Par: Yacine Babouche 14 Mars 2019 à 12:20 Un article publié sur le journal américain le Washington Post ce jeudi a effectué le parallèle entre la situation que vit actuellement l'Algérie avec celle vécue par l'Egypte durant ces dernières années, estimant que « les manifestations et la réaction du régime en Egypte en 2011 peut offrir quelques leçons aux Algériens » et mettant en garde contre la répétition du scénario égyptien en Algérie. « En Egypte et en Algérie, l'armée est la force la plus puissante dans les coulisses et le degré de centralisation du régime est essentiel pour comprendre la capacité de ces régimes à s'adapter et à surmonter les crises politiques », souligne le Washington Post. « Comme lors de la période qui a précédé le départ de Hosni Moubarak en Egypte, le ‘'Deep state'' algérien cherche des moyens de sortir d'une situation précaire. Il tente de donner l'illusion de concessions et une transition qui permettent à ceux qui en font partie de préserver le système et leur place au sein du système », affirme l'article. « Le rôle dominant de l'armée et des élites politiques et économiques liées signifie que le ‘'Deep state'' algérien ne disparaîtra pas du jour au lendemain », estime le Washington Post, ajoutant que « les manifestants peuvent éviter deux erreurs clés commises en Egypte ». « La première, en insistant sur des réformes réelles et en refusant d'être apaisés par le retrait de personnalités du régime. Deuxièmement, en ne quittant pas les rues avant que leurs demandes soient satisfaites », préconise le journal américain. En Egypte en 2011, « les manifestants avaient réagi avec fureur lorsque Moubarak n'avait pas démissionné durant son discours du 10 février. L'armée, comprenant la volatilité de la situation, finit par retirer son soutien, et le président a démissionné le lendemain. Les manifestants ont quitté la Place Tahrir et sont rentrés chez eux avec la promesse que l'armée mettrait en place un pouvoir civil. Ils s'étaient trompés », rappelle le Post. « En 2019, le ‘'Deep state'' égyptien est plus fort que jamais. Le régime d'Abdel Fatah al-Sissi a montré qu'il pouvait grandement s'adapter, et il est souvent décrit maintenant comme ‘'pire que Moubarak'' », affirme le journal, indiquant que al-Sissi « cherche à prolonger son règne au-delà de ce que permet les amendements de la constitution et qui lui permettrait de rester au pouvoir jusqu'en 2034, démantelant le gain ultime de la révolte de 2011, la limite à deux mandats présidentiels ». « L'annonce de Bouteflika, cette semaine, qu'il ne sera pas candidat à un nouveau mandat, emprunte une pièce du cahier de jeu égyptien », explique le Washington Post. « En annulant la prochaine élection, l'octogénaire Bouteflika a dans les faits prolongé son mandat présidentiel pour une durée indéterminée, permettant ainsi au pouvoir de mettre en place une transition favorable ne menaçant pas ses intérêts », explique également le journal américain. « La désignation par Bouteflika au poste de Premier ministre de son ministre d'Intérieur Noureddine Bedoui, loyaliste de longue date au régime, est exactement ce que Moubarak a fait lorsqu'il a nommé Ahmed Shafik au poste de Premier ministre durant les manifestations de 2011 », affirme le Post. « La capacité du régime algérien à s'adapter et survivre cette crise politique est grande. En d'autres termes, un scénario égyptien est très probable. Des concessions seront effectuées et des personnalités majeures du régime seront sacrifiées », affirme le Washington Post. « Mais la question se pose : le peuple algérien acceptera-t-il cela ? », s'interroge le journal américain, pour qui le pouvoir des manifestants « vient de la présence. Quitter les rues sans résultats concrets signifiera probablement qu'un nouveau Bouteflika viendra et que le pouvoir restera en place », estime le journal américain. « Les semaines à venir seront critiques pour montrer si les Algériens seront capables d'aller de l'avant ou s'ils se retrouveront avec une révolte avortée comme en Egypte », conclut le Washington Post.