Le secrétaire général du Front de libération nationale, Djamel Ould-Abbès, a reçu, hier, au siège national du parti à Hydra, la direction du parti islamiste le Mouvement de la société pour la paix conduite par son président, Abderrezak Makri. Cette rencontre, à laquelle ont pris part des membres du bureau politique du FLN, sera l'occasion au patron de l'ex-parti unique de réitérer ses «fortes réserves» par rapport à l'initiative du MSP dont c'était l'objet. Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - Naturellement, il était très clair, dès le départ, que le parti présidentiel ne pouvait adhérer à une initiative qui appelle à «un consensus national», à une «transition démocratique », à une « intervention de l'armée» dans ce processus, etc. «Nous les avons reçus et écoutés. Et nous leur avons clairement exprimé nos réserves sur certains points, essentiellement la transition ou alors le rôle de l'armée», dira, en substance, Djamel Ould-Abbès, à l'issue de ce sommet. Les deux parties s'accordent à dire que «le dialogue était franc». Dans son rôle de parti de l'opposition, l'ex-Hamas estimera que «l'Algérie vit une crise» qu'il déclinera sur quatre volets, à savoir «économique, politique, social et identitaire». Makri dira, à cet effet, «qu'au moins, sur le volet économique, nous sommes d'accord». Il estimera également qu'avec le FLN, son parti ne diverge que politiquement. «Notre seul différend avec le FLN est politique. Sinon, nous partageons beaucoup de choses avec ce parti, notamment les valeurs de Novembre et le nationalisme.» Mais, politiquement, ce n'est pas peu tout de même. «La maison du FLN est ouverte à tous les partis algériens. Nous avons déjà pas moins de 35 partis qui siègent à l'Assemblée et le FLN respecte y compris les partis qui ne comptent aucun élu. C'est notre devoir en tant que parti majoritaire.» Cette phrase de Ould-Abbès est en soi une réponse, un «refus diplomatique» à l'initiative de son invité. Autrement dit, si le FLN a accepté de recevoir la délégation de l'ex-Hamas, ce n'était que par correction. D'ailleurs, quelques piques seront ensuite lancées en direction de cet ancien partenaire de la coalition gouvernementale. Quand Makri précisera que le MSP fait le constat de l'échec de tous les gouvernements successifs de ces vingt dernières années, Ould-Abbès lui rappellera que, tout de même, le MSP en a fait parie de 1995 à 2012 ! Soit quatre ans sous Zeroual et, surtout, treize années complètes sous Bouteflika ! Pour rappel, en effet, le MSP ne s'était retiré du gouvernement qu'en 2012, sur un faux calcul inspiré par «le printemps arabe» qui avait consacré l'arrivée des islamistes au pouvoir en Tunisie et en Egypte à la suite de la chute des régimes en place. Sauf que, dans ces pays-là, les islamistes étaient dans l'opposition, voire dans la clandestinité avant l'avènement du «printemps arabe» dévastateur. Le MSP se retire donc du pouvoir dans l'espoir de se refaire une virginité et dans l'attente d'une tempête «à la tunisienne» qui ne viendra jamais. Le FLN que préside Abdelaziz Bouteflika signifie donc une fin de non-recevoir à l'initiative du MSP . «Nous recevons tous les partis et nous en rendons systématiquement compte au Président Bouteflika qui est le président du parti», rappellera d'ailleurs Ould-Abbès. «Je tiens à rappeler que, sur cette question des présidentielles, nous avons déjà, ici même, et à deux reprises, en mars et en avril, exprimé clairement la position des 700 000 militants du FLN qui appelle Bouteflika à poursuivre sa mission à la tête du pays.» Pour Makri, cette question est prématurée, par contre. «Le FLN est dans son droit de soutenir la candidature du Président. Mais les autres partis ne sont pas obligés d'adopter cette même position. Notre initiative a pour objectif d'aboutir à un consensus national et nous n'avons pas encore tranché sur un candidat.» Comme d'habitude, Ould-Abbès insistera sur un point : «Chez le FLN, et son secrétaire général surtout, il y a une ligne rouge à ne jamais dépasser : c'est le Président Bouteflika.» Cela dit, il y a un autre différend massif entre les deux parties. Il s'agit du rôle de l'armée. Pour le SG du FLN, «le rôle de l'armée est clairement défini par la Constitution. C'est la défense de l'intégrité territoriale de l'Algérie et de son peuple. C'est la défense de la nation. D'ailleurs, le Président Bouteflika a eu à le rappeler dans un récent message à la nation». Le président du MSP aura certainement à entendre des réponses similaires la semaine prochaine à l'occasion d'une rencontre prévue avec le RND de Ahmed Ouyahia. Ceci étant, il va de soi que l'objectif réel du patron du MSP n'a jamais été «le consensus national», mais ailleurs. Fidèles à leurs vieilles traditions initiées par leur chef spirituel, Mahfoud Nahnah, les «frères musulmans algériens» crée l'événement juste pour qu'on parle d'eux. Surtout à l'approche d'événements majeurs, comme les présidentielles. A coup sûr, Abderrezak Makri les prépare en tant que candidat... K. A.