Une journée à Ighil Imoula Réagissant à l'un de mes articles parus dans le site LQA, une grande moudjahida, m'a tenu ces propos lors de notre passage avec les journalistes d'El Watan et de Liberté au village d'Ighil Imoula : « si je ne te connaissais pas depuis ton jeune âge, j'aurais pensé la même chose que ceux qui te qualifient de fervent Messaliste ». En 1954, le peuple algérien dans tous ses fragments socioculturels et dans toutes ses composantes humaines, allant de l'autochtone musulman jusqu'à l'élément européen et juif en passant par les pieds noirs, n'a opté ni pour la collaboration avec la colonisation ni pour la violence pour accéder à son indépendance. La devise était simple : ni caïd ni indigène. Autant il refusait ce « destin de société exclue de la communauté humaine », autant il refusait de recourir aux violences pour ne plus être un peuple déchu, un peuple de seconde zone. En un mot, il voulait accéder à son indépendance par la paix et le dialogue, sans le moindre déchirement ou perte en vie humaine. Remettons nous un peu dans le contexte de l'époque, avant que Ben M'hidi et ses amis ne décident de jeter la révolution dans la rue, et posons nous la question suivante : quelle était véritablement la situation politique du pays à la veille du 1er novembre 1954 ? Si A France, E Zola, E Combes, Rousseau, V Hugo, A Lebrun, Clemenceau, Jaurès…n'ont pas réagi face à la folie de la colonisation, en revanche leurs successeurs ont été d'un autre avis, allant jusqu'à rompre définitivement avec les jugements erronés de la colonisation. Aux yeux de Camus, Roblès, Sartre, Aragon, Eluard, Beauvoir…l'algérien ne pouvait pas être seulement ce « bougnoule » ou ce « sale arabe » que la colonisation décrivait avec un rare zèle au reste du monde. A la veille de « l'incendie » du 1er novembre 1954 qui allait provoquer des déchirements douloureux, le mouvement nationaliste à franchi une étape importante en réussissant a mobiliser en faveur de sa cause un grand courant culturel, intellectuel et politique composé essentiellement d'européens. C'est ce courant qui réussira a imposer l'acceptation de l'algérien en tant que citoyen accompli, pouvant revendiquer son indépendance Au Congrès de la Soummam qui s'est tenu le 20 août 1956 et au cours duquel Abane Ramdane a exhorté les élites algériennes à rejoindre la révolution, le nombre des moudjahidine ne dépassait guère le chiffre de 70000 éléments, alors que celui des harkas et des supplétifs de l'armée française dépassait largement les 400000 individus. A la question des journalistes de Liberté et d'El Watan, comment avez-vous préparer le 1er novembre ?, les deux frères Kaced du village d'Ighil Imoula, qui ont participé activement aux préparatifs du 1er novembre 1954, eurent cette réponse : « On était au total un groupe de 19 membres (…)Deux mois avant le déclenchement de la révolution, Krim Belkacem, Ali Zammoum et Abdellah Fadhel sont venus nous dire de nous préparer en vue de passer un stage militaire dans la région des Ait Bouadou. » Deux mois seulement ont suffi à Boudiaf et ses amis pour déclencher une révolution armée dont l'objectif était de restaurer l'indépendance du pays ! Mais quel miracle ! Quelles sont les retombées directes de cette action ? Aujourd'hui, il y a la réalité, le drame que vit le peuple. Un drame qui dépasse les horreurs du terrorisme, le chômage et les misères quotidiennes. Le peuple ne sait plus qui il est au juste. Ce peuple qui s'est préservé des narcotiques de la colonisation, qui était sur le point de digérer une autre culture, une autre civilisation sans renier de ses valeurs arabo-musulmanes et amazigh a perdu tous ses repères. Désormais, il est la merci de tous les imposteurs et de tous les corrupteurs.