Le permis à points revient à la Une de l'actualité nationale, comme s'il était la panacée à l'anarchie routière. Je crois qu'on en parle depuis déjà un moment, non ? Eh bien voilà, il revient sur le devant de la scène. Je ne voudrais pas couper la chique aux initiateurs de ce référent ; au contraire, j'adhère à la nouveauté. Car aujourd'hui, pour un rien, votre permis saute. Ce qui m'embête, c'est que ce permis à points est comme une étoile filante ; il apparaît, brillant comme un astre ; puis il disparaît de longs mois ; puis il réapparaît pour disparaître à nouveau. Enigmatique permis à points ! Voilà qu'il réapparaît encore une fois, avec cette fois-ci un argument massue : le permis à points (le PP) aura son mot à dire dans l'arrêt du massacre des accidents de la route. C'est ce point qui me chiffonne, un peu. Je ne vois pas comment cela pourrait se faire. Juste parce que l'Algérien disposera d'un permis à points, il y aura moins d'accidents ! J'en doute fort. Tant que l'Algérien se permettra de conduire n'importe comment, la route aura son lot de morts. Je suis affirmatif. Catégorique. Sûr. J'ai assez fait la route pour savoir qu'il y a un problème psychologique chez l'Algérien, quand il se met derrière le volant. L'Algérien conduit comme un fou. Un étranger sur nos routes s'arracherait les cheveux. A moins que l'Algérien soit à point, comme le permis du même nom, les accidents routiers – hélas – feront encore et encore nombre de victimes. Puis, donnez-nous ce permis à points (le PP), et on verra bien. Comme dit l'autre féru de la langue, on verra ce qu'on verra. Un point à la ligne ! Ce permis à points me rappelle le mythe de l'écriture de l'histoire de notre pays. Ou de sa réécriture ! Ça ne plaira pas aux esprits chagrins ! Tant pis, je me lance. Tous les ministres des moudjahidine ont ressenti le besoin, du moins sur le plan du discours, d'écrire ou de réécrire l'histoire. Histoire qui commence quand ? Où ? Comment ? Si ces ministres ont ressenti ce besoin, c'est que notre histoire est mal écrite et mal enseignée. C'est de cela qu'on parle, non ? Justement, il faut trancher définitivement ce problème d'histoire. Le nationalisme a bon dos, le pauvre ! Jusqu'à quand ? J'ai cru lire quelque part la déclaration d'un Algérien qui a repris le slogan éculé : «Un seul héros, le peuple.» Laissons tranquille le peuple, s'il vous plaît ; le peuple veut vivre décemment, c'est tout ! D'autant qu'après le lait, notre ministre de l'Agriculture lui promet de la viande à gogo durant le mois de Ramadhan. Vous voyez, messieurs, que l'histoire se complique ! Oui, réécrire une histoire tronquée ? C'est bien ! C'est un peu comme l'histoire (décidément, on n'en sort pas de ces histoires !) du permis à points (le PP), on en entend parler, mais on ne le voit pas. Réécrire l'histoire nationale ? Faites-le ! Puis, basta ! Surtout, n'omettez aucun détail ! Dites que l'Algérie est amazighe, le reste viendra de lui-même. Mais c'est déjà une autre histoire ! La fraude scolaire ? Oh la grande trouvaille ! Attention, un colloque national lui sera consacré les 4 et 5 avril à Arzew. Ils vont colloquer, ya kho. Sur le copiage. Mais il a de tout temps existé ! Bien sûr, aujourd'hui, les temps ont changé. Et les moyens de la fraude, aussi. Et si on pensait à changer la façon d'enseigner ! Ce serait mieux que d'aller colloquer sur une futilité. Oui, je trouve que c'est une futilité. Les cancres existeront toujours. Et les élèves assidus aussi. Il ne faut pas chercher des poux... Oui, les poux existeront toujours en milieu scolaire. Maâlich, colloquez autant que vous voulez, ça n'empêchera pas