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Les jeux singuliers du th��tre et du conteur
Par Ahmed Chenniki
Publié dans Le Soir d'Algérie le 05 - 06 - 2010

Notre article tentera d�interroger le fonctionnement d�exp�riences particuli�res travers�es par une logique singuli�re et de voir comment le th��tre en Alg�rie, adopt� tr�s tardivement et marqu� par les conditions de son �mergence, a r�utilis� une nouvelle forme d�expression dict�e par l�exp�rience de la culture de l�ordinaire faisant cohabiter structure th��trale et formes populaires. Ainsi, la culture populaire traverse la repr�sentation et permet la convocation d�un public populaire.
L�adoption du th��tre par les Alg�riens correspond � une n�cessit� sociale et historique et � des manifestations latentes. Ce sont souvent les nations dominantes et h�g�moniques qui imposent leur regard, leur fa�on de voir. Il est, certes, question d�interd�pendance mais dans des situations limites. Il n�y a pas d��changes �gaux entre peuples. C�est le �puissant� qui �oblige� les autres � lui emprunter ses attitudes, ses comportements et ses valeurs. L�emprunt est souvent v�cu par les peuples domin�s comme une sorte d�excroissance suspecte ou un espace d�ali�nation n�gative. Ainsi, le th��tre fut au d�part consid�r� comme l�expression d�une culture dominante, coloniale qui pouvait d�tourner l�autochtone de ses valeurs originelles. C�est pour cette raison que cet art, comme d�ailleurs les autres formes culturelles europ�ennes, rencontra de vives r�sistances avant d��tre adopt� par certaines �lites urbaines. C�est au contact de la colonisation que fut d�couvert l�art de la sc�ne qui comportait des similitudes avec quelques structures populaires, mais n�ob�issant pas aux m�me sch�mes d�organisation. C��tait une discipline nouvelle. La repr�sentation associait en quelque sorte les �l�ments du terroir qui traversaient toute la soci�t� et la nouvelle structure qui apportait de nouvelles donn�es et imposait sa propre forme. L�appropriation du th��tre n�excluait pas la pr�sence de faits culturels autochtones caract�risant le fonctionnement de la repr�sentation. Nous retrouvons souvent dans les pi�ces alg�riennes la structure du conte, les personnages des l�gendes populaires, Les Mille et Une nuits et bien d�autres formes litt�raires orales. La litt�rature orale dialogue avec Moli�re. Le th��tre s�est impos� au Maghreb vers le d�but du si�cle. Redout� et suspect�, l�art sc�nique fut finalement adopt�, assimil� par une partie de l��lite qui trouvait ainsi un moyen d�expression privil�gi� lui permettant d�entreprendre une communication avec le public et la diffusion de ses id�es. Cet art accept� par une minorit� s�imposait vite et atteignait les villes alg�riennes o� se constituaient des troupes qui allaient monter des pi�ces et des sketches. Le th��tre arrivait � gagner les c�urs des Alg�riens et s�int�grait ainsi � l�univers culturel national. L�art th��tral a rencontr� un �cho positif parce qu�il s�int�grait de mani�re relativement ais�e dans le syst�me culturel national o� existaient d�j� des formes de repr�sentation presque similaires. La domination coloniale a facilit�, en imposant ses propres formes et en p�rorant les valeurs culturelles nationales, l�adoption de l�art th��tral. Depuis l�adoption du th��tre, de nombreux traits et �l�ments appartenant � diff�rentes cultures s�interpellent, s�entrechoquent et s�interp�n�trent dans la repr�sentation dramatique. Certes, les structures emprunt�es dominent, mais n�effacent pas de l�imaginaire collectif les espaces culturels autochtones qui refont surface dans toute situation de communication. C�est d�ailleurs dans ces conditions qu�apparaissent dans les textes dramatiques des r�sidus et des stigmates d�une m�moire populaire r�fractaire � tout embastillement et � toute fermeture. L�emprunt fut synonyme de marginalisation et de disparition progressive des formes culturelles populaires, surtout dans les villes. Le th��tre, tel qu�il fut et est pratiqu� en Alg�rie, est un art d�emprunt, adopt� dans des conditions pr�cises, marqu� par les circonstances de son appropriation. C�est