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La classe politique et les organisations de la société civile réagissent
Discours de Gaïd Salah
Publié dans Le Soir d'Algérie le 01 - 08 - 2019


Réactions recueillies par Salima
Akkouche et Karim Aimeur
Le discours du chef de l'armée, Ahmed Gaïd Salah, qui a rejeté les préalables et les mesures d'apaisement avant l'entame de tout dialogue, insistant sur l'élection présidentielle et réaffirmant que le dialogue doit être axé exclusivement sur cette question, fait réagir classe politique et société civile.
Plusieurs partis estiment que ce discours met un terme à tout processus de dialogue et désavoue, en même temps, le chef de l'Etat qui a pris des engagements publics avec le panel pour concrétiser les mesures d'apaisement, dont la libération des détenus d'opinion et l'allégement du dispositif sécuritaire quadrillant Alger.
Hakim Belahcel, Premier secrétaire du FFS :
«Il faut un climat de confiance et d'apaisement»
«Le FFS réitère toujours son attachement à une solution pacifique et négociée afin d'épargner au pays et au peuple d'autres mésaventures qui peuvent être irréversibles et dangereuses. Le pouvoir, rodé aux pratiques répressives depuis le 22 février, est en train de profiter du chaos occasionné afin de fermer définitivement la parenthèse révolutionnaire.
Il essaye par tous les moyens de sceller le devenir de notre nation. Au FFS, on continue à se battre pour déjouer ces stratégies dévastatrices et persévérer dans notre lutte pacifique afin de faire aboutir les revendications légitimes du peuple. Il faut installer un climat de confiance et d'apaisement avant d'envisager un quelconque dialogue pour sortir définitivement de cette impasse politique et on tient toujours aux préalables qui doivent constituer un socle solide sur lequel on pourra bâtir une vraie alternative démocratique. On restera mobilisés jusqu'à l'instauration d'un Etat de droit et de libertés.»
Mustapha Hadni, coordinateur du PLD :
«Un désaveu pour Bensalah»
«Décidément, l'état-major de l'armée et le chef de l'Etat dont le mandat a expiré le 9 juillet dernier ne sont pas sur la même longueur d'ondes en matière d'approche politique. Il est clair que l'intervention du vice-ministre de la Défense nationale est une réponse cinglante et un désaveu public à Abdelkader Bensalah qui a pris des engagements publics avec ce qui est appelé panel de dialogue et de médiation. Ce dernier est mis dans une posture inconfortable, et par voie de conséquence, il est discrédité de fait. En réalité, l'institution militaire à travers son chef limite le champ d'action à la présidence, et lui rappelle son poids.»
Mohamed Saïd, président du PLJ :
«Il y a une volonté de maintenir le statu quo»
«Le discours du chef d'état-major de l'ANP met un terme aux efforts déployés par la classe politique et la société civile en vue de trouver une solution consensuelle à la crise. C'est une fin de non-recevoir aux engagements publics de Bensalah et de Karim Younès. A eux d'en tirer la conclusion. Le PLJ voit dans cette attitude un élément d'aggravation de la crise qui dénote une volonté de maintien du statu quo. Il appartient à tous les acteurs politiques et sociaux de réagir par une meilleure coordination de leurs efforts en se tenant au côté du Hirak pour éviter au pays de sombrer dans l'irréparable.»
Abdelouahab Fersaoui, président de RAJ :
«Le discours ne contribue pas à l'apaisement»
«Le discours du chef d'état-major de l'ANP est un discours maladroit dans la forme et dans le fond et qui ne contribue pas à l'apaisement. Il reflète la volonté du pouvoir réel, le Commandement de l'armée, d'en finir avec le Hirak et de faire passer sa feuille de route en organisant l'élection présidentielle le plus tôt possible et dont l'objectif principal est de maintenir le système politique. Un objectif qui va à l'encontre de la volonté populaire.
Le chef d'état-major vient de remettre une autre fois en cause les revendications du Hirak qu'il prétend défendre et accompagner. Il désavoue le chef de l'Etat, dont le mandat a expiré, et en même temps, il compromet toute initiative de dialogue. Cela confirme les tiraillements et l'existence de graves divergences au sein du pouvoir.
Cet entêtement ne peut que renforcer la détermination du peuple qui a décidé de prendre son destin en main en continuant la mobilisation pacifique au niveau national. Le Hirak a su et pu déjouer toutes les tentatives machiavéliques du pouvoir. Ce dernier assumera tout seul la responsabilité de tout débordement.»
Saïd Salhi, vice-président de LADDH :
«Un coup de grâce au panel»
«Le discours du chef de l'état-major de l'armée prend à contre-pied le discours de Bensalah, chef de l'Etat qui a déclaré dans son discours précédent que l'armée ne va pas s'immiscer dans le processus du dialogue. Le discours de Gaïd Salah donne aussi le coup de grâce au panel de Karim Younès qui a conditionné son travail à la réalisation des préalables qu'il a avancés, faute de quoi, il allait le dissoudre. Pourtant, lors des discussions au sujet du panel, la première question que j'avais posée, c'était au sujet de la place et du rôle de l'armée dans le processus de médiation pour un dialogue ouvert.
