Rien ne sera plus comme avant pour la femme algérienne qui entrevoit l'avenir avec une grande sérénité. Très lésée jusque-là en matière de droits politiques et subissant une évidente «discrimination» tant elle ne servait souvent que de décorum, la femme algérienne aura désormais droit de cité dans les assemblées élues et se verra ouvrir grandes les portes d'institutions publiques qui lui étaient presque fermées puisque inaccessibles. C'est le président de la République qui a donné le coup de grâce à ce «rétrograde» ordre établi en réparant un tort qui n'avait pas lieu d'être. En amendant la Constitution et en veillant à l'élaboration d'une loi organique, qui n'est pour le moment qu'au stade de projet mais dont tout indique qu'elle va consacrer le principe du quota qui sera dorénavant réservée aux femmes dans les listes électorales, Abdelaziz Bouteflika, a ouvert une nouvelle page de l'histoire politique du pays. Les partis politiques, qui faisaient peu cas du rôle et de la place de la femme, à laquelle ils ne réservent généralement que des strapontins sur leurs listes électorales, vont devoir s'adapter à cette nouvelle donne. Rien ne sera plus comme avant pour la femme algérienne qui entrevoit l'avenir avec une grande sérénité. Très lésée jusque-là en matière de droits politiques et subissant une évidente «discrimination» tant elle ne servait souvent que de décorum, la femme algérienne aura désormais droit de cité dans les assemblées élues et se verra ouvrir grandes les portes d'institutions publiques qui lui étaient presque fermées puisque inaccessibles. C'est le président de la République qui a donné le coup de grâce à ce «rétrograde» ordre établi en réparant un tort qui n'avait pas lieu d'être. En amendant la Constitution et en veillant à l'élaboration d'une loi organique, qui n'est pour le moment qu'au stade de projet mais dont tout indique qu'elle va consacrer le principe du quota qui sera dorénavant réservée aux femmes dans les listes électorales, Abdelaziz Bouteflika, a ouvert une nouvelle page de l'histoire politique du pays. Les partis politiques, qui faisaient peu cas du rôle et de la place de la femme, à laquelle ils ne réservent généralement que des strapontins sur leurs listes électorales, vont devoir s'adapter à cette nouvelle donne. Eligibilité des algériennes Bouteflika, l'homme des ruptures Depuis qu'il est à la tête de l'Etat le président de la République a institué une tradition qui veut qu'en chaque journée du 8 mars, consacrée partout dans le monde comme Journée mondiale de la femme, il organise une cérémonie en l'honneur de la femme algérienne. Une cérémonie loin d'être protocolaire puisqu'elle lui permet d'évaluer les avancées accomplies mais surtout de mettre en exergue les retards qui restent à combler en vue d'améliorer la position de la femme algérienne et son égalité ave les hommes, tout au long de ces dix années d'exercice du pouvoir Abdelaziz Bouteflika a eu à mesurer avec exactitude la condition dans laquelle se trouve la femme algérienne. Une position très souvent aux antipodes de ce que prescrivent les différentes textes juridiques du pays, à commencer par la loi fondamentale qui consacre l'égalité en droits entre les femmes et les hommes, et les conventions internationales signés par l'Algérie. Et c'est pourquoi il a si souvent répété ou plutôt rappelé «qu'aucune discrimination n'apparaît dans la lecture des lois et des textes juridiques». Ce n'est pas la moindre des victoires et c'est déjà là que se joue l'essentiel. Mais comme le président de la République n'ignore pas les pesanteurs sociales et les préjugés encore tenaces et bien enracinés, il a préféré adopter une démarche graduelle dans la réparation de torts qui n'ont plus lieu d'être. Par touches successives il a procédé à la révision du cadre législatif. C'est ainsi qu'ont été révisés, à son initiative, les codes de la nationalité et de la famille. Pourtant il n'a jamais hésité à rendre un hommage appuyé à toutes celles qui se sont constamment élevées contre cette discrimination qui leur est imposée en ne se lassant guère, malgré l'adversité, à toujours décrier ces iniquités. «La détermination et le courage que témoignent les Algériennes pour protéger leurs droits ne sont plus à démontrer et l'évolution des mentalités, due à l'éducation et à l'acquisition de savoir, joue un rôle décisif dans la défense de ces droits» a-t-il déclaré lors de la célébration de la journée du 8 mars de l'année en cours. Une célébration, qui est intervenue moins de six mois