En initiant un dialogue avec le pouvoir, Abderrazak Makri rompt avec sa politique de rupture qui l'avait porté à la tête du MSP. A l'issue de deux jours de réunion, l'instance décisionnelle du MSP a avalisé la nouvelle ligne politique de son président et entériné l'initiative de dialogue avec le pouvoir. C'est ce qu'on appelle un virage à 180 degrés. Le président du MSP, Abderrazak Makri, qui avait fait de la rupture avec le pouvoir sa ligne directrice, a décidé de faire machine arrière. Dans un communiqué diffusé à l'issue de deux jours de réunion, le majliss echoura, l'instance décisionnelle, a avalisé la nouvelle ligne politique de son président et entériné l'initiative de dialogue avec le pouvoir. Fronde au MSP Cette décision intervient au moment où le président du parti est confronté à un début de fronde contre sa politique qui risquait de mettre en péril sa présidence. Bouguerra Soltani, ancien président du parti et ex-ministre avait attaqué frontalement la politique de son successeur lors de son passage dans l'émission dominicale de la chaîne KBC, «Foutour El Sabah». L'ancien ministre d'Etat sans portefeuille de Bouteflika avait carrément menacé de reprendre les rênes du parti si son président persistait «dans l'opposition gratuite au pouvoir». Pour d'anciens cadres du parti, la sortie médiatique de Soltani n'est pas fortuite ; elle est «télécommandée par en haut». «Le pouvoir a décidé de siffler la fin de la récréation au sein du MSP et d'activer ses hommes au sein de la formation créée par Nahnah.» «Le MSP est coincé par ses nombreuses affaires, détaille un ancien cadre du MSP sous le couvert d'anonymat. Beaucoup d'entre eux ont prospéré avec ce régime et sont condamnés à le servir.» Dans ce face-à-face qui oppose les tenants d'une ligne de rupture à ceux d'une politique d'entrisme tel qu'initiée par Mahfoud Nahnah se cache en réalité la question de l'accointance avec le pouvoir. L'arrivée de Makri à la tête du MSP avait été perçue comme un tournant stratégique pour la formation islamique, au moment où son image était ternie par sa participation à une Alliance présidentielle avec le FLN et le RND, dont le seul but était une allégeance au président Bouteflika. «Désormais, notre action s'inscrit dans l'opposition. Pas question de revenir au gouvernement sans victoire électorale ni de soutenir un programme politique et économique qui n'aura pas été discuté en toute transparence avec des partenaires crédibles», s'était empressé de déclarer le nouveau patron du parti, qui avait poussé l'outrecuidance jusqu'à se positionner dans les rangs des boycotteurs lors de la présidentielle, avec notamment le RCD. Le pouvoir avait traité par le mépris ce désir d'indépendance. Il avait cru pouvoir s'appuyer sur TAJ, le parti d'Amar Ghoul, pour aspirer les militants et siphonner l'électorat du MSP. Mais aujourd'hui, il y a urgence. S'il a cru être en mesure de s'appuyer sur l'initiative du FFS et son «consensus national» qui n'arrive pas à trouver preneur, le pouvoir est préoccupé par les attaques à répétition de la Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique (CNLTD). La CNLTD, qui n'hésite pas à demander le départ du Président et la tenue d'une présidentielle anticipée, complique un peu plus la fin du mandat de Bouteflika. «En poussant le MSP à changer de politique, elle espère provoquer l'implosion de la CNLTD, analyse un ancien ministre. Le pouvoir pense que les partis et personnalités politiques qui composent la Coordination vont se sentir poignardés dans le dos par Makri.»