Le Soir d'Algérie, 4 mars 2010 Le juge d'instruction de la troisième chambre du tribunal correctionnel d'Annaba a ordonné, mardi dernier en fin de journée, la mise sous mandat de dépôt de l'ex-président et premier responsable élu de la Chambre d'agriculture, ainsi que de l'ex-directeur de la Coopérative agricole régionale spécialisée en cultures industrielles (Carsci), dont le siège est implanté à la Tabacoop d'Annaba. Les griefs qui leur sont reprochés portent sur des dilapidations de biens publics, des détournements de deniers et des abus de biens sociaux. Cette affaire a fait l'objet de deux plaintes, déposées respectivement par le wali d'Annaba et la Direction des services agricoles. Cette dernière plainte, appuyée par la Direction des domaines, propriétaire du patrimoine depuis 2002 (transfert de biens), s'ajoute à celle déposée par la même institution en 2008. Ces plaintes sont intervenues en 2009, au lendemain de l'élection d'un nouveau conseil de gérance qui se retrouvait face à un patrimoine très important, composé d'un parc foncier de plusieurs milliers d'hectares de terres agricoles, d'immobilier constitué de fermes agricoles, de villas, d'habitations, d'unités d'élevage (avicole et apicole) et de transformation agroalimentaire (tomate, coton, tabac, huile…). Elle disposait également d'équipements d'entretien et de maintenance, de transport en commun, d'engins agricoles et d'assainissement, de locaux commerciaux et administratifs, de hangars, d'une piscine et d'un complexe de sports et loisirs. Ce patrimoine est un héritage de l'époque coloniale. Tout a été vendu ou cédé sous forme de dons à des «relations». C'est ce qui ressort des conclusions de l'enquête diligentée par le groupement de la Gendarmerie nationale et la Sûreté de wilaya d'Annaba. L'absence de tout contrôle sur la gestion de cette coopérative a facilité sa dilapidation. L'affaire a fait grand bruit parmi les quatre mille adhérents des wilayas d'Annaba et d'El- Tarf. Ces derniers s'inquiètent quant à l'avenir de leur coopérative, entièrement dépouillée de ses biens, évalués à plus de trente milliards de dinars. Dans le lot, signalons la conserverie de Bouteldja, dans la wilaya d'El-Tarf, dotée de nouveaux équipements pour être louée à un opérateur turc pour la somme de huit millions de dinars/an. Cette conserverie, qui était sous la menace d'un dépôt de bilan, s'est retrouvée, comme par enchantement, très rentable sous la direction de son acquéreur turc, également bénéficiaire de la location de terres agricoles, propriété de la même coopérative, pour la culture de la tomate industrielle. L'instruction de cette affaire par un magistrat de la cour d'Annaba permettra de situer les responsabilités des uns et des autres dans ce qui ressemble à une mise à sac planifiée d'un patrimoine étatique inestimable. A. Bouacha