après la révision de la Constitution par les deux chambres du parlement, le 12 novembre 2008. Une révision que d'aucuns n'ont pas encore totalement acceptés malgré les apparences. Car, en intégrant dans la Constitution un article qui évoque la promotion des droits politiques de la femme Bouteflika a, incontestablement, pris de cours les tenants d'une certaine conception qui veut que la femme n'est là que pour servir uniquement de décorum. L'article 31 bis, à l'évidence, ouvre grandes pour la femme les perspectives d'une participation active dans la vie politique nationale alors qu'elle était, ll faut le reconnaître, très insignifiante. Ce d'autant que le chef de l'Etat a, le 8 mars dernier justement, instruit le ministre de la Justice à l'effet de traduire sur le terrain le changement constitutionnel. S'exécutant Tayeb Beliez a de suite confié cette mission à une commission. Au bout d'un peu plus de trois mois cette commission est parvenue à mettre en forme un projet de loi organique «révolutionnaire». Désormais et dans l'attente que cette proposition soit entérinée par les instances officielles habilitées, les partis politiques sont tenus de réserver sur leurs listes électorales un quota de 30 % pour les candidatures féminines. Mieux, les listes électorales, qui ne respecteront pas cette disposition, seront tout bonnement rejetées. C'est dire combien les partis politiques, comme l'a soutenu le président Bouteflika «ont une grande part de responsabilité pour encourager les candidatures féminines à des postes d'éligibilité». A coup sûr la présence des femmes dans les assemblées élues, qui interviendra lors des élections législatives et locales de 2012, ne manquera pas de donner de nouvelles couleurs à la pratique politique qui a tendance, durant ces dernières années, à prendre des inclinaisons qui n'agréent point le commun des électeurs. Extrait du discours du président du 8 mars 2009 «S'il est indéniable que les femmes ont investi la vie active, il est tout aussi indéniable que leur accès aux postes de responsabilités est encore limité. Le faible nombre des femmes dans les emplois supérieurs montre qu'elles ont moins accès à la prise de décision que les hommes. C'est pourquoi, j'ai décidé de poursuivre ma politique déjà entamée, et qui a donné d'excellents résultats, de nominations des femmes à de postes jusque-là réservés aux hommes, notamment ceux de Wali, Ambassadeur, recteur d'université, président de Cour et membres du gouvernement». Les ministères «hésitent» à s'ouvrir aux femmes "Les madames ministres" sont rares Les pompeux discours sur l'égalité entre l'homme et la femme et la participation de cette dernière à la glorieuse lutte de Libération nationale auxquels se sont habitués les Algériens depuis pratiquement les premiers jours de l'indépendance du pays, ne résistent pas à l'épreuve du terrain. C'est que, contrairement donc à cette profession de foi commune à tous les responsables, la femme algérienne a toujours été contenue dans la marge et son rôle dans la vie politique est demeurée insignifiant. Pour preuve, rares sont les femmes qui ont eu à accéder à la fonction ministérielle. En effet, depuis que l'Algerie est indépendante, ces femmes peuvent se compter sur les doigts de deux mains seulement. Dans tous les gouvernements qui ont eu à gérer les affaires des Algériens durant les années 60 et 70 aucune femme n'en faisait partie alors que le discours officiel était, en ces temps là, pourtant, chargé d'idées progressistes. Il a fallu attendre les années 80, soit après plus d'une vingtaine d'années après le recouvrement de l'Indépendance, pour voir enfin une femme faire son entrée dans le gouvernement. C'est à l'époque où Chadli Bendjedid présidait aux destinées du pays que la rupture avec cette grave discrimination a été finalement opérée. Et c'est ainsi que les Algériens firent connaissance ,dans la deuxième moitié de cette décade, avec Z'hor Ounissi. Cette dernière, une lettrée originaire de Constantine et issue de la famille de l'éducation, a été nommée au ministère de l'Education nationale. Ceux qui ont eu à travailler à ses côtés ne tarissaient pas d'éloges à son égard, tant elle a été à la mesure de cette lourde responsabilité dans un secteur par trop sensible qui connaissait à l'époque déjà quelques convulsions. La grève déclenchée par les lycéens, ceux qui étaient dans les classes de terminale notamment, a été certainement la plus dure épreuve auquelle elle a été confrontée. Z'hor Ounissi a ainsi montrée la voie et les «décideurs» n'ont jamais plus omis d'intégrer des figures féminines dans les differents gouvernements et ce jusqu'à nos jours. Au début, des années 90 Sid- Ahmed Ghozali, nommé chef du gouvernement en remplacement de Mouloud Hamrouche, désigne deux femmes dans son équipe gouvernementale. Il s'agit de Nafissa Lalliam et Leila Aslaoui, nommées respectivement ministre de la Santé et de la Jeunesse et des Sports. La ministre de la Santé, qui avait le grade de professeur en médecine, n'a occupé cette fonction que quelques mois seulement alors que Mme Aslaoui, une juriste de formation, a été rappelé lorsque Liamine Zeroual a nommé Mokdad Sifi comme chef de gouvernement en avril 1994. Mme Aslaoui a été désigné au poste de secrétaire d'Etat auprès du chef du gouvernement chargé de la Solidarité nationale et de la Famille. Elle était la seule femme au milieu de 27 ministres hommes. Il faut dire que les vieilles habitudes ont repris le dessus puisqu'aucune femme n'a figuré dans la composante des deux gouvernements précédents, dirigés respectivement par Belaid Abdessalam et Redha Malek. Et c'est sans doute à partir de cette période que les mœurs politiques ont sensiblement changées car les femmes ont fait partie presque de tous les gouvernements et ce jusqu'à nos jours. On se rappelle de Rabea Mechernéne et de Saida Benhabyllés qui étaient dans le gouvernement d'Ahmed Ouyahia. Au début des années 2000 les Algériens découvraient aussi de nouvelles têtes féminines. L'on peut citer Boutheina Cheriet, qui était ministre délégué chargée de la Famille et de la Condition féminine, Fatma-Zohra Bouchemla, qui a assumé les charges de ministre délégué chargée de la Communauté nationale à l'étranger, de Leila Hamou Boutlilis, qui a occupé la fonction de ministre délégué chargée de la Recherche scientifique. Toutes les trois faisaient partie du cabinet dirigé par Ali Benflis. Khalida Toumi, Nouara Djaafar et Souad Bendjaballah siégent depuis de nombreuses années dans le gouvernement. Remarquons que depuis Z'hor Ounissi, et à l'exception de Khalida Toumi qui assurait aussi la charge de porte-parole de gouvernement, toutes les autres femmes, au delà de leur nombre très réduit dans chaque cabinet , ont été cantonnées dans des postes de second rôle et n'ont jamais eu accès à des ministères sensibles. Avec les promesses avancées par Abdelaziz Bouteflika il est certain que cette époque-là semble avoir vécue car une page de l'histoire politique du pays est en train d'être irrémédiablement tournée. Partis politiques L'épreuve des quotas Rien ne sera plus comme avant pour les partis politiques. Habitués, à quelques très rares exceptions, à n'accorder que peu d'importance à la femme, ils vont devoir à l'avenir, changer radicalement cette position. À vrai dire, ils n'ont plus le choix. Ils seront appelés, lors des élections législatives et locales de 2012, à se conformer aux nouvelles dispositions qui entreront certainement en vigueur bien avant. Le projet de loi organique portant promotion de la participation de la femme dans les assemblées élues, dont une commission vient de dessiner les grandes lignes, obligerait, en effet, les formations politiquess à reserver un quota de 30% pour les femmes dans leurs listes électorales. Autant dire, notamment si ce seuil est retenu par le gouvernement et entériné par la suite par le Parlement, que cela constituera une véritable révolution. On comprend dès lors pourquoi certains partis font déjà la moue. «Pour le moment nous n'allons pas spéculer sur les détails» nous indique de go Said Bouhadja, membre du secrétariat exécutif du FLN. Une phrase qui indique clairement qu'au vieux parti l'on est certainement pas prêt à s'accommode avec cette «histoire» de 30% même si Said Bouhadja n'a pas manqué de préciser que son parti «est très favorable à la promotion de la participation de la femme dans la vie politique nationale».D'ailleurs, et c'est le secret de Polichinelle, Abdelaziz Belkhadem n'a jamais fait mystère de son opposition à la politique des quotas. Au FLN, aussi, l'on fera des pieds et des mains pour revoir sensiblement à la baisse ce pourcentage «intolérable» pour la vieille garde qui détient toujours les rênes du parti. Ce d'autant que le document remis par la commission au ministre de la Justice parle d'alternance entre les hommes et les femmes dans les listes électorales et ce jusqu'à atteindre ce quota de 30%. Les deux autres partis de l'Alliance présidentielle, dans le fond, partage la même crainte que leur partenaire. Certes, les