3 AOÛT 2019 « Nous valoriserons au sein de l'ANP les étapes franchies sur la voie du dialogue national,…, s'engageant à mettre à disposition les moyens nécessaires pour l'accompagner dans cette noble démarche et réunir les conditions idoines pour la tenue des présidentielles dans les plus brefs délais », discours politique du général Gaid Salah, le 30 juillet 2019.Voila donc à quoi se résume la feuille de route du général. Il tient absolument à avoir sa marionnette dans les plus brefs délais. Dans sa logique, la sortie de crise se limite à l'élection d'un « président ». Or, depuis l'indépendance du pays, le pouvoir effectif, en l'occurrence l'état-major général de l'armée, n'a jamais permis une telle élection. Le vote jusque-là n'a été qu'un plébiscite du candidat de l'armée. Que va-t-il changer au scrutin que compte organiser Gaid Salah ? Dans le fond, il n'y aura aucun changement. À partir du moment où il fixe le cadre politique et le résultat, il ne reste aucune marge aux participants au futur faux dialogue. Bien qu'il claironne que cette élection sera transparente, le régime –diminué d'un clan rival, dont certains sont en prison – mobilisera ses relais pour fausser la compétition électorale. Et ce n'est pas un hasard si le peuple algérien refuse les élections sous l'égide du régime dont la plupart étaient des exécutants obéissants de Bouteflika.Contrairement aux allusions antinationalistes de Gaid Salah, les Algériens n'ont aucun problème avec le processus politique. Car, pour bâtir de nouvelles institutions selon les règles démocratiques et modernes, il faudra aller aux élections. Dans cette nouvelle République, le cap sera fixé par le peuple souverain et non pas par des fonctionnaires, et ce, quel que soit leur rang.Est-ce que le peuple a besoin d'un tuteur pour concrétiser son rêve ? C'est sur cette ambigüité que joue habilement Gaid Salah. En effet, s'il échoit à l'armée de protéger le pays, notamment ses frontières, le haut commandement militaire n'est pas investi de diriger la politique du pays. Et pour faire ce travail, il est suffisamment payé par le pays. Donc, il n'y a aucun un avantage supplémentaire à lui accorder.D'ailleurs, même la constitution dont il loue les vertus est claire sur la source du pouvoir. Les articles 7 et 8 attribuent nettement le pouvoir au peuple. Hélas, le régime se cache derrière un éventuel désordre pour ne pas admettre la demande des millions de manifestants. «Nous mettons en garde ces porte-voix qui ne cessent d'appeler à s'éloigner de la constitution, pour tomber dans l'écueil du vide constitutionnel qui constitue une porte directe s'ouvrant sur l'anarchie et l'inconnu », justifie-t-il son refus de toute transition pouvant déboucher sur un Etat de droit. Pire encore, il présente la démarche visant à perpétuer le règne injuste du régime comme étant la victoire du peuple. Pour lui, les voix discordantes –qui représentent environ 4/5 du corps électoral –visent à discréditer l'Etat, car les principales revendications sont satisfaites. Ce n'est ni plus ni moins une insulte à l'intelligence humaine. Dans le fond, le message de Gaid Salah se traduit comme ceci : les fonctionnaires qui prennent en otage le pays depuis 1962 sont les seuls à assumer la direction du pays. Ce qu'il oublie, c'est que cette approche prévaut depuis l'indépendance. Et le peuple dit désormais non. Et surtout il ne faudrait pas compter sur la coopération du peuple pour achever le pays.