surtout un art d��importation� adopt� tardivement par les Alg�riens qui n�arrivent pas encore � le prendre s�rieusement en charge et � lui apporter une sorte de l�gitimit� ou de caution n�cessaire � sa reconnaissance nationale. Cet �art d�importation� n�emp�cha/ n�emp�che nullement la pr�sence d��l�ments emprunt�s � la �tradition� orale qui investissaient/ investissent la repr�sentation. L�assimilation du mod�le fran�ais n�efface pas les lieux culturels populaires qui se manifestent dans les pi�ces �crites par les auteurs trop marqu�s par l�imaginaire collectif et les stigmates de la litt�rature populaire. C�est vrai que plusieurs formes � traditionnelles � ont connu une disparition certaine, une fois le th��tre adopt� par les Alg�riens, et surtout sous la pression des changements et des �v�nements qui secouaient de fond en comble la soci�t� alg�rienne. C�est ce que le sociologue tunisien appelle �hypoth�que originelle� et Jean Duvignaud, pour d�crire ces nouvelles r�alit�s, nomme �les mythes et les id�ologies dramatiques �. Si l�on interroge la r�alit� du th��tre en Alg�rie durant le d�but du si�cle, on s�aper�oit que ses premiers promoteurs Allalou, Ksentini et Bachetarzi qui ont emprunt� le moule europ�en n�ont pu se d�tacher s�rieusement de la force magn�tique que constituait le fonds dramatique populaire qui investissait l�imaginaire et la culture de ces trois auteurs. La pi�ce th��trale ob�issait, certes, � la forme europ�enne d�agencement, mais devenait �galement un lieu qui cristallisait, volontairement ou non, les signes latents de la culture populaire. La structure du conte investissait toute la repr�sentation. La po�sie, souvent pr�sente dans les espaces populaires, articulait le texte et devenait le centre de l�action. Comme d�ailleurs la parole qui impr�gnait le jeu et les performances des com�diens et d�terminait les grandes figures g�om�triques et les d�placements sc�niques. La m�moire s�introduisait par effraction dans un univers nouveau qui ne pouvait r�sister � cette incursion qui transformait la structure th��trale. Profond�ment ancr�s dans l�imaginaire populaire, les faits culturels originels se r�veillent, de fa�on d�sordonn�e et �parse, au contact de valeurs et de formes ext�rieures. La latence est marqu�e par la dur�e. Les signes latents caract�risent le v�cu social et restent en �veil, en attente. Mais la chercheuse fran�aise Arlette Roth, qui a �t� la premi�re � soutenir une th�se de doctorat sur le th��tre en Alg�rie et qui ne semble pas avoir examin� la question, �vacue �vasivement le probl�me en insistant uniquement sur le manque de formation des premiers auteurs. Elle �crit ceci : �On se borna � adopter l�id�e de jouer de petits sketches et � ins�rer ces productions dans un spectacle comportant des chants et des danses pr�sent�es sous le nom de �f�tes mauresques�.� Cette explication nous semble donc incompl�te car elle �vacue un �l�ment important, la manifestation de l�imaginaire collectif et la s�cularit� des soci�t�s et des formes populaires enfouies, � l��tat latent, dans le subconscient et qui se r�v�lent, � des moments peu pr�cis d�expressions culturelles et sociales. La culture populaire, pr�tendument disparue et consid�r�e comme d�finitivement morte, se m�tamorphose subitement et r�ussit jusqu�� transformer les formes dites savantes. C�est surtout l�inattendu qui caract�rise cette intrusion dans des espaces apparemment ferm�s. Ainsi, l�emprunt, souvent latent, parcourt les lieux peu �herm�tiques� et accueillants de la forme emprunt�e. Les marques ext�rieures ou exog�nes ne peuvent effacer, de mani�re d�finitive, les structures internes ou endog�nes. Ces structures, productions investies de savoir et d�histoire, investissent la repr�sentation dramatique alg�rienne. Les textes d�Allalou, de Ksentini ou de Bachetarzi contiennent, bon gr� mal gr�, les r�sidus de la culture originelle qui ob�it tout simplement au primat de l�appareil th��tral. Les auteurs-acteurs qui comprenaient bien leur public et accordaient une grande importance � la r�ception mirent en sc�ne des personnages tir�s des contes populaires et de la litt�rature