responsables du MSP et du RND ne se sont pas montrés récents vis à vis de cette mesure, loin s'en faut. Au contraire, et sans aller jusqu'à l'encenser ni faire preuve d'enthousiaste, ils ont fait montre de préjugés plutôt favorables. «Les droits politiques constituent une patie des droits de la femme algérienne», a tout récemment déclaré le leader du MSP qui ne laisse ainsi transparaître aucune objection. En vérité, cette disposition va bouleverser totalement les mœurs des partis politiques, eux qui font déjà peu de cas du rôle de la femme comme l'atteste si bien le nombre de femmes occupants des postes de responsabilités dans les états-majors politiques ou élues dans les différentes assemblées. Ainsi, au FLN, qui dispose d'un grand réservoir de militantes, aucune femme n'est membre du secrétariat exécutif et très peu font partie de l'instance exécutive. A l'APN, et sur 136 députés élus sur les listes du vieux parti lors des législatives de mai 2007 un peu plus d'une dizaine sont des femmes. Au RND, deuxième parti par le nombre d'élus à la Chambre basse, c'est encore pire car aucune femme de ce parti n'a été élue à l'APN. Et ce n'est que récemment, il y a presque une année, que Ahmed Ouyahia a réservé trois places à des femmes dans le bureau national du parti. C'est presque le même topo au MSP, un parti qui n'a aucune femme députée mais qui, en revanche, a lui aussi réservé deux sièges pour les femmes dans son bureau national. Les partis politiques dits démocratiques, à l'exemple du RCD et du FFS, ne font pas mieux et sont dans le même schéma que les partis cités. Que dire aussi du FNA, du groupe des indépendants et d'autres petites formations politiques, à l'exemple des deux mouvements islamistes Enahda et El Islah, qui se placent dans le même registre. La situation et la même, sinon pire dans les assemblées locales. Cela prouve, si besoin est, qu'en étant obligés de réserver à l'avenir un quota pour les femmes les partis vont au devant de grands rééquilibrages qui risquent fort bien de reconfigurer en profondeur leurs assises. Habiba Bahloul, vice-présidentE de l'APN «Je préfère être élue» Lorsque' elle a été élue par ses pairs du FLN au poste de vice- présidente de l'APN, au tout début du mois de juillet dernier lors de l'opération de renouvellement des instances de l'Assemblée, d'aucuns ont considéré cela comme un miracle. C'est que dans les annales du vieux parti, que l'ont qualifie volontiers de conservateur, jamais une femme ne s'est hasardée à pousser l'outrecuidance jusqu'à se présenter à une élection de cette importance et, davantage, lorsqu'il est question de disputer une fonction politique aussi sensible à des «dinosaures» confirmés. Au sortir de cette «épreuve» Habiba Bahloul, élue sur la liste du parti dans la circonscription de Constantine et qui ayant aisément distancé ses rivaux, arborait un large sourire en recevant les congratulations de ceux qui ont certainement aidé à la porter aux nues, nous a alors indiqué avoir fait «une bonne et intense campagne». Un mois jour pour jour après cet heureux événement, alors que nous l'interrogeons sur la question des quotas qui entre dans le cadre de la promotion des droits politiques de la femme, elle a déclaré qu' «elle préfère être élue car cela donne, contrairement au mode de désignation, plus de confiance en soi à la femme». Est-ce à dire qu'elle est contre la politique des quotas pour laquelle le gouvernement semble fortement pencher pour mettre en œuvre l'article 31 bis de la Constitution amendé le 12 novembre dernier conformément à la volonté du président de la République ? «Absolument pas» tient -elle à affirmer non sans s'élancer dans une longue explication. «Il y a effectivement ceux qui pensent que seule la formule du quota, qui a des aspects positifs, est à même de favoriser la participation de la femme dans la vie politique nationale et ceux qui soutiennent le contraire. Car pour eux la désignation est similaire à une forme d'humiliation de la femme». Autant dire qu'il s'agit là d'un débat d'école. Mais, pour elle, une chose est sûre : «la femme doit participer à la vie politique car sa présence est éminemment importante, ce d'autant que dans les autres secteurs elle a prouvé ses capacités, ses qualités et ses compétences». Le paradoxe Louisa Hanoune Contrairement aux autres formations le Parti des travailleurs (PT) a été le seul à avoir déclaré son opposition à la disposition des quotas. Comble du paradoxe le PT est dirigé par une femme. Louisa Hanoune, qui a de tout temps