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Sid Ahmed Ghozali : «Ce que j'ai dit à John Kerry»
Publié dans Le Quotidien d'Algérie le 06 - 04 - 2014


Ecrit par El Watan 2014
L'ancien chef de gouvernement et président du Front démocratique était convié par le secrétaire d'Etat américain, John Kerry, à un dîner d'amitié. Ghozali assure que son ami «n'est pas venu pour traiter de la question de l'élection présidentielle».
Vous avez rencontré le secrétaire d'Etat américain, John Kerry, le jour de son arrivée à Alger, à la veille de son audience avec le chef de l'Etat. De quoi avez- vous parlé ?
Ce n'est pas un événement politique ni officiel pour mériter d'être relaté, comme vous le souhaitez. C'était une rencontre purement privée. Amicale et privée. Après avoir assumé durant plus de trente ans des responsabilités dans des domaines aussi variés et/ou sensibles que la diplomatie et l'énergie, on ne peut pas en sortir sans s'être fait des ennemis, mais aussi des amis.
Mettant pour la première fois les pieds en Algérie, John Kerry m'a téléphoné et s'est proposé de venir, en ami, prendre un café chez moi, à la maison. Il s'est ensuite ravisé en raison de la lourdeur du dispositif de sécurité qui aurait été nécessaire, suggérant qu'il serait plus commode d'aller dîner avec lui. C'est ainsi qu'un motard et deux agents de sécurité, tous Algériens, ont été dépêchés pour m'escorter, en compagnie de mon fils, jusqu'à l'hôtel El Aurassi où il m'avait invité. Au vu et au su de plus d'une centaine de personnes, tous statuts confondus : agents de sécurité algériens, hôtes et serveurs, clients du restaurant. Evidemment, il n'a pas cherché à me voir dans le cadre de sa visite officielle. Il va sans dire qu'en tant qu'amis, mais aussi hommes politiques, nous n'avons pas dîné en silence. Ne me demandez pas cependant de vous révéler le contenu d'un entretien privé, ce serait une tromperie à l'égard de mon interlocuteur. Bien évidemment, nous avons évoqué les questions algériennes. Et j'ai donné mon point de vue aussi bien sur les questions nationales et régionales qu'internationales.
Ma position n'est pas un secret d'Etat, je l'ai exposée en de très nombreuses occasions pendant vingt années, publiquement, notamment dans les colonnes d'El Watan et d'autres organes de presse nationaux et internationaux.
Avez-vous évoqué la question de l'élection présidentielle ?
Je vous le dis sans hésiter, John Kerry n'est pas venu pour «traiter» de la question de l'élection présidentielle. Il ne peut pas en être ainsi ; le croire serait mal connaître les Américains. Je ne dis pas qu'ils s'en désintéressent, mais il n'est pas venu pour ça. Les USA, «gouverneurs du monde», viennent en fonction de leurs intérêts et c'est normal. Avec l'Algérie, ce qui les intéresse, c'est la coopération bilatérale et multilatérale dans les domaines sécuritaire et énergétique. A ce propos, vous n'ignorez pas que les relations entre l'Algérie et le monde occidental se font essentiellement par le canal des services de sécurité des deux parties. Et souvent à l'insu des appareils diplomatiques.
J'ai dit que les Occidentaux ont intérêt à aider l'Algérie, à échanger dix fois plus qu'ils ne le font maintenant. Ce n'est pas évident, parce que les Occidentaux ont tendance à faire dans le «court-termisme». L'Algérie échange avec eux 60 milliards de dollars par an, il faut agir ensemble pour s'élever au niveau des potentialités réelles de notre pays. Pourquoi ne pas se fixer cinq, six ou sept fois plus, dans le cadre d'une vision à long terme ? Ce serait tellement bénéfique pour les populations des deux côtés !
Quant aux rapports entre les services et le Président, vous connaissez mon point de vue : je n'ai jamais cru à l'idée d'une confrontation au sein du régime à ce niveau. S'il y avait ce problème, il n'y aurait sans doute pas eu trois mandats successifs ni une quatrième «candidature». Il y a des motivations aux rumeurs, mais je refuse de croire à la réalité de ce type de problème.
