« Mais ce qui pêche surtout c'est qu'une fois passé au logiciel anti-plagiat, votre mémoire révèle un taux de copie intégrale (phrase et paragraphes entiers) de 27 % !!! A la limite on peut en tolérer 5% mais 27, non ! D'autant que ces plagiats concernent majoritairement vos grands développements relativement peu intéressants car ultra connus sur le .... (secteur) Quasiment pas de noms d'auteur ? Même la personne qui a rédigé une thèse et que vous avez abondamment plagiée, elle n'a pas le droit d'être citée ? ». Vous l'avez certainement compris. Il s'agit d'un court extrait d'un long mail adressé par un encadrant à son étudiant suite à la remise de son mémoire. Les remarques sont nombreuses, aussi bien sur le fond que sur la forme. Mais je n'ai retenu que ce qui a fait débat en Algérie l'été dernier sur le plagiat scolaire et universitaire. Très récemment, face à l'ampleur du désastre, parce que c'est un désastre, le ministère de l'Enseignement supérieur a publié, le 28 juillet dernier, un arrêté « fixant les règles relatives à la prévention et à la lutte contre le plagiat ». Un texte de quatorze pages, 39 articles et une annexe de déclaration sur l'honneur genre « Kassaman Adhaman ma encopyi ». Curieusement, cet arrêté a été publié dans le bulletin officiel du MESR, mais pas au journal officiel. Dans cet arrêté, l'article 6 mentionne comme « mesures de contrôle » la constitution de bases de données numériques et l'acquisition de logiciels anti-plagiat. Ces derniers seraient soit achetés, soit, si cela est possible, s'approvisionner sur internet dans les logiciels gratuits. Pourquoi pas ? Chouf Atakachouf !!!! A propos de cet arrêté, le ministre de l'enseignement supérieur aurait insisté sur « la sensibilisation et la prévention plutôt que sur la sanction car sa finalité consiste à favoriser la diffusion des comportements respectueux de la recherche scientifique et de ses valeurs ». Soit ! Mais on est en droit de s'interroger sur la plus-value de cet arrêté quant au plagiat, sa prévention, son contrôle et les éventuelles sanctions puisque des textes antérieurs existent mais apparemment pas assez appliqués, soit par volonté manifeste de camoufler, soit à cause de la lourdeur de la procédure d'examen du dossier du présumé plagiaire. En effet, si on se réfère à cet arrêté, et particulièrement pour l'étudiant, il n'y a pas de procédure de « flagrant délit », c'est-à-dire qu'il n'y pas de seuil à partir duquel la procédure disciplinaire sera plus rapide et donc peut être plus dissuasive. Certes, le problème du plagiat n'est pas propre à l'Algérie. C'est un phénomène mondial qui, paradoxalement a été encouragé par les extraordinaires progrès technologiques notamment en matière de diffusion de l'information numérique, mais qui aussi combattu par ces mêmes technologies. En France, Henri Troyat, Patrick Poivre d'Arvor, Alain Minc ont été épinglés par la presse pour plagiat. Chez nous, le directeur général de la Recherche scientifique et du développement technologique du MERS, qui a organisé un séminaire sur la « La recrudescence du plagiat dans le domaine de la recherche scientifique » a aussi été épinglé pour avoir repris de grandes parties d'un texte publié par le ministère de l'enseignement supérieur français. Pour revenir à notre étudiant plagiaire, dès réception du mail de l'encadrant qui lui précisait le pourcentage de plagiat – 27 % – il se demanda comment on peut calculer ce taux. Question somme toute légitime car les logiciels anti-plagiat ne sont pas exempt de critiques. En fait ce calcul est complexe et assez approximatif avec trois couleurs : – Surlignage du texte contrôlé en vert lorsque ce plagiat est inférieur à 10 % – En orange, lorsqu'il est compris entre 10 et 35 % – En rouge quand il dépasse les 35 % ! Par ailleurs, même les versions payantes de ces logiciels anti piratage ont leurs limites. Par exemple, ils ne peuvent détectés un piratage issu d'une traduction. El Mouhim ! Notre étudiant est donc dans la zone orange. Rattrapable ! Mais il renvoie la responsabilité à ses enseignants qui ne l'auraient pas suffisamment sensibilisé sur cette pratique, rentrée dans les mœurs. « Wallah normal ! Tout le monde le fait ! ». Pour lui, il maitrise son sujet. Mais il a du mal à exprimer ses idées aussi bien en arabe qu'en français. On ne lui a pas appris ou pas suffisamment comment rédiger, comment présenter son mémoire, comment identifier les parties, comment citer les auteurs, comment soutenir... Son ami a été purement et simplement recalé parce que lui n'est pas parti par quatre chemins. Il aurait fourni un mémoire entier d'une autre personne qu'il s'est approprié. On comprendra aisément la souffrance d'un tel étudiant, surtout lorsque ce sont ses parents qui se sont sacrifiés pour lui payer ses études. On pourra toujours gloser sur les « origines » de notre ministre de l'Education Nationale. On pourra toujours la soutenir ou être contre ses réformes. Mais il faudra bien trouver une solution aux problèmes qui minent notre système éducatif.