refusé cette perspective, n'a cessé depuis que le principe de 30% a été retenu, de critiquer ouvertement cette disposition, en n'hésitant pas à tirer à boulets rouges sur la commission installée par le garde des Sceaux. «La préoccupation était certes de bonne foi, mais arriver à ce résultat relève de la discrimination. Cela veut dire qu'il n'y a pas de volonté de lever les obstacles auxquels sont confrontées les femmes» a-t-elle indiqué avant d'ajouter, courroucée, que «la commission veut marcher sur les cadavres des femmes». Curieuse position clament certains. Mais pourquoi donc une femme s'oppose-t-elle à une disposition qui favorisera l'émergence de la femme sur la scène politique nationale ? «Ce seront surtout des courtisanes», a-t-elle martelé car, selon la secrétaire générale du PT, qui considère que c'est les compétences qui vont perdre au change puisqu'elles seront marginalisées, «cette déposition favorisera uniquement le système clientéliste». Pour elle il est impératif de créer un «climat favorable si l'on veut promouvoir la place de la femme sur la scène politique, on doit lui fournir un climat politique favorable». Eligibilité des algériennes Bouteflika, l'homme des ruptures Depuis qu'il est à la tête de l'Etat le président de la République a institué une tradition qui veut qu'en chaque journée du 8 mars, consacrée partout dans le monde comme Journée mondiale de la femme, il organise une cérémonie en l'honneur de la femme algérienne. Une cérémonie loin d'être protocolaire puisqu'elle lui permet d'évaluer les avancées accomplies mais surtout de mettre en exergue les retards qui restent à combler en vue d'améliorer la position de la femme algérienne et son égalité ave les hommes, tout au long de ces dix années d'exercice du pouvoir Abdelaziz Bouteflika a eu à mesurer avec exactitude la condition dans laquelle se trouve la femme algérienne. Une position très souvent aux antipodes de ce que prescrivent les différentes textes juridiques du pays, à commencer par la loi fondamentale qui consacre l'égalité en droits entre les femmes et les hommes, et les conventions internationales signés par l'Algérie. Et c'est pourquoi il a si souvent répété ou plutôt rappelé «qu'aucune discrimination n'apparaît dans la lecture des lois et des textes juridiques». Ce n'est pas la moindre des victoires et c'est déjà là que se joue l'essentiel. Mais comme le président de la République n'ignore pas les pesanteurs sociales et les préjugés encore tenaces et bien enracinés, il a préféré adopter une démarche graduelle dans la réparation de torts qui n'ont plus lieu d'être. Par touches successives il a procédé à la révision du cadre législatif. C'est ainsi qu'ont été révisés, à son initiative, les codes de la nationalité et de la famille. Pourtant il n'a jamais hésité à rendre un hommage appuyé à toutes celles qui se sont constamment élevées contre cette discrimination qui leur est imposée en ne se lassant guère, malgré l'adversité, à toujours décrier ces iniquités. «La détermination et le courage que témoignent les Algériennes pour protéger leurs droits ne sont plus à démontrer et l'évolution des mentalités, due à l'éducation et à l'acquisition de savoir, joue un rôle décisif dans la défense de ces droits» a-t-il déclaré lors de la célébration de la journée du 8 mars de l'année en cours. Une célébration, qui est intervenue moins de six mois après la révision de la Constitution par les deux chambres du parlement, le 12 novembre 2008. Une révision que d'aucuns n'ont pas encore totalement acceptés malgré les apparences. Car, en intégrant dans la Constitution un article qui évoque la promotion des droits politiques de la femme Bouteflika a, incontestablement, pris de cours les tenants d'une certaine conception qui veut que la femme n'est là que pour servir uniquement de décorum. L'article 31 bis, à l'évidence, ouvre grandes pour la femme les perspectives d'une participation active dans la vie politique nationale alors qu'elle était, ll faut le reconnaître, très insignifiante. Ce d'autant que le chef de l'Etat a, le 8 mars dernier justement, instruit le ministre de la Justice à l'effet de traduire sur le terrain le changement constitutionnel. S'exécutant Tayeb Beliez a de suite confié cette mission à une commission. Au bout d'un peu plus de trois mois cette commission est parvenue à mettre en forme un projet de loi organique «révolutionnaire». Désormais et dans l'attente que cette proposition soit entérinée par les instances officielles habilitées, les partis politiques