le cancre de faire le cancre en classe, le fraudeur de frauder en classe, et le bon élève d'être bon en classe. Je vous pose une question à un douro planché : «Qui n'a pas une fois dans sa vie tenté de frauder en classe ?» Attention, je vois des nez s'allonger ! Alors ? Et, si pour une fois, on parlait de fraude à tous les niveaux ! Allez, chiche ! J'ai failli oublier une info de première qualité : le printemps du luth à Oran. Puis, c'est dans le cadre du patrimoine ! Pauvre patrimoine qui fout le camp d'année en année. Je ne parle même pas de La Casbah. Après la fraude scolaire, voilà du temps passé à parler du luth. Pour dire quoi, je vous le demande ? Ça rajoutera quoi à notre culture ? Au fait, le luth est-il algérien ? Peut-être ! Je ne veux même pas le savoir. A moins qu'il ne vienne d'ailleurs ! Peut-être ! Sincèrement, il y a d'autres tâches culturelles qu'il faut aborder dans le cadre du patrimoine. Il faut juste y penser. Lesquelles ? Bonne question. Il y a des personnes qui sont payées pour ce faire, ya kho. Ce n'est pas mon problème : je constate seulement qu'on bousille le temps sur des sujets futiles, comme la fraude scolaire et le luth. Pourquoi pas le mandole ? Le banjo ? Le violon ? Le bendir ? La zorna ? Le djouak ? Ça nous fera un printemps plein de réjouissances. En attendant, l'inculture fait son sale boulot dans les rues, dans nos cités, sur nos routes, dans nos hôpitaux, dans nos écoles. Jusque dans nos cœurs ! D'un autre côté, le patron du FLN, lui, est à point. A un point où personne ne lui arrive à la cheville. Tellement il travaille sans relâche à promouvoir le cinquième mandat. Attention, il ne faut plus parler de cinquième mandat ; désormais, il s'agira de continuité. La continuité de quoi ? Je vous le demande. A moins que ce ne soit la continuité du quatrième mandat. Le patron du FLN, lui, sait compter le nombre de mandats : 1, 2, 3, 4 et 5. Pourquoi pas un mandat à vie, tant qu'on y est ? Soyons à point, tout est fait sous la conduite éclairée de notre Président, jusqu'au permis à points. Avez-vous remarqué cette agaçante propension de nos ministres à répéter à l'envi : «Grâce à la conduite éclairée de fakhamatouhou...., le permis à points» Encore heureux que les bulletins météo ne le disent pas ! Ah, le cinquième mandat dans la continuité ! C'est défoncer des portes ouvertes que de dire cette vérité de La Palice. S'il ne s'agissait que de continuité, j'aurais compris cet acharnement du patron du FLN ; mais il y a derrière un système à perpétuer. Dès lors, l'opposition n'aura aucun recours au moment des élections présidentielles ; car il ne faut pas qu'elle se fasse d'illusions. En l'état actuel des choses, la continuité est garantie, au-delà du cinquième mandat. Aussi, je dis bravo au patron du FLN d'avoir dégoté cette formule. Au moment où l'Arabie Saoudite entend lâcher du lest quant à son wahhabisme dévastateur ; au moment où la Syrie s'autodétruit ; au moment où le Yémen subit une guerre de ses frères musulmans ; au moment où Sissi est élu à plus de quatre-vingt-dix pour cent des suffrages ; la Palestine est en voie de disparaître de la carte du monde. Israël a mis la Palestine dans une prison à ciel ouvert. Et les musulmans du monde entier détournent les yeux du massacre commis contre les Palestiniens. Et on vient nous rabâcher que l'Islam est une grande fratrie. Frère de quoi ? Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, on n'arrête pas de parler de la shoah ; parce que les juifs ont les moyens de leur politique. Les Palestiniens vivent leur «shoah», à leur manière, entourée d'un silence complice des musulmans. Y. M.