L'ancien responsable de la DGSN fait visiblement l'objet d'une attention toute particulière de la part de la justice qui l'a auditionné deux fois, et pour deux affaires différentes, au courant de la semaine écoulée. Une troisième comparution, liée à l'affaire de la cocaïne, n'est pas à écarter, soutiennent des sources proches du dossier. Abla Chérif - Alger (Le Soir) - Une phrase lancée par un avocat au moment de la sortie de Abdelghani Hamel résume, en bien des points, la situation : «Il est sorti la tête haute, mais ses déboires ne font que commencer.» Explications : comme Ouyahia, l'homme qui comparaissait ce jeudi devant le juge d'instruction de la 9e chambre du pôle pénal a pu entrer et quitter l'enceinte du bâtiment sans avoir à faire face à la foule en colère qui l'attendait depuis tôt le matin. L'important dispositif mis en place avait pour mission de contenir curieux et manifestants et lui a, de ce fait, épargné toute scène dégradante, humiliante, que les frères Kouninef et même Ali Haddad avait eu à subir avant lui. Mais le «privilège», si c'en est un, ne semble changer en rien le fond de l'affaire. Le jeu d'équilibre qui avait permis de laisser planer un long statu quo sur le dossier El Hamel est désormais rompu, et ses tentatives de nier, d'effacer ses déclarations jetant le doute sur les services chargés de l'enquête autour des 701 kg de cocaïne saisis n'ont pu également le mettre à l'abri de l'offensive anti-corruption lancée par Gaïd Salah. Sa comparution, ce jeudi, au tribunal d'Alger n'a d'autre objectif que de mettre au clair ses propos. Dans la forme, elle vient en réponse à une demande introduite par la défense de Kamel Chikhi, alias Kamel El Bouchi, inculpé en juin et en attente d'un procès où il comparaîtra comme principal accusé dans l'affaire de la cocaïne. Il y a neuf mois, ses avocats ont, en effet, déposé auprès du magistrat en charge de l'enquête une requête démontrant l'importance du témoignage du général major et cette dernière porte sur quatre points essentiels. Ils ont trait à la nature des informations que celui-ci a à remettre à la justice, puisqu'il a affirmé publiquement être en possession d'éléments qu'il destinait aux instances judiciaires, les raisons qui l'ont amené à douter des services chargés de mener l'enquête, du moment qu'il avait déclaré que «pour lutter contre la corruption il faut être soi-même propre», sa relation avec Kamel Chikhi et enfin la relation de ce dernier avec les proches de Hamel. Durant deux heures et demie, il a donc été écouté sur toutes ces questions avant de reprendre, «libre», le chemin de la sortie. «Le juge d'instruction peut inculper des témoins s'il le juge nécessaire», explique un avocat sur place, mais dans le cas présent, l'inculpation ne s'est pas produite. Une question revenait par contre souvent parmi les robes noires attirées par l'événement : l'ancien patron de la DGSN est-il resté sur la version livrée quelques jours avant sa convocation. Dans une déclaration faite le 14 avril dernier au journal électronique TSA, Hamel revenait de manière spectaculaire sur ses premières déclarations niant avoir affirmé détenir des dossiers sur l'affaire de la cocaïne. En a-t-il fait de même lors de son passage devant la neuvième chambre du pôle pénal ? L'hypothèse peut-être retenue, mais le temps passé avec le magistrat instructeur laisse supposer le contraire. Rien ne dit également que le témoignage ait été clôturé, soutiennent des sources proches du dossier, les explications recherchées sont d'une grande importance et une nouvelle convocation du concerné n'est pas à écarter. L'opinion devrait être fixée dans quelques jours. L'audition de Hamel devrait, en effet, normalement être consignée dans un procès-verbal auquel la défense d'El Bouchi peut accéder. Dans un cas extrême (informations sensibles), le magistrat peut, toutefois, refuser de le délivrer. Pour le moment, tout laisse penser le contraire. Dans un de ses discours, le chef d'état-major a clairement annoncé son intention de procéder à la réouverture des gros dossiers n'ayant pas livré tous leurs secrets. L'affaire de la cocaïne en fait partie. Jusque-là, la justice semble avoir peiné à faire toute la lumière sur le dossier. Depuis sa mise en détention, en juin dernier, Kamel Chikhi a été auditionné quatre fois par le juge d'instruction, à chaque reprise celui-ci maintient sa version de «victime d'une situation qui le dépasse». Ce qui n'est pas le cas pour la seconde affaire dans laquelle il se trouve impliqué (corruption et foncier) et pour laquelle il comparaîtra d'ailleurs (en procès) le 12 mai prochain. Abdelghani Hamel a fait part de son soutien total à l'opération anti-corruption lancée par Gaïd Salah, laissant perplexe l'opinion informée des divergences existant entre les deux hommes. Amende honorable ou pas, ses nouvelles déclarations ne lui ont pas épargné d'être présent dans la longue liste des hommes ciblés par des enquêtes de justice. A. C.