Si l�on en croit les institutions financi�res internationales qui font d�ailleurs, �cho aux �conomistes lib�raux, la mondialisation de l��conomie procure beaucoup de bienfaits. Toutes les �conomies nationales en tirent profit et l�ouverture des march�s et le libre-�change g�n�ralis�, la lib�ralisation financi�re et les mouvements de capitaux qu�elle permet ont �t� � l�origine de l�accroissement des richesses mondiales et le rattrapage des retards dans les pays les plus pauvres se r�alise chaque jour un peu plus. Ces analyses et les conclusions qu�elles veulent mettre en relief sont-elles justes et se v�rifient-elles empiriquement ? C�est la Banque mondiale elle-m�me, qui, sur la base d�une �tude qu�elle a r�alis�e, r�vise quelque peu sa position et r�v�le que le bilan de la mondialisation de l��conomie n�est pas aussi positif qu�il ait pu appara�tre. L��tude de la Banque mondiale souligne m�me qu�il est mauvais par certains endroits. Il est vrai que certains progr�s ont �t� ind�niables. Ainsi dans le domaine de la sant� et de la qualit� de vie, l�esp�rance de vie a gagn� dix ans dans les pays d�velopp�s (69 ans en 1960 ; 79 ans en 2007), elle a progress� de 21 ans dans les pays en d�veloppement (45 ans en 1960, 66 ans en 2007). M�me en Afrique subsaharienne, tr�s affect�e par le sida, l�esp�rance de vie est pass�e de 41 ans en 1960 � 50 ans en 2007. Dans le domaine de la cr�ation de richesses, le PIB produit par un habitant de la plan�te est pass� de 2 409 dollars par an en moyenne en 1960 � 5 964 dollars en 2007. Dans les pays pauvres, il a �galement progress� passant de 236 dollars en 1960 � 415 dollars en 2007 mais ce sont surtout les pays d�Asie qui ont tir� leur �pingle du jeu de la mondialisation. Deux exemples sont suffisamment parlants � ce titre : la Cor�e du Sud et la Chine. En Cor�e du Sud, le revenu par habitant s��levait en 1960 � 13% de celui des pays riches. Il d�passe en 2007 les 50%. En Chine, ce revenu par habitant repr�sentait 1% de celui des pays riches en 1960. Il est de 6% aujourd�hui. Mais les �conomistes sp�cialistes de l�Asie nous rappellent : �Ce n�est pas en appliquant la vulgate lib�rale � la mode depuis trente ans que les pays asiatiques ont r�ussi leur d�collage. Ils lui ont r�sist� au contraire tout en sachant tirer profit de la lib�ralisation des �changes et de la mondialisation. Ils ont su prot�ger leurs march�s et leurs entreprises en appliquant des politiques industrielles volontaristes selon les pr�ceptes mercantilistes les plus traditionnels.� En dehors de l�Asie de l�Est, les r�ussites �conomiques restent bien rares. Le Br�sil, par exemple, a vu son niveau de vie relatif r�gresser. En 1960, chaque Br�silien gagnait en moyenne 17% de ce que gagnait un habitant des pays riches. Ce ratio est tomb� � 15% en 2007. Le Mexique est un autre exemple de r�gression du niveau de vie de ses habitants. En 1980, un Mexicain touchait environ 30% en moyenne du revenu d�un habitant des pays riches. En 2007, il ne touchait plus que 27%. En Afrique, le constat de la r�gression est encore plus net. Au Nigeria, par exemple (147 millions d�habitants, le g�ant de l�Afrique), chaque habitant disposait en 1960 de 3,5% en moyenne du revenu d�un habitant des pays riches. En 2007, il ne touche plus que 1,5% malgr� l�envol�e des prix du p�trole. Dans les aspects positifs de la mondialisation, on peut noter aussi que l�ill�trisme a nettement recul� dans le monde et notamment dans les pays du Sud. Ces points positifs ayant �t� rappel�s, il reste bien que la mondialisation lib�rale de l��conomie affiche un bilan plut�t mauvais. En privil�giant � l�exc�s la libert� des flux commerciaux et financiers, cette mondialisation telle qu�elle est intervenue depuis une quarantaine d�ann�es a accru les in�galit�s entre les pays les plus riches et les plus pauvres et entre les habitants de chacun de ces groupes de pays comme nous l�avons montr�. En quarante ans, le commerce mondial a explos�. En 1970, les importations et les exportations repr�sentaient quelque 20% du PIB des diff�rents pays. En 2007, ce chiffre est pass� � 51% en moyenne mondiale. Et c�est dans les pays les plus pauvres que cette proportion a le plus progress�. Mais ce processus n�a pas acc�l�r� la croissance des revenus des habitants de la plan�te. Et il faut surtout souligner que l��cart qui caract�rise le revenu par habitant entre les pays riches et les pays pauvres a tripl� entre 1960 et 2007. Cet �cart est le suivant : en 1960 le revenu par habitant des pays riches repr�sentait trente fois celui des pays pauvres. En 2007, il repr�sente 89 fois. Ces �carts colossaux de niveau de revenus au moment m�me o� les niveaux de vie se sont rapproch�s accentuent la pression migratoire et ses innombrables drames humains. Le malaise est �galement profond dans les pays riches o� les pauvres s�appauvrissent et les riches s�enrichissent. L�Etat providence et sa protection sociale sont remis en cause au nom de la comp�titivit� et de la rentabilit� ; la concurrence sur les salaires est intense et produit une forte pression � la baisse avec comme cons�quence une sous-consommation des salari�s, une crise des d�bouch�s et un laxisme dans l�offre de cr�dit aux m�nages qui se surendettent. La mondialisation a enfin produit un d�veloppement sans pr�c�dent de l�urbanisation : en 1960, 33% de la population de la plan�te vivaient dans les villes, en 2007, 50%. Et c�est surtout dans les pays du Sud que cette urbanisation avec tous ses probl�mes s�est le plus d�velopp�e : en 1960 24% de la population vivait en zone urbaine et en 2007, 44%. Et la Banque mondiale pr�voit qu�en 2025, toutes les plus grandes villes du monde se situeront dans les pays du Sud � l�exception de Tokyo et New York. Il faut enfin souligner que la mondialisation a soumis l�espace national o� la r�gulation politique et la redistribution s�exer�aient � l�espace �conomique plan�taire qui impose sa logique de fonctionnement non contr�l�e. Les crises financi�re et �conomique actuelles en sont le signe r�v�lateur le plus fort.