In parti-udma.com Brahim Younessi Saturday, 19 May 2012 Rêvons un instant que notre pays est une démocratie et que les élections sont libres, honnêtes et transparentes, qu'elles ont un sens et qu'elles expriment la volonté du peuple. En bons démocrates que nous sommes nous ne pouvons évidemment que valider les chiffres officiels de ces élections législatives qui se présentent ainsi : nombre total d'électeurs 21.664.345 [20.673.875 en Algérie (95,43%) et 990.470 à l'étranger (4,57%), participation 9.339.026, soit un taux de 43,10%, abstention 12.325.319, soit un taux de 56,90%. Voilà les chiffres qui montrent l'expression de la volonté populaire. Le pouvoir et les partis qui se sont engagés dans ces « élections » doivent tirer les conséquences qui s'imposent. La logique oblige à leur annulation pure et simple pour ouvrir une période de transition au cours de laquelle le champ politique doit être réorganisé de manière à ce que les mouvements écartés, interdits ou non agréés puissent concourir librement à l'expression du suffrage universel. L'abstention, 56,90%, est un indicateur de défiance, et, si l'on ose dire, un « vote » d'opposition et de rébellion. Cette défiance et cette opposition se sont aussi manifestées dans un autre témoignage de protestation : les bulletins nuls qui s'élèvent à 1.704.047 « voix », soit 18,25%. C'est presque autant que le score obtenu par le Front de libération nationale qui pavoise alors que c'est la bérézina pour lui et pour l'Algérie, et le Rassemblement national démocratique qui se satisfait de ses résultats, qui obtiennent 1.848.390 voix, soit 19,79% ; la différence n'est que de 144.343, soit à peine 1,54% des votants. L'abstention est un acte politique, et c'est comme tel qu'il faut le considérer ; elle a un caractère « électoral » parce que ne pas se rendre aux urnes n'exprime pas seulement l'indifférence à des élections réputées jouées d'avance mais exprime une contestation du système, un rejet sans ambiguïté des institutions préfabriquées et du pouvoir qui, une fois encore, a tourné le dos au changement. Sous un autre angle, celui sous lequel il faut, en vérité, prendre les résultats des législatives du 10 mai, tout en continuant de rêver que nous sommes dans un Etat démocratique, la réalité politique se présente de façon autrement plus calamiteuse. Le pouvoir a fait le calcul sur la base des suffrages considérés comme exprimés soit 7.634.979, ce qui donne un taux de 35,20% pour attribuer les 462 sièges de l'Assemblée populaire nationale ; 64,80% des électeurs algériens ne seront pas représentés, à supposer que les 35,20% le seraient. Les partis qui ont accepté leur sort, sachant pertinemment que non seulement ils ne sont pas représentatifs mais souffrent d'illégitimité et ceux qui contestent les résultats, pensant avoir été grugés de quelques sièges voire, peut-être, de la majorité, ne se font, nous l'espérons, ce serait très grave dans le cas contraire, aucune illusion sur leur légitimité à gouverner ou à faire la loi et leur représentativité électorale. Et s'ils nourrissent quelque illusion, ces chiffres, les leurs, devraient les ramener à l'implacable réalité : sur 21.664.345 électeurs, le FLN a officiellement obtenu 1.324.363 voix, soit 6,11%, et avec ce score minable il prend 221 sièges à l'APN, son alter ego, le RND a eu officiellement 524.027 voix, soit 2,41%, il y a de quoi se gausser s'il ne s'agissait de notre pays dirigé par des hommes et des femmes que le peuple algérien dans son écrasante majorité, 64,80%, rejette, les matamores de l'Alliance Algérie verte, l'essuie glace de la politique algérienne, se gonflent d'orgueil pour 2,19%, le Front des forces socialistes, le grand et historique FFS, le plus vieux parti de l'opposition veut réhabiliter la politique, nous voulons, quant à nous, restaurer la morale et l'éthique, avec – quelle tristesse ! – 0,87% [188.275 soit 8965 voix pour un député, elle est belle la démocratie représentative], moins que le parti des travailleurs qui obtient 283585 voix, un député pour 16680, soit 1,31% et moins aussi que le FNA, le Front national algérien 0,90% pour 198.544 [21.000 voix pour un député] et – quelle défaite pour le FFS ! – presque autant que le MPA du « Terminator » Amara Benyounès, agréé la veille des « élections » du 10 mai, qui obtient par la grâce des anges gardiens 0,7% lui donnant 5 sièges. La « démocratie » algérienne est la seule « démocratie » au monde qui marche à reculons. Share Nombre de lectures: