Le parti islamiste le MSP (Mouvement de la société pour la paix) tente de réinvestir la scène politico-médiatique à travers son «initiative pour un consensus national», lancée début de l'été dernier et dont il a rendu public le contenu, hier mercredi. Ce «projet» étalé sur douze pages se veut, d'abord, un tremplin pour projeter l'ex-Hamas aux premières loges qu'il avait, volontairement abandonnées en 2012, sur un fatal faux calcul politique ! Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - Au pouvoir, ou plutôt dans le pouvoir de 1995 à 2012, le parti du défunt Mahfoud Nahnah faisait partie de la coalition gouvernementale sous Liamine Zeroual puis sous Abdelaziz Bouteflika que le parti s'empressait de soutenir immédiatement après l'invalidation de la candidature de Nahnah pour les élections présidentielles anticipées du 15 avril 1999. Avec le FLN et le RND, ce parti avait donc toujours servi de base sociale au pouvoir en contrepartie de quotas dans les différentes institutions, notamment dans le gouvernement, le Parlement et dans la haute administration comme le corps des walis , des chefs de daïra etc. Les islamistes du MSP régnaient même sur certains secteurs pendant des années, comme le tourisme, le commerce, le transport avec les résultats et les dégâts que l'on connaît. La politique de «l'entrisme», hissée au rang de doctrine cardinale sous Nahnah permettait au parti islamiste une confortable position dans les arcanes du pouvoir. Le MSP était arrivé jusqu'à détenir pas moins de sept portefeuilles ministériels ce qui, au plan interne, se traduisait par le «placement» de milliers de ses cadres et militants. Difficile, dès lors, de se retrouver, dix-sept ans plus tard, du jour au lendemain, dans l'opposition. D'autant plus difficile que la direction du parti avait, naïvement, misé sur un bref séjour dans le camp des «opposants». En fait, le Hamas Algérie misait sur une chute rapide et inéluctable du régime en Algérie, dans le sillage du déluge qui s'abattait, dès janvier 2011, sur les pays arabes, emportant, avec une facilité déconcertante, les régimes pourtant hermétiques et ultra-policiers de Tunisie, d'Egypte et de Libye. En Tunisie et en Egypte, ce seront les islamistes qui accéderont au pouvoir. Ce qui a donné des «idées» aux nôtres : pour s'y préparer et se donner une nouvelle virginité, le MSP quitte alors l'alliance présidentielle et le gouvernement et se mettra dans une position d'opposant frontal au pouvoir ! Cruelle bourde tactique pour les islamistes algériens car, non seulement le «Printemps arabe» n'est jamais arrivé en Algérie, mais, pis encore, les soutiens escomptés de la part des «frères» tunisiens et égyptiens vireront au cauchemar : Ennahda et «les Frères» seront vite éjectés du pouvoir. Ce qui se traduira, pour le MSP, par une longue traversée du désert, avec, comme conséquence immédiate, une véritable saignée de cadres et de militants. Comprenant bien sa douleur, l'actuelle direction du MSP avait d'ailleurs commencé à rectifier le tir depuis plus de deux ans. Prenant ses distances avec le groupe de l'opposition radicale à Bouteflika, dit le groupe de Zeralda, le parti de Abderrazak Makri adoucit de manière significative son discours vis-à-vis du pouvoir. Des négociations avaient même été entamées à l'occasion des législatives de mai 2017 en vue d'un retour au sein de la majorité présidentielle. Partie remise ? Ce n'est pas à écarter. C'est en tout cas ce que peut cacher, comme objectif, «l'initiative» en cours. En gros, l'initiative propose «un consensus» autour d'un candidat aux présidentielles de 2019. Ce que, d'emblée, en fait, au plan politique, un projet mort-né , les partis du pouvoir ayant déjà tranché la question. Le FLN, le RND, le TAJ pour ne citer que ceux-là se sont en effet prononcés pour un cinquième mandat pour Bouteflika. L'on voit mal, par ailleurs, les autres partis d'opposition soutenir un «candidat consensuel» proposé par le MSP. Du moins, les plus importants d'entre eux. Le MSP, qui a consacré tout l'été pour rencontrer tous ces partis autour de «son» initiative, sait, en réalité à quoi s'en tenir. En proposant «une candidature consensuelle» pour la présidentielle, il est clair qu'il ne sera que le candidat du parti. Makri , bien évidemment. Quant à «l'initiative», elle est, d'abord destinée à garantir une présence politique et médiatique au parti, quitte, d'ailleurs, par exemple, à en revoir le contenu de manière substantielle. Le document du MSP, revu et corrigé, reprend, intégralement, la mise en garde que lui avait lancé Gaïd Salah concernant le rôle de l'armée… K. A.