Les appels à des manifestations contre le cinquième mandat ont trouvé écho dans plusieurs régions d'Algérie. La participation citoyenne était cependant relative, variant d'une wilaya à une autre. Abla Chérif - Alger (Le Soir) - Par groupes de centaines, des Algériens sont donc sortis dans les rues en réponse à des appels à réagir contre le nouveau mandat que brigue Abdelaziz Bouteflika. Les initiateurs ou auteurs de ce «projet de rue» restent toutefois inconnus à ce jour. Beaucoup y avaient vu la main des islamistes en raison du jour et du moment choisi, un vendredi après la prière hebdomadaire, ce qui avait soulevé certaines réticences auprès de nombreux citoyens craignant la manipulation. Des appels au calme et à éviter toute provocation ont été également lancés par plusieurs responsables et personnalités publiques inquiètes de la tournure que pourraient prendre les évènements. Hier, et dans plusieurs wilayas du pays, les citoyens n'ont pas attendu l'heure programmée (la fin de la prière du vendredi) pour descendre dans les rues. A Tiaret, à Guelma et Jijel, les manifestants semblaient bien moins nombreux qu'ailleurs. A Béjaïa, Mostaganem, Tizi-Ouzou, Annaba, la foule était beaucoup plus nombreuse pouvant atteindre quelquefois les deux mille personnes, selon les correspondants de presse présents sur place. Tous les regards étaient cependant braqués sur Alger. Une réelle tension était perceptible dès les premières heures de la matinée. Un important dispositif des forces de l'ordre s'est déployé sur les grands axes d'Alger-Centre mais aussi dans les quartiers jugés sensibles. Des camions de police étaient déjà sur place bien avant 10 h à Bab-el-Oued où la population semblait bien plus occupée à vaquer à ses occupations. Ici, les achats de dernière minute se font normalement même si certains avouent avoir fait le plus gros des provisions la veille ou quelques jours auparavant en raison de la crainte suscitée par les appels anonymes lancés sur Facebook. «Nous resterons ouverts jusqu'à la prière du vendredi, et qu'ils ne comptent pas sur nous pour envoyer nos enfants se faire massacrer, on a payé un prix lourd en 1988», explique un épicier. «Ce que l'on craint c'est que cette jeune génération qui ignore tout de ce que nous avons traversé fonce tête baissée.» Place des Martyrs, Audin, Didouche-Mourad: les lieux sont quadrillés. Des camions de la police se sont, là aussi, positionnés dès les premières heures de la matinée. Des agents en civil et munis de talkies walkies sillonnent les rues où règne une ambiance particulière. Tout est vide, les citoyens sont très peu nombreux. On dit à ce moment qu'il est encore trop tôt. Vendredi est un jour de repos et la tendance est à la grasse matinée. Plusieurs magasins qui avaient pour habitude d'ouvrir la mi-journée ont cependant gardé leurs rideaux fermés au centre-ville. A la place des Martyrs, l'activité est moins dense qu'à l'habitude. On commente à voix basse les vidéos qui circulent sur Facebook et les photos montrant les marches qui se déroulent au même moment dans d'autres régions du pays. Pas d'avis sur la question, dans les discussions, on insiste surtout sur le caractère pacifique des protestations en cours. Avenue de l'ALN : des forces anti-émeutes sont stationnées tout le long de la route. Sans doute des renforts prêts à l'intervention en cas de débordement. Le plus gros du dispositif était cependant visible au 1er-Mai où l'on a vu les CRS, bouclier et matraque en main, resserrer nerveusement les rangs peu de temps après la fin de la prière du vendredi. L'appel n'est pas resté sans réponse. Bab-el-Oued a finalement bel et bien manifesté dans le calme le plus absolu. Il en était de même à la place du 1er-Mai. Ici, les manifestants se sont rassemblés par petits groupes qui n'ont cessé de grossir aux alentours de 15h30. Des jeunes en motos sortis d'on ne sait où débarquent. Le même scénario se déroule au centre-ville où des centaines de personnes défilent. Les slogans sont hostiles au cinquième mandat. Des renforts de CRS arrivent mais observent les évènements sans réagir. A. C.