Créé à Oran en février 2016, «le jardin des femmes», un lieu d'accueil dans une atmosphère sécurisée et discrète apporte depuis sa mise en place un lieu de soutien pour les femmes migrantes et algériennes. Hier les principaux acteurs de ce projet, en l'occurrence médecins du monde et les associations locales Fard, APCS et Apros Chougrani, ont organisé un séminaire clôturant les deux années du projet «Accès aux droits pour les femmes prises dans des schémas de domination et/ou d'exploitation à Oran». Amel Bentolba - Oran (Le Soir) - Bénéficiant du soutien financier de l'agence française de développement (AFD), du service de coopération et d'action culturelle français (SCAC) et de la commission européenne, le projet «le jardin des femmes» est né fin 2014 à l'issue d'une mission exploratoire menée par des anthropologues et des médecins, nous explique Mme Feriel Kessaï, coordinatrice de médecins du monde pour le site d'Oran. Durant cette mission, il y a eu, dit-elle, des focus groupes avec des femmes algériennes et des femmes subsahariennes. «L'objectif était d'analyser quels sont les déterminants sociaux et économiques dans l'accès à la santé sexuelle et reproductive au niveau du territoire d'Oran.» Une mission exploratoire qui a abouti au fait que même si les nationalités sont différentes, les besoins étaient plus ou moins similaires. Médecins du monde est allé tout naturellement vers des partenariats, à travers des associations activant à Oran Fard (femmes algériennes revendiquant leurs droits), Apros Chougrani, et APCS (Association de protection contre le sida) parce que dira notre interlocutrice : «en fonction des besoins qu'on avait identifiés, et des barrières, les partenaires qui pouvaient le mieux répondre à ces besoins-là, c'était ces associations.» Une rencontre regroupant tous ces acteurs a ainsi fait naître officiellement le projet «le jardin des femmes» en février 2016. Un projet qui a tout au long de son parcours compté sur l'implication des institutions publiques, car dira Mme Feriel Kessaï : «L'objectif de ce projet est d'être un pont entre les populations qui, jusque-là, étaient marginalisées et des institutions publiques qui existent.» Un pont plus qu'utile puisque ce projet a démontré que, souvent, il y a un déficit en communication, où les populations marginalisées ne savent pas toujours où il faut aller ou, tout simplement, ils n'osent pas par méconnaissance des droits, des assurances de confidentialité et de prise en charge. L'ouverture de ce centre «Le jardin des femmes» leur a facilité les choses, car il est plus facile de se rendre à un centre d'écoute, ou au sein d'une association que d'aller directement et seule vers des institutions publiques. Tel est le constat de ce groupe constitué autour de ce projet, après deux ans de pratiques et d'échanges. Pour sa part, Mme Fatma Boufnik de l'association Fard évoquera le volet de compétence de son association dans ce cadre-là, à savoir le suivi psychologique avec ses deux volets : écoute individuelle et le groupe thérapeutique de parole et de suivi juridique, avec le panel de service proposé. Avec plus de détails sur le rôle de l'association dans ce projet, Mme Faiza Bouchi, psychologue clinicienne, explique cet accompagnement psychologique et thérapeutique. «Sur le total de 429 prestations fournies par l'association, 267 sont dans le cadre du projet JDF (Jardin des femmes) soit 62% des prestations. Les GPT (Groupe de parole thérapeutique) sont totalement dédiés aux bénéficiaires du projet JdF ainsi que les frais administratifs, d'huissiers et d'expertise.» A raison de deux groupes thérapeutiques par mois depuis février 2016 à juin 2018 atteignant 53 groupes, cette prestation est devenue indispensable, nous explique Mme Boufnik : «quelles que soient les situations, les femmes tenaient à ce que le groupe se tienne et ça a énormément apporté et à nous en tant qu'intervenants, à la population que nous accompagnons parce que ça leur a permis d'être autonomes et de se prendre en charge et décider de leur sort.» Le projet a également réalisé une centaine d'écoutes psychologiques, d'accompagnements juridiques sur le plan des affaires abouties positivement au nombre de 20 en faveur des demandeuses, a-t-on appris. Des prestations qui en principe existent déjà sur le terrain à travers les institutions publiques en Algérie. l'on s'interroge dans ce cas-là quel est le rôle du projet «Jardin des femmes» ? Mme Boufnik tient à éclaircir justement ce point précis : «ce projet nous a permis de faire des plaidoyers au niveau des institutions, notamment auprès de la justice par rapport à l'aide juridictionnelle. Et comment travailler justement avec ce qui existe institutionnellement. Ne pas se substituer au travail des institutions. On le fait parce qu'il y a un manque, mais on le fait aussi dans l'esprit de travailler avec ceux qui sont officiellement en charge pour le faire.» A. B.