sont tenus de réserver sur leurs listes électorales un quota de 30 % pour les candidatures féminines. Mieux, les listes électorales, qui ne respecteront pas cette disposition, seront tout bonnement rejetées. C'est dire combien les partis politiques, comme l'a soutenu le président Bouteflika «ont une grande part de responsabilité pour encourager les candidatures féminines à des postes d'éligibilité». A coup sûr la présence des femmes dans les assemblées élues, qui interviendra lors des élections législatives et locales de 2012, ne manquera pas de donner de nouvelles couleurs à la pratique politique qui a tendance, durant ces dernières années, à prendre des inclinaisons qui n'agréent point le commun des électeurs. Extrait du discours du président du 8 mars 2009 «S'il est indéniable que les femmes ont investi la vie active, il est tout aussi indéniable que leur accès aux postes de responsabilités est encore limité. Le faible nombre des femmes dans les emplois supérieurs montre qu'elles ont moins accès à la prise de décision que les hommes. C'est pourquoi, j'ai décidé de poursuivre ma politique déjà entamée, et qui a donné d'excellents résultats, de nominations des femmes à de postes jusque-là réservés aux hommes, notamment ceux de Wali, Ambassadeur, recteur d'université, président de Cour et membres du gouvernement». Les ministères «hésitent» à s'ouvrir aux femmes "Les madames ministres" sont rares Les pompeux discours sur l'égalité entre l'homme et la femme et la participation de cette dernière à la glorieuse lutte de Libération nationale auxquels se sont habitués les Algériens depuis pratiquement les premiers jours de l'indépendance du pays, ne résistent pas à l'épreuve du terrain. C'est que, contrairement donc à cette profession de foi commune à tous les responsables, la femme algérienne a toujours été contenue dans la marge et son rôle dans la vie politique est demeurée insignifiant. Pour preuve, rares sont les femmes qui ont eu à accéder à la fonction ministérielle. En effet, depuis que l'Algerie est indépendante, ces femmes peuvent se compter sur les doigts de deux mains seulement. Dans tous les gouvernements qui ont eu à gérer les affaires des Algériens durant les années 60 et 70 aucune femme n'en faisait partie alors que le discours officiel était, en ces temps là, pourtant, chargé d'idées progressistes. Il a fallu attendre les années 80, soit après plus d'une vingtaine d'années après le recouvrement de l'Indépendance, pour voir enfin une femme faire son entrée dans le gouvernement. C'est à l'époque où Chadli Bendjedid présidait aux destinées du pays que la rupture avec cette grave discrimination a été finalement opérée. Et c'est ainsi que les Algériens firent connaissance ,dans la deuxième moitié de cette décade, avec Z'hor Ounissi. Cette dernière, une lettrée originaire de Constantine et issue de la famille de l'éducation, a été nommée au ministère de l'Education nationale. Ceux qui ont eu à travailler à ses côtés ne tarissaient pas d'éloges à son égard, tant elle a été à la mesure de cette lourde responsabilité dans un secteur par trop sensible qui connaissait à l'époque déjà quelques convulsions. La grève déclenchée par les lycéens, ceux qui étaient dans les classes de terminale notamment, a été certainement la plus dure épreuve auquelle elle a été confrontée. Z'hor Ounissi a ainsi montrée la voie et les «décideurs» n'ont jamais plus omis d'intégrer des figures féminines dans les differents gouvernements et ce jusqu'à nos jours. Au début, des années 90 Sid- Ahmed Ghozali, nommé chef du gouvernement en remplacement de Mouloud Hamrouche, désigne deux femmes dans son équipe gouvernementale. Il s'agit de Nafissa Lalliam et Leila Aslaoui, nommées respectivement ministre de la Santé et de la Jeunesse et des Sports. La ministre de la Santé, qui avait le grade de professeur en médecine, n'a occupé cette fonction que quelques mois seulement alors que Mme Aslaoui, une juriste de formation, a été rappelé lorsque Liamine Zeroual a nommé Mokdad Sifi comme chef de gouvernement en avril 1994. Mme Aslaoui a été désigné au poste de secrétaire d'Etat auprès du chef du gouvernement chargé de la Solidarité nationale et de la Famille. Elle était la seule femme au milieu de 27 ministres hommes. Il faut dire que les vieilles habitudes ont repris le dessus puisqu'aucune femme n'a figuré dans la composante des deux gouvernements précédents, dirigés respectivement par Belaid Abdessalam et Redha Malek. Et c'est sans doute à partir de cette période que les