Comme je l'ai dit et répété cent fois, l'Algérie a des difficultés à entrer dans un Etat de droit. Le Président le reconnaît implicitement quand il déclare : «J'ai passé mes trois mandats à la réconciliation nationale. Mon prochain, je le consacrerai à l'Etat de droit et le bonne gouvernance…» (sic) Quinze ans pour ça ? Deux exemples : les élections n'ont jamais été des élections ; elles sont frelatées. J'ai dit aussi que je suis à la tête d'un parti, le Front démocratique, autorisé depuis quatorze ans par la loi mais interdit d'activer par l'administration. Je n'ai cessé de le dire et de l'écrire depuis juin 2000, deux mois après la tenue du congrès constitutif. Mais tout cela ne nous a pas pris toute la soirée. Le dîner a duré une petite heure.
Comment interprétez-vous justement qu'à l'issue de la réunion du dialogue stratégique, John Kerry a déclaré qu'il «souhaitait que l'élection se tienne dans des conditions de transparence et qu'elle réponde aux standards internationaux» ?
Tout dépend dans quel esprit la déclaration a été faite. A moi, il ne me l'a pas dit. Le ministre des Affaires étrangères algérien a dit qu'ils n'ont pas parlé des affaires internes. C'est à lui qu'il faut poser cette question. La position officielle est que tout est fait dans la transparence, donc ils (Américains et Algériens) seraient d'accord ! Et dans ces conditions, où est le problème ? L'a-t-on obligé à faire cette déclaration ? J'ai été ministre des Affaires étrangères, je n'ai jamais eu l'idée de faire une telle déclaration dans un pays étranger. Tout peut faire partie du «poker menteur».
Mais autant je suis vague dans la réponse que je vous donne, autant je suis certain que le but du voyage de Kerry n'a rien à voir avec l'élection présidentielle. Et si je ne me trompe pas, c'est tant mieux. Parce que plus il y aura d'immixtions dans nos affaires, plus ça se passera mal.
Pensez-vous qu'une visite de ce niveau, en pleine campagne électorale, est malvenue du point de vue des mœurs diplomatiques ?
D'abord, je ne peux pas imaginer que c'est une visite imposée, donc elle est acceptée par les Algériens. Je n'exclus pas qu'elle soit suscitée, et qu'elle l'a été précisément pour qu'on entende cette phrase, peut-être. Ou bien pour essayer d'obtenir une bénédiction extérieure sur ce qui se fait actuellement. Cela ne ressemble pas à ce que les Américains viennent chercher, c'est-à-dire, à tort ou à raison, un renforcement de la coopération en matière sécuritaire et énergétique.
Votre ami Kerry est-il conscient que sa visite, en pleine campagne électorale, sera exploitée politiquement, à des fins électoralistes ?
Il ne m'a pas donné cette impression. Mais les Américains ne sont pas naïfs. C'est dérisoire. Quand les hommes du pouvoir évoquent cela pour dire que les grands de ce monde nous rendent visite démontre le manque de confiance entre eux et le peuple. Si j'avais été au pouvoir, je chercherais d'abord à gagner la confiance de la population, pas à démontrer mon existence à travers une visite de dirigeants étrangers. C'est désagréable. La faute n'incombe pas à Kerry.
Quel commentaire vous inspire la séquence montrée à la télévision : le chef de l'Etat en train de recevoir le secrétaire d'Etat américain ?
Je suis très malheureux, en tant qu'Algérien, de voir comment on se joue de la santé d'un homme pour des raisons politiciennes. L'exposer de cette manière n'est pas glorieux pour nous. Sur le plan humain, ça me fait de la peine et, sur le plan politique, je trouve que l'on donne une image qui n'est pas glorieuse de notre pays, qui n'est pas conforme à notre niveau historique. C'est un manque de respect envers la population.
Souvenez-vous de la façon dont Reagan a quitté la scène publique : alors qu'il avait déjà quitté la Maison-Blanche dix années auparavant, il avait fait ses adieux au peuple américain après lui avoir annoncé qu'il était atteint d'Alzheimer et qu'il cessait toute apparition. C'est cela le respect au peuple.
