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L'exclusion des supplétifs
Mon père, ce harki de Dalila Kerchouche
Publié dans Le Midi Libre le 07 - 10 - 2008

Sans amertume ni vindicte, sans parti pris ni misérabilisme, «Mon père, ce harki» est un ouvrage de Dalila Kerchouche qui remonte le temps pour retracer en partie la vie des harkis dans l'Hexagone, mais aussi, et surtout, des femmes et filles de harkis qui, en faisant le choix de leur mari, dans la guerre et dans l'exil, ont connu le drame des camps du sud de la France, qu'elles ont subi de plein fouet.
L'observateur averti de l'histoire de la guerre d'Indépendance de l'Algérie sait les épreuves traversées par les harkis depuis 1962. En revanche, ce que l'on sait moins, c'est l'accueil réservé aux dizaines de familles parquées dans des camps de l'Hexagone, à l'écart du reste de la population dans des conditions très similaires à celles des réfugiés de la guerre civile espagnole. C'est au prix de rudes efforts que la journaliste Dalila Kerchouche, née en 1973 dans un camp de harkis, nous donne à lire «l'histoire cruelle d'un véritable abandon né du mépris, né (…) du racisme», écrit Jacques Duquesne dans la préface du livre «Mon père, ce harki», publié chez les éditions du Seuil en 2003. Elle nous parle de ces harkis sans voix, ceux qui se sont murés dans le silence imposé ou non. L'ouvrage n'a pas de prétention à proprement parler historique, il est plutôt un témoignage sur les conditions de vie des supplétifs FSNA (Français de souche nord-africaine) ainsi que leurs familles lors de leur arrivée en France. Réquisitoire ou simple biographie familiale sur le drame de la «communauté harkie» ?… La famille de l'auteur est l'une d'entre elles. Dalila Kerchouche s'efforce de reconstituer, au fil des camps où vécurent ses parents, des décennies d'exclusion politique, économique et sociale : on découvre la faim, les déchirements, la misère, l'insalubrité des camps, mais aussi la discipline quasi militaire, la corruption, les mauvais traitements infligés aux familles, qui constituaient le lot quotidien de ces Français musulmans. Les conséquences sociales furent et sont encore aujourd'hui plus que préoccupantes : suicides, mortalité infantile, chômage, difficultés d'intégration dans une société qui a parfois du mal à différencier ces Français «par le sang versé» des «jeunes» des cités en rupture d'intégration. La journaliste de l'Express, pour exorciser une douleur qui la ronge depuis qu'on accole à sa personne depuis notamment son adolescence, l'insupportable humiliation «fille de harki» en France. «Je suis une fille de harki. J'écris ce mot avec un petit «h» comme honte», écrit-elle. Son père était-il vraiment un supplétif de l'armée française ? S'était-il rangé aux côtés de la France coloniale ? n'avait de cesse de s'interroger l'adolescente. Ce père qu'elle adorait tant devient à ses yeux un traître qui refuse de commenter son passé. A chaque fois que Dalila abordait le sujet, son père se gardait, de faire le moindre commentaire, disait-elle. Ce qui l'accabla davantage. Elle ne put arracher le moindre indice sur le passé de sa famille. Elle remonte donc le temps en fouinant dans le passé des familles de harkis. Elle refait leur parcours dans le sens inverse. Celui de sa famille aussi et surtout de son père. Elle sillonne bourgs, bourgades et villes, que cela soit à Bias, Bourg-Lastic, Rivesaltes et autres Lozère, Roussilon-en-Morvan et Mouans-Sartroux pour lever des pans de voile sur des tranches de de vie où la réalité s'est révélée aussi amère que complexe. Sans parti pris, sinon avide de connaître ses origines, surtout le rôle de son père lors de la guerre de Libération nationale, l'auteur poursuit son investigation à travers un voyage en Algérie pour découvrir les origines du drame. Elle entame donc sa quête «harkéologique» dans un village perché sur les montagnes de la région de l'Ouarsenis où elle fait donc le voyage en 1999 dans son pays d'origine, dans la région de sa famille, (une montagne près de Chlef) où les groupes terroristes faisaient la loi. Elle découvre auprès des siens que les choses ne sont pas comme elle le croyait. C'est là où, à en croire le témoignage de l'auteur, ce livre est aussi une introspection psychanalytique sur les origines d'un drame. Celui qui nous donne à voir l'histoire de ces supplétifs musulmans qui se sont engagés aux côtés de l'armée française pendant la guerre de Libération nationale.
