Qui pourra arrêter le processus révolutionnaire enclenché par les Algériens le 22 février ? Au fil des vendredis, le peuple montre une détermination à toute épreuve, une volonté inébranlable et un attachement sans faille et sans conditions aux objectifs de son mouvement. Karim Aimeur - Alger (Le Soir) - Hier encore, les Algériens sont sortis par millions dans les différentes wilayas du pays pour faire entendre, une nouvelle fois, la 14e depuis le début du mouvement, leurs voix. La mobilisation d'hier était la plus importante depuis le début du mois de Ramadhan. A Alger, malgré toutes les manœuvres du régime de casser le mouvement, des foules impressionnantes ont convergé vers le centre de la capitale. La mobilisation était massive et l'engagement ne souffre aucune remise en cause. La cible principale des manifestants d'hier, depuis le début de la matinée jusqu'à la fin de la marche, était le chef de l'état-major de l'ANP, Ahmed Gaïd Salah, en raison de son attachement à l'élection présidentielle malgré le rejet massif du peuple. L'ampleur de la mobilisation qui, du reste, n'a pas faibli depuis le début du mouvement, est provoquée par le discours de début de semaine de Gaïd Salah qui avait insisté sur l'élection et la nécessité d'installer la commission d'organisation du scrutin. Il y a un sentiment chez les citoyens qu'il y a quelque chose qui ne tourne pas rond, qu'il y a une conspiration contre la révolution. La répression des deux dernières marches des étudiants a également été pour quelque chose dans cette mobilisation grandiose. D'ailleurs, des slogans dénonçant cette répression ont été préparés par les manifestants. Plusieurs dizaines de milliers de manifestants qui ont parcouru la place du 1er-Mai, la rue Hassiba-Ben-Bouali et le boulevard Amirouche, en arrivant en bas de la Grande-Poste, ont décidé de prendre la direction de la place des Martyrs. C'est sous les cris de « koulouha (mangez-la) », adressés à ceux qui ont quadrillé et fermé les marches de la Grande-Poste, qu'ils ont poursuivi la marche. Les centaines de milliers de manifestants qui ont rempli les rues du centre d'Alger, rappelant l'ampleur de la mobilisation des premiers vendredis, ont lancé des slogans contre l'élection présidentielle, totalement rejetée tant que les figures du système sont toujours en place. Le rejet des élections et du pouvoir militaire est exprimé également à travers les pancartes et les banderoles brandies par les citoyens. « Non à l'élection présidentielle qui consacre la continuité du système », lit-on sur une large banderole. « Ni Etat militaire, ni bande mercenaire », lit-on sur une autre alors qu'une autre encore décrète : « Non aux élections de la bande, non à la gouvernance par les chars .» Les manifestants n'ont pas oublié les étudiants qui ont été brutalement réprimés dimanche dernier lors de la marche commémorative de la journée nationale de l'Etudiant et mardi lors de la marche hebdomadaire. Un hommage appuyé a été rendu aux universitaires à côté d'autres slogans contre la police qui les a brutalisés. « Non à la répression, l'intimidation et l'humiliation des enfants du peuple », a-t-on inscrit sur une bannière. Mais l'hommage le plus émouvant est lorsque les milliers de manifestants lançaient en chœur « Hadou toulab machi irhab (ce sont des étudiants et non des terroristes ». Il faut dire que la mobilisation d'hier était la plus importante depuis le début du mois de Ramadhan. K. A.