La rencontre historique entre les deux chefs d'Etat coréens, survenue suite aux derniers Jeux olympiques d'hiver, organisés en Corée du Sud, qui ont avait vu la participation des voisins du Nord, montre, encore une fois, le rôle que peut jouer le sport dans le rapprochement des populations en conflit. Il faut rappeler que le partage des deux entités coréennes a été décidé en février 1945 au terme de la Seconde Guerre mondiale par les deux puissances dominantes qu'étaient les USA et l'URSS. Ce partage a été entériné par l'ONU en 1948, officialisant la création de deux Etats indépendants et voisins, favorisant ainsi des séparations familiales déchirantes. L'animosité entre les deux nouvelles nations, alimentée par les puissances séparatrices, avait provoqué une terrible guerre qui avait ôté la vie à près de 5 millions de personnes. Depuis, malgré les efforts des dirigeants coréens successifs, d'une part, et de la communauté internationale, d'autre part, une vive tension restera, faisant craindre, tout récemment encore, de nouvelles escalades guerrières, surtout après l'arrivée de Donald Trump à la tête des USA. Les Jeux olympiques d'hiver que la Corée du Sud a abrités en février dernier ont été une opportunité pour engager un dégel des relations entre les deux Etats. La participation des athlètes nord-coréens, accompagnés par la sœur de leur fougueux Président, a permis de relancer les pourparlers pour aboutir à la rencontre historique des deux chefs d'Etat, redonnant ainsi l'espoir aux familles, divisées depuis près de 70 ans, de se retrouver et d'envisager une paix durable. Ces rencontre et projection de relations apaisées, que la diplomatie politique n'avait jusque-là pas réussi à concrétiser, ont finalement pu aboutir grâce au sport, comme l'avait été le rapprochement entre les USA et la Chine, par le biais de la «diplomatie du ping-pong» en 1971, suivi de la visite historique du président américain Richard Nixon une année plus tard, mettant un terme à une rupture relationnelle de plus de 20 ans. Le rapprochement par le sport des populations en conflit interne ou externe est également l'objectif essentiel de l'Association paix et sport présidée par l'ancien athlète olympien français Joël Bouzou et parrainée par le prince Albert de Monaco. Cette association contribue, depuis quelques années, à la pacification des relations entre des populations que les tensions politiques et/ou ethniques mettent en opposition violente. Dans certains cas, malheureusement, le sport, manipulé par des enjeux politiques, a été à l'origine de tensions dangereuses (ex : match éliminatoire Egypte-Algérie pour le Mondial 2010), voire guerrières (Honduras-Salvador en 1969). Ces deux situations vécues à travers le sport montrent bien que ce dernier peut contribuer à la paix lorsqu'il précède la politique ou à la violence lorsqu'il en devient un instrument. Chez nous malheureusement, les rencontres de football, qui drainent régulièrement des milliers de personnes vers les stades, sont sources de violence répétée, donnant une image négative du sport, dont les fondements olympiques sont l'éthique, la morale et le respect mutuel. Les jeunes Algériens utilisent les enceintes sportives, comme lieux de déversement de leurs frustrations d'origines diverses. Chaque match de football devient une angoisse pour les organisateurs et les spectateurs qui recherchent de la joie et du plaisir. Le hooliganisme, domestiqué en Europe, s'installe dangereusement chez nous, mettant sérieusement en difficulté les autorités chargées de la sécurité des citoyens. Plusieurs rencontres, regroupant des compétences en sociologie, psychologie, gestion des foules, ont été organisées par le ministère de la jeunesse et des sports et la Fédération algérienne de football. Des recommandations ont été élaborées pour tenter de juguler ce phénomène de violence, malheureusement sans suite donnée. J'ai personnellement participé à certaines de ces rencontres, au cours desquelles ont été suggérées quelques solutions, dont celle d'occuper les jeunes durant leur présence dans les stades, dans l'attente de la confrontation sportive programmée. Des matchs d'ouverture entre catégories de jeunes, comme cela se faisait il y a quelques décennies, pourraient occuper sainement les jeunes et contribuer à apaiser les tensions dans les tribunes. De même, les responsables de la FAF devraient régulièrement rappeler aux dirigeants des clubs et aux entraîneurs, la nécessité de donner l'exemple, en évitant les comportements agressifs contre les arbitres, encourageant les tensions au sein des spectateurs. Les entraîneurs doivent être également des éducateurs ; ils doivent préparer leurs joueurs à accepter les décisions des arbitres, même lorsqu'elles constituent des erreurs (l'erreur reste humaine). Les comportements agressifs à l'égard du juge de terrain sont toujours relayés par les spectateurs chauvins qui aliment un climat de violence dans les gradins. Le respect entre joueurs devrait être exigé par les responsables administratifs et techniques des clubs. Le joueur est un référent pour la jeunesse ; son comportement déteint sur les jeunes qui peuvent verser dans des attitudes condamnables, provoquant parfois des dégâts matériels et humains inacceptables pour une activité censée instruire le fair-play et le respect de l'adversité. Des dirigeants, entraîneurs ou joueurs qui font preuve de comportements d'agressivité verbale ou physique, devraient être lourdement sanctionnés, voire bannis des terrains de compétition sportive ; il est pour le moins dommageable d'en retrouver certains au niveau des sélections nationales, favorisant ainsi la promotion à la violence. La FAF devrait penser à encourager le fair-play et la bonne conduite, en réservant une partie de son budget à l'instauration de récompenses motivantes pour les acteurs respectant les règles de respect et de non-violence (clubs, entraîneurs, joueurs, arbitres) sur la base de critères préétablis. Une commission composée d'anciens joueurs non sanctionnés durant leur carrière pourrait constituer le modèle chargé d'étudier et de remettre les récompenses méritées. Une charte de bonne conduite devrait être élaborée et soumise aux clubs pour engagement et respect ; elle serait prise en compte pour l'affectation des subventions. Des réunions régulières devraient être programmées entre les dirigeants de clubs et les représentants du MJS, de la FAF et des services de sécurité, afin d'analyser les comportements des différents acteurs du sport (acteurs sportifs et supporters) et d'adapter les mesures préventives de la violence. Le fair-play, qui a caractérisé la dernière finale de coupe d'Algérie, entre la JSK et l'USMBA, montre qu'une approche préventive du phénomène de violence a été prise en charge par les différents responsables concernés. Je saisis l'opportunité pour adresser mes chaleureuses félicitations à l'ensemble des acteurs de cette rencontre et à l'USMBA pour sa brillante et méritée victoire. C'est un exemple à suivre et à généraliser afin de permettre au sport de jouer son rôle fédérateur et moralisateur de la jeunesse. R. H. * Ancien médecin fédéral de football, ancien président du COA