mœurs politiques ont sensiblement changées car les femmes ont fait partie presque de tous les gouvernements et ce jusqu'à nos jours. On se rappelle de Rabea Mechernéne et de Saida Benhabyllés qui étaient dans le gouvernement d'Ahmed Ouyahia. Au début des années 2000 les Algériens découvraient aussi de nouvelles têtes féminines. L'on peut citer Boutheina Cheriet, qui était ministre délégué chargée de la Famille et de la Condition féminine, Fatma-Zohra Bouchemla, qui a assumé les charges de ministre délégué chargée de la Communauté nationale à l'étranger, de Leila Hamou Boutlilis, qui a occupé la fonction de ministre délégué chargée de la Recherche scientifique. Toutes les trois faisaient partie du cabinet dirigé par Ali Benflis. Khalida Toumi, Nouara Djaafar et Souad Bendjaballah siégent depuis de nombreuses années dans le gouvernement. Remarquons que depuis Z'hor Ounissi, et à l'exception de Khalida Toumi qui assurait aussi la charge de porte-parole de gouvernement, toutes les autres femmes, au delà de leur nombre très réduit dans chaque cabinet , ont été cantonnées dans des postes de second rôle et n'ont jamais eu accès à des ministères sensibles. Avec les promesses avancées par Abdelaziz Bouteflika il est certain que cette époque-là semble avoir vécue car une page de l'histoire politique du pays est en train d'être irrémédiablement tournée. Partis politiques L'épreuve des quotas Rien ne sera plus comme avant pour les partis politiques. Habitués, à quelques très rares exceptions, à n'accorder que peu d'importance à la femme, ils vont devoir à l'avenir, changer radicalement cette position. À vrai dire, ils n'ont plus le choix. Ils seront appelés, lors des élections législatives et locales de 2012, à se conformer aux nouvelles dispositions qui entreront certainement en vigueur bien avant. Le projet de loi organique portant promotion de la participation de la femme dans les assemblées élues, dont une commission vient de dessiner les grandes lignes, obligerait, en effet, les formations politiquess à reserver un quota de 30% pour les femmes dans leurs listes électorales. Autant dire, notamment si ce seuil est retenu par le gouvernement et entériné par la suite par le Parlement, que cela constituera une véritable révolution. On comprend dès lors pourquoi certains partis font déjà la moue. «Pour le moment nous n'allons pas spéculer sur les détails» nous indique de go Said Bouhadja, membre du secrétariat exécutif du FLN. Une phrase qui indique clairement qu'au vieux parti l'on est certainement pas prêt à s'accommode avec cette «histoire» de 30% même si Said Bouhadja n'a pas manqué de préciser que son parti «est très favorable à la promotion de la participation de la femme dans la vie politique nationale».D'ailleurs, et c'est le secret de Polichinelle, Abdelaziz Belkhadem n'a jamais fait mystère de son opposition à la politique des quotas. Au FLN, aussi, l'on fera des pieds et des mains pour revoir sensiblement à la baisse ce pourcentage «intolérable» pour la vieille garde qui détient toujours les rênes du parti. Ce d'autant que le document remis par la commission au ministre de la Justice parle d'alternance entre les hommes et les femmes dans les listes électorales et ce jusqu'à atteindre ce quota de 30%. Les deux autres partis de l'Alliance présidentielle, dans le fond, partage la même crainte que leur partenaire. Certes, les responsables du MSP et du RND ne se sont pas montrés récents vis à vis de cette mesure, loin s'en faut. Au contraire, et sans aller jusqu'à l'encenser ni faire preuve d'enthousiaste, ils ont fait montre de préjugés plutôt favorables. «Les droits politiques constituent une patie des droits de la femme algérienne», a tout récemment déclaré le leader du MSP qui ne laisse ainsi transparaître aucune objection. En vérité, cette disposition va bouleverser totalement les mœurs des partis politiques, eux qui font déjà peu de cas du rôle de la femme comme l'atteste si bien le nombre de femmes occupants des postes de responsabilités dans les états-majors politiques ou élues dans les différentes assemblées. Ainsi, au FLN, qui dispose d'un grand réservoir de militantes, aucune femme n'est membre du secrétariat exécutif et très peu font partie de l'instance exécutive. A l'APN, et sur 136 députés élus sur les listes du vieux parti lors des législatives de mai 2007 un peu plus d'une dizaine sont des femmes. Au RND, deuxième parti par le nombre d'élus à la Chambre basse, c'est encore pire car aucune femme de ce parti n'a été élue à l'APN. Et ce