orale et �crite. Les th�mes s�inspiraient souvent du quotidien, des f�eries et des contes. Les Mille et Une Nuits et Les aventures de Djeha, un personnage populaire arabe, constituaient parfois des �l�mentscl�s du spectacle. La premi�re pi�ce alg�rienne en arabe �dialectal � d�crivait les exploits et les ruses d�un personnage l�gendaire, Djeha, tr�s appr�ci� dans les milieux populaires. Les pi�ces ob�issaient fondamentalement, sur le plan de l�agencement, � la structure th��trale de type europ�en, mais se caract�risaient souvent par un fonctionnement circulaire, lieu du conte populaire, qui mettait �galement en �uvre le fantastique et le merveilleux. D�coup�es en actes (de un � cinq), les pi�ces reprenaient souvent des th�mes et des situations puis�s dans l�univers du conte populaire. Les redondances, la forme en spirale, la primaut� du verbe sur le jeu, l�importance du conteur, l�usage d�accessoires simples (la canne par exemple) �taient autant d��l�ments qui investissaient le spectacle th��tral. C��tait un th��tre du verbe, de la parole. Les com�diens se substituaient souvent au gouwal ou au meddah. Tout reposait sur la verve et l�habilet� de l�acteur et sa capacit� � employer et � ma�triser le jeu de la parole et de la r�plique qui fait mouche. La r�ussite de Ksentini ou de Touri s�expliquent par cette propension � se lancer dans d�interminable improvisations qui mettent � l�aise le public habitu� � ce type de situations, retrouvant ainsi son conteur et la place publique ou le march�. Ainsi, la place publique s�introduisait par effraction dans le th��tre. Le spectateur la transportait dans les salles de spectacles. Le jeu de l�imaginaire est un �l�ment important dans le fonctionnement de la repr�sentation et de la r�ception. Certes, le lieu physique et concret de la sc�ne diff�rait de l�espace ouvert du conteur (meddah ou gouwal), mais une fois, au th��tre, les contingences culturelles et historiques d�terminaient la relation qu�entretenait le spectateur avec la sc�ne qui subissait ainsi de subtiles et de substantielles transformations marqu�es par l�intrusion de l�imaginaire du public. L�acteur de th��tre �voluait dans un espace clos alors que le meddah ou le gouwal jouait dans les souks (march�s) et les places publiques des villes et des villages. La satire sociale investit le parcours narratif du conte. Ainsi, les r�cits de Djeha
d�non�aient la malhonn�tet� des muftis, la cupidit� de certains cadis et des riches, l�hypocrisie et les travers de la soci�t� alg�rienne. De nombreux th�mes et des personnages puis�s dans le fonds populaire se retrouvaient r�investis dans les pi�ces d�Allalou, de Bachetarzi, Ksentini, Touri et m�me Rouiched. Kateb Yacine articulait la structure narrative autour du personnage de Djeha (devenu, pour la circonstance Nuage de Fum�e ou Moh Zitoun) qui se transformait radicalement sur sc�ne et qui devenait le centre d��v�nements actuels. Cette association de deux formes apparemment antith�tiques marquait la repr�sentation artistique et litt�raire alg�rienne. Kateb Yacine, Abdelkader Alloula, Ould-Abderrahmane Kaki et Slimane B�na�ssa repr�sentent largement ce courant qui reprend volontairement certains �l�ments de la culture populaire. Ainsi, ils donnaient naissance � une autre th��tralit�, � une autre forme de th��tre mariant �tradition et �modernit�. Kateb Yacine qui faisait appel � Djeha, tentait de briser le �quatri�me mur�, de d�multiplier les espaces et les temps en fragmentant le r�cit et de provoquer une relation tout � fait productive avec le public (de nombreuses repr�sentations de ses pi�ces furent donn�es en plein air). Abdelkader Alloula introduisait le gouwal (conteur) tout en reproduisant sur sc�ne, avec ses limites, l�organisation concr�te de la halqa (cercle) qui se trouvait prisonni�re de l�espace sc�nique conventionnel. Nous pouvons citer quatre pi�ces qui allaient dans le sens de cette originale exp�rience : Homk S�lim, Legoual, Lejouad et Litham. Slimane B�na�ssa se lan�ait dans d�extraordinaires jeux avec une parole qui mettait en �uvre l�organisation de l�espace et les diff�rents mouvements des personnages