F. B-H.
Sans amertume ni vindicte, sans parti pris ni misérabilisme, «Mon père, ce harki» est un ouvrage de Dalila Kerchouche qui remonte le temps pour retracer en partie la vie des harkis dans l'Hexagone, mais aussi, et surtout, des femmes et filles de harkis qui, en faisant le choix de leur mari, dans la guerre et dans l'exil, ont connu le drame des camps du sud de la France, qu'elles ont subi de plein fouet.
L'observateur averti de l'histoire de la guerre d'Indépendance de l'Algérie sait les épreuves traversées par les harkis depuis 1962. En revanche, ce que l'on sait moins, c'est l'accueil réservé aux dizaines de familles parquées dans des camps de l'Hexagone, à l'écart du reste de la population dans des conditions très similaires à celles des réfugiés de la guerre civile espagnole. C'est au prix de rudes efforts que la journaliste Dalila Kerchouche, née en 1973 dans un camp de harkis, nous donne à lire «l'histoire cruelle d'un véritable abandon né du mépris, né (…) du racisme», écrit Jacques Duquesne dans la préface du livre «Mon père, ce harki», publié chez les éditions du Seuil en 2003. Elle nous parle de ces harkis sans voix, ceux qui se sont murés dans le silence imposé ou non. L'ouvrage n'a pas de prétention à proprement parler historique, il est plutôt un témoignage sur les conditions de vie des supplétifs FSNA (Français de souche nord-africaine) ainsi que leurs familles lors de leur arrivée en France. Réquisitoire ou simple biographie familiale sur le drame de la «communauté harkie» ?… La famille de l'auteur est l'une d'entre elles. Dalila Kerchouche s'efforce de reconstituer, au fil des camps où vécurent ses parents, des décennies d'exclusion politique, économique et sociale : on découvre la faim, les déchirements, la misère, l'insalubrité des camps, mais aussi la discipline quasi militaire, la corruption, les mauvais traitements infligés aux familles, qui constituaient le lot quotidien de ces Français musulmans. Les conséquences sociales furent et sont encore aujourd'hui plus que préoccupantes : suicides, mortalité infantile, chômage, difficultés d'intégration dans une société qui a parfois du mal à différencier ces Français «par le sang versé» des «jeunes» des cités en rupture d'intégration. La journaliste de l'Express, pour exorciser une douleur qui la ronge depuis qu'on accole à sa personne depuis notamment son adolescence, l'insupportable humiliation «fille de harki» en France. «Je suis une fille de harki. J'écris ce mot avec un petit «h» comme honte», écrit-elle. Son père était-il vraiment un supplétif de l'armée française ? S'était-il rangé aux côtés de la France coloniale ? n'avait de cesse de s'interroger l'adolescente. Ce père qu'elle adorait tant devient à ses yeux un traître qui refuse de commenter son passé. A chaque fois que Dalila abordait le sujet, son père se gardait, de faire le moindre commentaire, disait-elle. Ce qui l'accabla davantage. Elle ne put arracher le moindre indice sur le passé de sa famille. Elle remonte donc le temps en fouinant dans le passé des familles de harkis. Elle refait leur parcours dans le sens inverse. Celui de sa famille aussi et surtout de son père. Elle sillonne bourgs, bourgades et villes, que cela soit à Bias, Bourg-Lastic, Rivesaltes et autres Lozère, Roussilon-en-Morvan et Mouans-Sartroux pour lever des pans de voile sur des tranches de de vie où la réalité s'est révélée aussi amère que complexe. Sans parti pris, sinon avide de connaître ses origines, surtout le rôle de son père lors de la guerre de Libération nationale, l'auteur poursuit son investigation à travers un voyage en Algérie pour découvrir les origines du drame. Elle entame donc sa quête «harkéologique» dans un village perché sur les montagnes de la région de l'Ouarsenis où elle fait donc le voyage en 1999 dans son pays d'origine, dans la région de sa famille, (une montagne près de Chlef) où les groupes terroristes faisaient la loi. Elle découvre auprès des siens que les choses ne sont pas comme elle le croyait. C'est là où, à en croire le témoignage de l'auteur, ce livre est aussi une introspection psychanalytique sur les origines d'un drame. Celui qui nous donne à voir l'histoire de ces supplétifs musulmans qui se sont engagés aux côtés de l'armée française pendant la guerre de Libération nationale.
F. B-H.


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