Le secteur algérien des hydrocarbures se contracte à vue d'œil et menace les engagements commerciaux de Sonatrach. La baisse de la production est due à la mauvaise gestion des gisements existants et le retard accusé dans le développement des nouvelles découvertes. Depuis quelques semaines, Sonatrach ainsi que le ministère de l'Energie mènent campagne pour expliquer que les difficultés rencontrées pour honorer les engagements commerciaux de la compagnie nationale des hydrocarbures sont dues à la hausse de la consommation énergétique interne. Or, les rapports de l'Office national des statistiques (ONS) et ceux de la Banque d'Algérie (BA) et de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), ainsi que le bilan énergétique national 2017, sont têtus et indiquent plutôt une forte baisse de la production nationale des hydrocarbures. En effet, Sonatrach replonge à nouveau dans le déclin et la baisse de la production menace désormais ses engagements commerciaux. Après avoir stoppé le déclin de la production en 2015 et réalisé une appréciable croissance en 2016 (+7,7%), les deux années suivantes ont vu la production de la compagnie nationale baisser de 6% puis de 11%, respectivement en 2017 et 2018. Et pour cause. Beaucoup de spécialistes du secteur affirment que l'exportation d'une partie des quantités destinées à être réinjectées dans les gisements afin de maintenir la pression qui permet d'extraire les hydrocarbures – un détournement effectué pour honorer les contrats en cours – a fini par massacrer une partie de ces gisements comme celui de Rhourde El Baguel pour le pétrole et Hassi R'mel pour le gaz. En s'alarmant de l'augmentation de la consommation nationale de gaz et ses conséquences sur les engagements commerciaux de l'Algérie, le ministre de l'Energie, Mustapha Guitouni, tout comme le P-dg de Sonatrach balancent des chiffres sommaires et parfois contradictoires qui sont démentis par les rapports officiels dont certains sont produits par le ministère de l'Energie lui-même, à l'image du bilan énergétique national 2017. Ce bilan montre que la production brute de gaz naturel était de 188,7 milliards de mètres cubes en 2017 : «Sur les 188,7 milliards de mètres cubes extraits en 2017, 92,1 milliards de mètres cubes ont été utilisés en amont : 66,9 milliards réinjectés, 2,9 milliards ont été torchés et 22,2 milliards de mètres cubes pour d'autres utilisations comme l'alimentation des turbines génératrices d'électricité pour les besoins des sites de production. Les 96 milliards de mètres cubes restants sont une production destinée à être commercialisée en Algérie ou à exporter. Les exportations de gaz naturel ont baissé comparativement à 2016 pour atteindre 37,5 milliards de mètres cubes. Quant à la consommation des ménages qui a atteint 5,3 millions en 2017, soit 345 000 nouveaux abonnés par rapport à 2016, elle était de 15,3 milliards de mètres cubes (+7,9% par rapport à 2016), soit deux tiers de la consommation locale du gaz naturel (23,3 milliards de mètres cubes). Le reste du gaz naturel est transformé dans les unités du GNL (17,1 milliards de mètres cubes) et dans les centrales électriques (18,5 milliards de mètres cubes).» Sur la base de ce bilan, on ne peut déduire que c'est la consommation interne (elle n'a augmenté que de 4% en 2018 selon l'ONS) qui menace les exportations des hydrocarbures, mais bel et bien la baisse de la production (-11%). Le rythme de contraction du secteur des hydrocarbures est plus fort que celui de l'augmentation de la consommation. D'autant que les nouvelles découvertes réalisées en 2016 (33) et d'autres qui ont été réalisées auparavant n'ont pas encore été développées. L. H.