n'est que récemment, il y a presque une année, que Ahmed Ouyahia a réservé trois places à des femmes dans le bureau national du parti. C'est presque le même topo au MSP, un parti qui n'a aucune femme députée mais qui, en revanche, a lui aussi réservé deux sièges pour les femmes dans son bureau national. Les partis politiques dits démocratiques, à l'exemple du RCD et du FFS, ne font pas mieux et sont dans le même schéma que les partis cités. Que dire aussi du FNA, du groupe des indépendants et d'autres petites formations politiques, à l'exemple des deux mouvements islamistes Enahda et El Islah, qui se placent dans le même registre. La situation et la même, sinon pire dans les assemblées locales. Cela prouve, si besoin est, qu'en étant obligés de réserver à l'avenir un quota pour les femmes les partis vont au devant de grands rééquilibrages qui risquent fort bien de reconfigurer en profondeur leurs assises. Habiba Bahloul, vice-présidentE de l'APN «Je préfère être élue» Lorsque' elle a été élue par ses pairs du FLN au poste de vice- présidente de l'APN, au tout début du mois de juillet dernier lors de l'opération de renouvellement des instances de l'Assemblée, d'aucuns ont considéré cela comme un miracle. C'est que dans les annales du vieux parti, que l'ont qualifie volontiers de conservateur, jamais une femme ne s'est hasardée à pousser l'outrecuidance jusqu'à se présenter à une élection de cette importance et, davantage, lorsqu'il est question de disputer une fonction politique aussi sensible à des «dinosaures» confirmés. Au sortir de cette «épreuve» Habiba Bahloul, élue sur la liste du parti dans la circonscription de Constantine et qui ayant aisément distancé ses rivaux, arborait un large sourire en recevant les congratulations de ceux qui ont certainement aidé à la porter aux nues, nous a alors indiqué avoir fait «une bonne et intense campagne». Un mois jour pour jour après cet heureux événement, alors que nous l'interrogeons sur la question des quotas qui entre dans le cadre de la promotion des droits politiques de la femme, elle a déclaré qu' «elle préfère être élue car cela donne, contrairement au mode de désignation, plus de confiance en soi à la femme». Est-ce à dire qu'elle est contre la politique des quotas pour laquelle le gouvernement semble fortement pencher pour mettre en œuvre l'article 31 bis de la Constitution amendé le 12 novembre dernier conformément à la volonté du président de la République ? «Absolument pas» tient -elle à affirmer non sans s'élancer dans une longue explication. «Il y a effectivement ceux qui pensent que seule la formule du quota, qui a des aspects positifs, est à même de favoriser la participation de la femme dans la vie politique nationale et ceux qui soutiennent le contraire. Car pour eux la désignation est similaire à une forme d'humiliation de la femme». Autant dire qu'il s'agit là d'un débat d'école. Mais, pour elle, une chose est sûre : «la femme doit participer à la vie politique car sa présence est éminemment importante, ce d'autant que dans les autres secteurs elle a prouvé ses capacités, ses qualités et ses compétences». Le paradoxe Louisa Hanoune Contrairement aux autres formations le Parti des travailleurs (PT) a été le seul à avoir déclaré son opposition à la disposition des quotas. Comble du paradoxe le PT est dirigé par une femme. Louisa Hanoune, qui a de tout temps refusé cette perspective, n'a cessé depuis que le principe de 30% a été retenu, de critiquer ouvertement cette disposition, en n'hésitant pas à tirer à boulets rouges sur la commission installée par le garde des Sceaux. «La préoccupation était certes de bonne foi, mais arriver à ce résultat relève de la discrimination. Cela veut dire qu'il n'y a pas de volonté de lever les obstacles auxquels sont confrontées les femmes» a-t-elle indiqué avant d'ajouter, courroucée, que «la commission veut marcher sur les cadavres des femmes». Curieuse position clament certains. Mais pourquoi donc une femme s'oppose-t-elle à une disposition qui favorisera l'émergence de la femme sur la scène politique nationale ? «Ce seront surtout des courtisanes», a-t-elle martelé car, selon la secrétaire générale du PT, qui considère que c'est les compétences qui vont perdre au change puisqu'elles seront marginalisées, «cette déposition favorisera uniquement le système clientéliste». Pour elle il est impératif de créer un «climat favorable si l'on veut promouvoir la place de la femme sur la scène politique, on doit lui fournir un climat politique favorable».