et qui construisait graduellement le discours th��tral. Ould- Abderrahmane Kaki c�l�brait un heureux mariage, Brecht et la culture populaire (Le porteur d�eau et les trois marabouts). Le verbe donnait � voir l�image et fa�onnait les diff�rents niveaux sc�niques et les r�gles g�om�triques et sc�nographiques. Le temps mythique, celui du conte, agitait les contours d�instances temporelles actuelles, concr�tes et se conjuguait avec des espaces souvent pr�cis�s, d�termin�s par l�auteur et le metteur en sc�ne. La d�multiplication des temps et des espaces et la pr�sence du merveilleux et du fantastique apportaient aux pi�ces une dimension po�tique et engendrait un morcellement du parcours narratif. Les premi�res exp�riences alg�riennes investissaient leurs personnages et les situations mythiques d�un contenu puis� dans la culture de l�ordinaire. Allalou mettait en sc�ne des pi�ces tir�es des Mille et Une Nuits, mais reprenaient surtout les r�cits de ce chef d��uvre tels que pris en charge par l�imaginaire populaire. Dans ses pi�ces Aboul Hassan El- Moughafal ( Le dormeur �veill�), El- Khalifa wa Essayad (Le calife et le p�cheur), Hallaq Gharnata (Le Barbier de Grenade) et Antar Lehcha�chi (Antar, le fumeur de kif), il employait certes le sch�ma d�organisation conventionnel (d�coupage en actes, entr�es et sorties des com�diens, construction d�un d�cor, costumes�), mais conservait les personnages, les situations et les instances spatio-temporelles. Il �corchait quelque peu les noms des personnages (Haroun er Rachid devint Qaroun er Rachiq) et renversait les r�les : Antar connu pour son courage l�gendaire et sa passion amoureuse se transformait, par la gr�ce de Allalou, en un homme craintif, indigne et peu fr�quentable. La l�gende et l�histoire se voyaient subverties et investies d�un nouveau contenu et d�une nouvelle structure. �Tradition� et �modernit� se chevauchaient et dialoguaient dans une sorte d�univers de glace. Le discours originel laissait place � une transmutation dramatique qui mettait l�une � c�t� de l�autre deux conceptions du monde et de l��criture dramatique. Cette transmutation des signes op�rait un surinvestissement du sens et mettait en mouvement un geste double, mais paradoxalement concourant � la mise en �uvre d�une unit� discursive. Ce nouveau mode d��criture qui s�duisait souvent le large public se mettait paradoxalement au service d�une structure externe ou exog�ne qui imposait sa primaut� au niveau de la repr�sentation d�finitive. Les signes portaient et produisaient un syst�me de repr�sentation engendrant une sorte d�ambivalence discursive. Plusieurs auteurs utilisaient des r�cits et des histoires puis�s dans le patrimoine litt�raire. Ce n��taient, certes, pas tous les com�diens qui s�inspiraient explicitement de la culture populaire, mais des �l�ments tir�s de la culture populaire marquaient de tr�s nombreux textes dramatiques. Il y a des auteurs qui veulent r�utiliser les anciennes formes dramatiques (la halqa, le gouwal, le meddah, les a�ssaoua ou jeu de transes�). Ainsi nous retrouvons dans le th��tre en Alg�rie des personnages et des situations tir�s des Mille et Une Nuits et des contes populaires. Djeha, devenu Moh Zitoun chez Kateb Yacine, est tr�s r�employ� r�employ� dans le th��tre. Actuellement, les auteurs arabes et africains s�int�ressent s�rieusement � la r�adaptation des formes populaires. Les derni�res productions alg�riennes sont souvent ponctu�es par de fr�quents appels � l�histoire ancienne et aux diff�rentes structures dramatiques nationales. La pi�ce du Th��tre r�gional de Constantine (TRC), Def el-goul oual bendir (chauffe la parole), de Tayeb D�himi, transpose un certain nombre de formes anciennes (le gouwal, le meddah, les a�ssaoua, le boughandja�) sur une sc�ne et un espace clos qui surd�terminent les signes de la repr�sentation et les fait mouvoir dans une structure conventionnelle. H�mida Layachi, auteur, com�dien, metteur en sc�ne et journaliste, r�ussit dans ses travaux � provoquer la mise en �uvre d�une articulation pertinente d�une parole puis�e dans le fonds po�tique de l�Ouest alg�rien et un jeu faisant