par K. Selim, Le Quotidien d'Oran, 27 janvier 2010 Les équipes de football d'Algérie et d'Egypte vont se mesurer à nouveau sur un terrain de football. La tendance des médias des deux pays est plutôt à la modération, même si l'on ressent, entre les lignes et sous le propos policé, que l'on se contient plutôt que d'être réellement convaincus par les arguments de sagesse. Les logorrhées chauvines et les déclarations imbéciles ne se sont pas encore effacées des mémoires. Surtout celles des animateurs de cette fausse controverse qui ont eu recours sans vergogne à ce registre empoisonné. Il n'en a pas manqué en Algérie même si, en raison sans doute de la disproportion des moyens, les Egyptiens décrochent incontestablement la palme de l'outrance. Il ne faut pas s'attendre à ce que les leçons soient tirées de cet épisode peu glorieux. En Egypte comme en Algérie, une forme de journalisme trash, qui ne gêne guère les ordres établis, se pique d'être «l'expression de l'opinion populaire». Confondant ainsi la pire vulgarité avec la sympathique simplicité populaire. Cela donne un journalisme répugnant à tout point de vue, dégoulinant de bêtise et de démagogie. Quelques voix, ici et là-bas, se sont exprimées durant la pseudo-guerre algéro-égyptienne pour déplorer que les digues de la décence élémentaire ont été défoncées. Mais on n'a guère entendu les fauteurs de haine se livrer à la moindre autocritique. Ils se sont seulement réfugiés dans le silence… car les pouvoirs ont estimé qu'il ne fallait pas aller plus loin. Si, en cette veille de rencontre à Benguela, ces drôles de médias paraissent prudents, ce n'est pas par conviction ou par évaluation critique des errements qui ont précédé et suivi les matches de qualification pour la Coupe du monde. Ils se retiennent encore car les pouvoirs ne souhaitent pas que ce match devienne une nouvelle «bataille du destin». Il faut espérer que ces pouvoirs campent sur cette ligne. Les médias sont très «sensibles» aux souhaits des gouvernants en place et réfréneront leurs pulsions ordurières. Il est fort regrettable que les arguments de sujétion aux pouvoirs l'emportent sur les considérations élémentaires d'éthique, mais il faut bien s'en contenter. C'est que le niveau des échanges d'amabilités algéro-égyptiens est tombé si bas qu'il s'est trouvé en Algérie des partisans, convaincus de la nécessité de la libéralisation de l'audiovisuel, pour se dire soulagés que des télévisions privées n'existent pas encore chez nous. La performance de télévisions égyptiennes «privées» a atteint un tel niveau d'indécence qu'il sert presque de repoussoir. Il ne faut pourtant pas y succomber… La multiplicité des chaînes de télévision qui répètent les mêmes insultes et entonnent les mêmes louanges est un argument de plus pour défendre un réel pluralisme médiatique. Mais restons dans le sport et redisons-le : le destin des nations, leur dignité et leur grandeur ne se jouent pas, ne se joueront jamais sur un terrain de football. Un match de football, cela reste une affaire de joueurs, d'entraîneurs, d'arbitres (pour les fautes parfois), d'humeur, de combativité physique, de cran, de talent et aussi d'un peu de chance. Une équipe, pour des raisons parfois difficiles à cerner, peut être inspirée comme être hors du coup – souvenons-nous de la défaite face au Malawi. N'y ajoutons pas des éléments étrangers à la joute sportive… Keep cool !