Dans quinze jours, Cannes abritera la 67e édition du plus prestigieux des festivals de cinéma. Des centaines de films, des projections à foison, des stars, du glamour et parfois du «vrai» cinéma. Et l'Afrique dans tout ça ? Cette année, aucun film sélectionné, ni pour la Palme d'or ni, à un Certain regard, ni à la Quinzaine, voire à la Semaine de la critique. Quelques semaines avant l'annonce des sélections, des rumeurs circulaient. On évoquait la quasi-certitude de revoir celui qui ramena la seule Palme d'or sur le continent africain, le retentissant Mohamed Lakhdar-Hamina. Nous étions en 1975 et Chronique des années de braise venait d'entrer dans l'histoire officielle. Et aujourd'hui ? Ni Hamina, ni Lyes Salem (L'Oranais), ni Belkacem Hadjadj (Le Burnous embrasé) furent invités à montrer leur film. Tous ont été rejetés. Nous ne connaîtrons jamais les raisons de cet écart, excepté pour l'une des sections parallèles, celle dirigée par Edouard Waintrop, La Quinzaine des réalisateurs. Selon l'un des membres du comité de sélection, les deux courts-métrages algériens présélectionnés, Passage à niveau de Anis Djaad et N'sibi de Hassene Belaïd, étaient de «très bonne qualité, avec un récit intéressant et qui avaient leur place dans ce genre de rendez-vous cinématographiques. Malheureusement il faut faire des choix, d'autres films étaient légèrement plus pertinents». Abderrahmane Sissako est l'un des deux cinéastes d'Afrique qui verra son film projeté dans le cadre du festival. Sissako présentera Le Chagrin des oiseaux (Timbuktu), avec lequel il racontera ce qui s'est «réellement» déroulé un 22 juillet 2012, à Aguelhok, une petite ville du nord du Mali où un homme et une femme avec deux enfants, se fait assassiner. Leur crime était de ne pas être mariés. SISSAKO Dans la sélection un Certain regard, on y trouvera l'Ivoirien Philippe Lacôte qui viendra soutenir Run, après l'avoir présenté l'année dernière à la Cinéfondation : «C'est l'histoire d'un jeune homme dont la vie est construite autour de trois courses. A travers sa trajectoire assez emblématique, je raconte les vingt dernières années de l'histoire tourmentée de la Côte d'Ivoire.» Reporter radio, projectionniste, assistant de production, il filme depuis 2002, seul, «d'une manière plus documentaire». Lors de l'annonce des 18 sélectionnés pour la lutte à la Palme d'or, Thierry Frémaux oublie de citer le film de Sissako. Il aura fallu le jeu des questions-réponses avec les journalistes, et ce, au bout de 30 minutes, pour que le délégué général constate son erreur. C'est un acte manqué et malheureusement représentatif de la place qu'on accorde aux cinématographiques d'Afrique. En parallèle, il faut l'avouer et l'assumer, très peu de films sont produits dans l'année et certains souffrent d'une faiblesse dans la mise en scène ainsi que dans la fabrication. L'Algérie, par exemple, ne verra aucun de ses films projeté dans les sections cinématographiques cannoises, cela ne l'empêchera pas d'arborer un «pavillon» afin de vendre ses productions. Tout est réinventé dans le cinéma. Même l'illogisme.