appel � l�expression corporelle et visuelle. Deux modes de repr�sentation se m�lent et fabriquent une image syncr�tique qui, parfois, met face � face deux syst�mes de signes singuliers mais qui finissent par contribuer � la mise en �uvre du sens global et � la d�finition du discours global. La mise en sc�ne, espace o� se cristallisent diff�rentes instances discursives particuli�res, se nourrit d�une ambivalence et d�une dualit� spectaculaire qui, paradoxalement, produit un discours th��tral coh�rent. Peter Brook travaille dans cette direction. C�est ce que faisait �galement Ariane Mnouchkine. Le monologue ou le one man show, tr�s utilis� durant les ann�es 1980 et 1990, ne puise-t-il pas sa s�ve dans la culture populaire, c�est-�-dire dans les r�cits des conteurs ? C�est bien vrai que l�actualit� politique et sociale est l�espace de focalisation de son discours qui d�termine le parcours narratif et met en �uvre diff�rents sens. La mani�re de narrer, le jeu avec l�ellipse, la d�multiplication des entit�s spatiotemporelles et l�usage de certains accessoires rappellent sensiblement les techniques employ�es par les conteurs populaires. Mohamed Fellag r�ussit � associer deux instances narratives qui s�int�grent l�une dans l�autre et produisent un discours satirique qui est la marque fondamentale des r�cits de Djeha. Certes, Fellag reprend les techniques du th��tre conventionnel (clown, costume�), mais articule tout son travail sc�nique autour de la parole qui d�multiplie les espaces et d�termine les options temporelles. Ces com�diens peuvent �voluer sans probl�mes dans des espaces ouverts. D�ailleurs, la performance de l�acteur et le jeu avec le verbe constituent les lieux-cl� de la prestation spectaculaire. Ne serait-il pas possible de revoir ces exp�riences tr�s int�ressantes, poursuivant ainsi la qu�te des pionniers (Allalou, Ksentini, Bachetarzi, Touri), et de les retravailler en fonction du public d�aujourd�hui qui pourrait peut-�tre s�y reconna�tre et y retrouver des �l�ments r�siduels d�une performance spectaculaire pas trop �loign�e de ses sch�mes culturels originels ? Ce travail devrait prendre en consid�ration la question de la r�ception et de la posture d�un public qui a fondamentalement �volu� tout en restant s�rieusement marqu� par sa culture originelle. Cette entreprise n�est nullement simple, elle exige l��mergence d�hommes de th��tre comp�tents, � m�me de r�fl�chir aux questions complexes de l��criture dramatique et sc�nique, tenant compte �galement des transformations op�r�es au niveau de la repr�sentation et des techniques th��trales. C�est vrai qu�aujourd�hui, au lieu de r�fl�chir aux exp�riences tr�s riches et tr�s ouvertes d�Alloula, de Kateb Yacine et de Kaki, on continue � tomber dans les pi�ges trop peu fertiles de l�autoc�l�bration, des anath�mes. Le d�ficit culturel et l�absence de background culturel suffisant font le nid de l�insulte et de la pauvret�. Ce travail n�est nullement un retour aux sources, mais une mani�re de retrouver un public en qu�te d�une expression plus proche de ses besoins et de ses pr�occupations. Repenser l�espace, le temps et l��criture dramaturgique autrement, c�est-�-dire, en construisant un univers pouvant �tre admis par le spectateur d�aujourd�hui. Cette op�ration de �remise � flots� de ce type de jeux est souvent le r�sultat d�une r�flexion th�orique prenant comme lieu d�interrogation et d�investigation les diff�rentes strates de la repr�sentation dite classique jug�e trop herm�tique et statique. Ainsi, les dramaturges investissent les signes de la repr�sentation populaire pour les mettre en accord avec le syst�me dramatique europ�en. Cette op�ration n�est en fait qu�une sorte de mise en �vidence de signes culturels extraits du substrat culturel populaire appel�s � servir d�espace de l�gitimation du discours th��tral dominant. Ces exp�riences, marqu�es parfois par un parti pris th�orique et les vell�it�s d�une pratique souvent travers�e par le sch�ma brechtien, mettent en question les lourdeurs et les inad�quations du lieu th��tral conventionnel. A. C.


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