La campagne électorale du premier tour de l'élection présidentielle française laissera comme un goût d'inachevé qui sera sans doute corrigé au second. Elle aura en tous les cas confisqué le débat politique et peut-être permis de régler, comme l'ont prévu ceux qui ont pensé et conçu ses différentes étapes, la succession démocratique du président sortant dés le premier tour. Personne ne peut contester le résultat des urnes issu du suffrage populaire mais de nombreuses questions demeurent en suspend. Mais revenons sur la stratégie qui s'appuyant sur le pouvoir médiatique a permis ce résultat. Le grand artisan de cette victoire semble avoir été le président sortant. Ne pouvant briguer un nouveau mandat du fait d'une impopularité record, il a été selon de nombreux observateurs le véritable artisan de cette campagne électorale et son inspirateur. Cette campagne restera malgré toutes les vertus prêtées à l'exercice démocratique l'illustration parfaite que dévoyée cette dernière induit inévitablement des effets pervers qui provoquent et laissent dubitatif du fait notamment des nombreuses attentes non satisfaites qui l'ont caractérisée. L'absence de débats d'idées et de confrontations de programmes a laissé place au diktat de l'image, du politiquement correct, des sondages et des medias qui auront démontré une fois de plus qu'ils constituent incontestablement les faiseurs d'opinions et pour cette fois-ci les faiseurs de rois. Mais comment s'est construite la stratégie de confinement qui a permis à un candidat ayant pourtant fait partie de l'ancien exécutif et d'en être aussi et en partie comptable du bilan, d'incarner aux yeux de l'opinion le renouveau sans s'être veritablement prêté et comme l'exige pourtant la démocratie, au débat avec ses autres concurrents, seule grille permettant à l'opinion de faire preuve de véritable discernement avant de se prononcer. Le scénario s'est ainsi mis en place dés le renoncement de l'ancien locataire de l'Elysée à briguer un second mandat présidentiel. Bien que le parti socialiste ait organisé ses primaires, il devenait évident que le candidat souhaité ne serait pas un de ses ténors et que la messe était déjà dite. Mais pour la forme un lièvre devait impérativement sortir de cette épreuve. Mais le préféré de l'establishment ne sortit pas de l'urne et l'éjection de Valls du premier tour permit à un candidat marqué plus à gauche de postuler à la candidature. Ce dernier fut à son tour intégré au scénario prévu. Maintenant sa candidature malgré une faible popularité, ne se désistant pas au profit de l'autre candidat de la gauche capable lui d'accéder au second tour, Jean-Pierre Mélenchon, il contribuera involontairement à le neutraliser et à permettre la victoire du candidat Macron. Ce qui se produit bien entendu. L'autre candidat qui a été aussi neutralisé à été Fillon qui fut pourtant longtemps le chouchou des sondages. De nombreux observateurs attribuent la paternité de l'exécution politique en bonne et due forme dont il a été victime à ceux qui ont déjà dégagé la voie à la gauche du candidat Macron. Et de nombreuses questions demeurent quant à l'origine des informations concernant le candidat Fillon et divulguées à profusion à la presse. Neutraliser médiatiquement et politiquement les deux candidats capables d'empêcher le candidat Macron, le scénario voulu a été de permettre de reproduire le ticket de l'élection présidentielle de 2007. Marine Le Pen qui a elle aussi souffert du phagocytage de la campagne du premier tour par le « feuilleton Fillon » et l'irruption médiatique du candidat Macron, provoquera comme convenu la constitution d'un «front dit républicain». Les traditions politiques de l'hexagone et notamment celles de la cinquième république ont démontré qu'il est souvent difficile de construire une majorité politique nouvelle sans avoir au préalable un appareil politique éprouvé avec soi. La victoire de Macron pose plus de questions qu'il faudra résoudre. Elle permettra sans doute l'émergence d'une nouvelle classe politique et le rajeunissement de l'élite aux commandes. Mais désormais, démocratie et spectacle font, semble t'il, et sous l'œil vigilant du pouvoir médiatique, route ensemble et quoique qu'il se produise the show must go on.