Quand un communiqué officiel dit que le président Bouteflika s'est rendu au Val-de-Grâce pour «un contrôle de routine et que sa santé va de mieux en mieux», je me cale sur cette déclaration officielle et je me dis qu'il y a, ici ou là, un mensonge flagrant ! Parce que s'il est vrai que c'est une visite de routine, est-ce qu'en Algérie il n'existe pas au moins trois médecins parmi des milliers pour pratiquer un tel examen ? Non. Donc ce n'est pas un contrôle de routine. C'est une visite qui a un goût politicien. La maladie dure depuis 2005. Le peuple algérien est méprisé dans cette affaire.
Est-ce que nous ne sommes pas en train d'exhiber, dans le sens le plus désagréable du terme, un malade pour cacher le vrai malade qu'est le système ? On braque les projecteurs sur un homme malade, quitte à se servir de la maladie pour se jouer des gens, pour que les projecteurs ne se projettent pas sur le vrai malade : le système. Qu'on laisse un haut responsable dénoncer la justice, décider à la place de la justice pour innocenter un mis en cause, tirer à boulets rouges sur un haut responsable de la sécurité… Est-ce possible, si ce n'est avec l'assentiment du système lui-même pour brouiller les cartes !
Les luttes internes existent dans tous les milieux politiques, c'est tout à fait naturel. Ce qui m'intéresse, c'est le système qui a fait la démonstration de son indigence et de son incompétence. Notre système va nous mener au chaos. J'ai toujours dit que nous avions besoin de changer. Et que rien ne se fera sans l'armée, et encore moins contre l'armée ; mais il ne faut pas qu'elle soit le creuset des problèmes que nous vivons. On ne peut pas continuer à dévoyer indéfiniment la légitimité. Cette situation montre à nouveau la nécessité de créer un changement.
Comment éviter le chaos et sortir de ce système ?
C'est cela la difficulté, notamment en l'absence d'une société politique par ailleurs interdite. La gravité réside dans l'impossibilité de résoudre la crise. La vie d'une nation est une négociation permanente entre la société et le pouvoir politique. C'est la meilleure manière d'assurer le progrès de la société, et c'est comme cela que le pouvoir s'amende et corrige les erreurs. Chez nous, cette négociation est impossible. Parce que ni le pouvoir ni la société ne peuvent négocier avec «l'autre» sa propre disparition.
Quand on attend uniquement d'une population qu'elle obéisse, c'est une manière de ne pas la reconnaître. Le peuple a depuis longtemps tiré le rideau vis-à-vis du pouvoir qui, par ailleurs, s'est instauré sans l'avis et le soutien de la population. Nous sommes dans une situation de blocage total. Le pouvoir, dans sa conception, sait bien que son devenir ne dépend pas de la population mais des moyens dont il dispose, qui sont des moyens de l'Etat. Un parti qui a 2 millions de militants, qui détient les moyens de l'Etat et la violence légitime de l'Etat peut tout se permettre.
Les Occidentaux ont été complaisants jusqu'à maintenant. Dans l'Accord d'association avec l'Union européenne, il est clairement affirmé qu'il n'y aurait pas de sécurité sans développement, pas de développement sans bonne gouvernance et pas de bonne gouvernance sans Etat de droit (Processus de Barcelone). L'article 2 de l'Accord stipule que la notion d'Etat de droit est un pilier. Cela n'a été respecté ni par les Algériens ni par les Européens pour des raisons de «court-termisme».
Pour répondre à votre question, je dois dire qu'il faut essayer de faire prendre conscience en espérant, à Dieu ne plaise, que l'explosion ne soit pas trop douloureuse.
Pensez-vous que les détenteurs du pouvoir soient réceptifs à la nécessité de changer ?
Jusqu'à maintenant, ils n'ont pas montré de volonté manifeste pour changer le système. Je suis pour un changement dans l'ordre, et s'il ne vient pas, ce seront les faits qui jugeront. C'est le pot de fer contre le pot de terre. Les gens du pouvoir ne voient pas la réalité politique, économique et sociale du pays parce qu'ils sont aveuglés. Ils sont grisés et aveuglés.
Le 4e mandat va-t-il aggraver cette situation ?
Ça va s'aggraver avec ou sans le quatrième mandat ! Le système sera toujours là, avec un homme différent s'il le faut. Mais il faut dire en passant qu'il n'y a pas d'autre candidat qui leur aille comme un gant. Le 17 avril n'est pas une échéance historique.


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