In LE MAGHREBIN Lundi, février 7th, 2011 Ce que le monde arabe montre avec éclat ces jours bénis et que tout un chacun reconnait en mouvement en Algérie, c'est l'immense déferlement d'exigence de liberté et de dignité pour des peuples profondément méprisés par leurs dirigeants. La poussée de liberté est massive, non réductible par les compromis. Elle traverse cette fois tous les mouvements de pensée, en particulier ceux étouffés de nombreux courants politiques islamistes qui osent diversité, liberté et justice au fronton de leurs mots d'ordre. Le déferlement, nouveau, se formalise dans le slogan convaincu et non discutable du départ sans concession des systèmes politiques et de leurs fidèles objectifs et intéressés. Ce qui est nouveau par rapport à 1990 et que les observateurs voient mal, c'est cette mondialisation des comportements politiques fondamentaux de base consolidée ici par la forte poussée humaine de l'individualisme dans les cultures. 1 Le pouvoir apparent, surpris par cette audace mal envisagée, annonce une évolution suppliante du régime, à Tunis, au Caire puis maintenant par la voie du gouvernement d' Alger qui ne surprend personne. Ce n'est pas de gaité de cœur; Washington complique les choix de gouvernements peu autonomes: elle ne tolère plus ni le statu quo ni la répression ouverte ni le refus de démocratie. Tout doit être fait pour calmer les gens, maintenir le contrôle géostratégique des intérêts américains et d'Israël; la transition “soft” devient indiscutable, car autrement cela peut transformer en révolution qu'on sait maintenant à Washington ne pas être capables de contrôler. Les chancelleries d' «intelligence occidentale» s'y emploient vaille que vaille en comprenant bien l'incrédibilité due à leurs positions antérieures et en recherchant avec acharnement les personnalités garantissant le statu quo de domination. 2 Dans le peuple en face, les choses ne sont pas faciles à traiter : les gens campent résolument dans la position spectaculaire et innovante du départ des anciens sans conditions, pour accepter la possibilité d'une transition « douce ». Cette position surprend comme au Caire ou à Tunis, sauf que, quoi qu'on en pense, politiquement, le débat est clos. Pour les gens, le débat est inutile et les gens attentent une « transition après et non avant. La crainte du futur explique en grande partie la langue de bois décalée de Ben Ali, de Moubarak et maintenant de Bouteflika. La langue de bois, c'est le signe certain du trouble des manipulations ; il ne manifeste qu'une chose, clairement : les manouvres de division sont à l'ordre du jour dans les appareils ; il faut faire capituler le mouvement irrésistible de libération en lui vendant des promesses sans garanties. 3 Comment lit-on ce qui se passe ? Alors, et seulement alors, apparaissent immédiatement à Alger les professionnels attitrés des « partis de renouveau ». Ce qui se produit dans le monde arabe questionne le chef en titre du gouvernement qui montre son inquiétude des vagues massives de mouvements populaires de réel changement et s'engage dans l'appel aux compromis pour faire poids et participer aux possibles redistributions de cartes. Les organisations traditionnelles partisanes des activités politiques pluralistes d'appareils, les discours des campagnes électorales faussement démocratiques retrouvent la voie perverse de l'hypocrisie. La Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD) voit précipitamment le jour et le chef du gouvernement en définit les attributions, dans les médias et en Algérie, ailleurs des avenues Bourguiba de Tunis ou de la « Place Tahrir » en Egypte. Il faut se méfier tout de même de ce que l'on voit. Belhadj est immédiatement arrêté. C'est le premier signe concret de la levée de l'Etat d'urgence. 4 Nous avons au titre de rencontres de collectifs dit ce que nous en pensons dans cette conjoncture mondiale° dominée par le discours sécuritaire qui refuse les revendications de liberté des arabes, et d'abord des arabes, des algériens et de tous les algériens ne trainant pas des dossiers de justice 5 Nous avons suffisamment vécu les échecs des tentatives sages de solutions politiques à maintes reprises dont la plus douloureuse est celle de la malheureuse tentative de San Egidio. Nous avons vu qui, en l'occurrence a joué le triste rôle de diabolisation des mouvements politiques réels, qui a créé et nourri l'échec des moindres réformes et qui a hérité des subordinations au pouvoir. Il est du devoir des algériennes et des algériens de dénoncer les manœuvres qui déjà peuplent les CNDC. C'est la condition pour faire cesser les divisions, tourner cette page néfaste et d'éviter les pièges équivoques qu'elle tend. Le temps joue pour les gens de bonne volonté en dépit de l'énorme volonté compréhensible de s'unir. Le rétrospectif est clair, écrit et bien nommé. Les candidats à la pratique de la transition se précipitent en confondant les calendriers. La question qui se pose aujourd'hui avec acuité, c'est de savoir de quel côté se rangera l'armée, qui chaque fois a servi de faire valoir, si la population algérienne décide, à l'instar des Tunisiens et des Egyptiens, d'elle-même et à n'importe quelle occasion, dans et hors d'Alger, de sortir massivement dans la rue. 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