Un certain regard présente Run, le premier long-métrage du Franco-Ivoirien Philippe Lacôte dont le projet avait été sélectionné en 2012 par l'Atelier de la Cinéfondation du Festival de Cannes. Le film aborde la crise qui a secoué la Côte d'Ivoire de 2002 à 2011 (sur laquelle il avait déjà fait le documentaire Chroniques de guerre en Côte d'Ivoire) et suit les pas d'un paisible adolescent qui doit devenir féticheur de son village, mais qui rejoindra les "jeunes patriotes", partisans parfois très violents de l'exprésident Laurent Gbagbo, actuellement emprisonné à La Haye, en attente d'un jugement de la Cour pénale internationale. En revenant ainsi sur l'Histoire récente du pays à travers un prisme individuel, ce réalisateur de 42 ans, qui avait déjà fait un documentaire sur le sujet, voudrait surtout questionner les chemins qui mènent à la violence. Si l'Afrique est cette année absente à la Quinzaine des Réalisateurs, le film d'ouverture, Bande de filles de Céline Sciamma a lui un casting entièrement noir : la réalisatrice de 35 ans, qui s'est fait connaître pour ses films sur la naissance du désir et l'identité féminine (Mélange des Pieuvres, Tomboy), suit une ado de 16 ans, Marième, qui va entrer dans une bande de filles déterminées pour s'affranchir des interdits. Habituée des problématiques interculturelles, la sélection ACID (Association du cinéma indépendant pour sa diffusion) qui s'est maintenant fait sa place dans les sélections historiques. On y trouve Qui vive, de Marianne Tardieu où Chérif (Reda Kateb) est vigile dans un grand magasin, confronté à des ados qui le harcèlent, jusqu'à ce qu'un fait divers tragique ne fasse basculer sa vie. Mais aussi Brooklyn de Pascal Tessaud, qui avait déjà abordé le rap dans son documentaire Slam, ce qui nous brûle. La rapeuse suisse, KT Gorique, y joue la jeune Coralie qui débarque à Paris pour y tenter sa chance. C'est avec Challat de Tunis, un "mocumentaire" (mélange moqueur de fiction et de documentaire), que la Tunisienne Kaouther Ben Hania accède à la sélection Acid, seul film d'Afrique du Nord sélectionné. Le film fait un tabac dans les salles de Tunis. Il revient sur l'été 2003, où un homme à moto, lame de rasoir à la main, s'est donné pour mission de balafrer les plus belles paires de fesses des femmes qui arpentent les trottoirs de la ville. On l'appelle le Challat. Tout le monde en parle mais personne ne l'a jamais vu... Au château des mineurs de la Napoule, en marge mais de plus en plus partie prenante du festival, la sélection Visions sociales de la CCAS, rencontre un succès toujours croissant. La conscience du monde, chère à cette programmation, se retrouve, notamment, dans la sélection qui concerne les problématiques africaines et diasporiques : Enfants des nuages - la dernière colonie d'Alvaro Longoria où Javier Bardem cherche à éveiller les consciences sur les relents coloniaux de la géopolitique au Sahara occidental et la nécessité d'y préserver les droits humains ; Assistance mortelle où le Haïtien Raoul Peck dévoile les terribles perversités du système d'aide occidentale à la reconstruction après le terrible tremblement de terre de janvier 2010 ; Ya oulidi ! le prix de la douleur où Joseph El Aouadi-Marando revient sur les traces laissées par le meurtre d'un adolescent de 17 ans, Lahouari Ben Mohamed, victime d'une bavure policière. Au niveau professionnel, la Fabrique des Cinémas du monde, dispositif organisé par l'Institut français avec le soutien de l'Organisation Internationale de la Francophonie et de France Média Monde, invite chaque année des réalisateurs et des producteurs qui développent leur premier ou deuxième long métrage invite. Il s'agit cette année de la Sénégalaise Angèle Diabang pour Une si longue lettre, adaptation du célèbre roman de Mariama Bâ, de l'Algérien Damien Ounouri pour Chedda sur une femme algérienne, et du Sud-Africain John Trengove pour La Blessure / Inbexa, sur les tabous sexuels. Avec en plus Aïssa, le court-métrage de Clément Tréhin-Lalanne en compétition, sur une Congolaise en situation irrégulière sur le territoire français, et le court-métrage The aftermath of the inauguration of the public toilet at kilometer 375 de l'Egyptien Omar El Zohairy qui représente le High Cinema Institute du Caire dans la compétition dédiée aux films de fin d'études de la Cinéfondation, sur la peur d'un fonctionnaire de sortir de son cadre habituel, les problématiques de l'Afrique et de ses diasporas sont bien prises en compte à Cannes cette année : exception ou nouveau départ ?