La réponse était que l'armée n'interviendrait pas, et voilà que le panel n'a même pas eu le temps de s'installer que la preuve du contraire a été apportée.»
Abderrahmane Arar, président du forum civil pour le changement :
«Les mesures d'apaisement ne sont pas rejetées»
«Nous sommes en train de suivre de près le processus de dialogue. Nous avons une réunion jeudi pour clarifier notre position. Le dialogue va prendre son chemin. Il y a des messages codés dans le discours qu'on ne peut pas comprendre parce qu'ils sont destinés pour d'autres parties sur la scène politique. Il ne faut pas se précipiter et émettre un jugement négatif sur le discours. A mon avis, ce discours n'est pas un coup d'arrêt au dialogue, il y a une volonté politique de dialogue et le panel de personnalités va le mener jusqu'au bout pour sortir de la crise. Nous attendons la mise en place des conditions de dialogue notamment la libération des détenus, le départ du gouvernement et l'allègement des pressions sur le Hirak. A mon sens, les mesures d'apaisement qu'on a demandées pour le dialogue ne sont pas rejetées. C'est un message politique.»
Lyes Merabet représentant de la dynamique de la société civile :
«Nous ne comprenons pas cette contradiction au sommet de l'état»
«Le discours du général du corps d'armée est clairement un désaveu pour le chef de l'Etat. Nous ne comprenons pas cette situation de contradiction. Le chef d'Etat a déclaré dans son discours du 3 juillet dernier que le panel de dialogue va travailler d'une manière indépendante et ni l'Etat, ni les institutions militaires n'allaient intervenir et que le panel disposera de toutes les conditions nécessaires pour mener à bien sa mission en toute liberté. Nous aurions aimé entendre un discours apaisant, qui accompagne le discours du panel, qui permettra à tout le monde de se réunir autour d'un dialogue qui aboutira à des solutions de sortie de crise pour le pays. Personne ne peut nier qu'il y a un consensus entre le panel et l'ensemble des personnalités nationales et politiques autour des conditions préalables pour entamer le dialogue et pouvoir travailler sereinement et d'une manière responsable avec un esprit de conciliation. Il est question de la libération des jeunes du Hirak arrêtés et du moudjahid Lakhdar Bouregaâ et non pas des personnes impliquées dans des affaires de corruption. Nous ne pouvons pas avancer sous la pression, il ne s'agit pas de chantage ni de la surenchère, mais l'accès à la capitale ne doit pas être interdit. Nous sommes dans un Hirak pacifique, et rien ne justifie un dispositif sécuritaire aussi important. Nous devons être dans un esprit de conciliation et l'intérêt de la nation doit prévaloir pour permettre une sortie de crise, malheureusement, les conditions ne sont pas encore réunies».
Mohcine Belabbes, président du RCD :
«Le seul préalable au dénouement de la crise est le retrait de Gaïd Salah»
«Le vice-ministre de la Défense n'a pas pu se retenir plus d'une semaine pour rappeler qu'il est le seul à la manœuvre. Il vient de révéler et clarifier la mission dont il a chargé ce qui est convenu d'appeler le panel. Ayant déjà fait perdre beaucoup de temps à l'Algérie, il assène, une fois encore, que son seul objectif à travers cette manœuvre est d'installer un Président potiche. Récusant les promesses concédées aux membres enrôlés dans le panel sur une prétendue libération des détenus politiques et d'opinion et autres mesures d'apaisement, le vice-ministre s'en prend aux Algériennes et aux Algériens qui manifestent chaque vendredi pour recouvrer leur souveraineté, libérer la justice et réhabiliter l'institution militaire dans ses missions républicaines. Confirmant qu'il est le commanditaire des condamnations de manifestants en violation des lois de la République et de la Constitution qu'il dit défendre.»
Habib Brahmia, responsable de la communication de jil jadid :
«Il ne peut y avoir de dialogue sans les préalables»
«De toute évidence, les conditions d'un dialogue serein, politique ne sont pas encore réunies, Jil Jadid, fidèle à ses engagements publics, déclinera toute discussion sans préalables des mesures d'apaisement et d'ouverture politique. Les esprits ne sont pas prêts apparemment pour l'instant aux concessions mutuelles. Nous trouvons qu'il est dommage que les pouvoirs publics ne veulent pas aller vers un dialogue sérieux, Jil Jadid était favorable au principe du dialogue du moment qu'il a un préalable pour la libération des détenus du Hirak qui ont soulevé le drapeau amazigh et ainsi que le moudjahid Bouregaâ. Pour Jil Jadid, il ne peut pas y avoir de dialogue sans ces préalables. Il y a une contradiction entre le discours du chef de l'armée et ce qu'a déclaré le chef de l'Etat qui avait donné son accord de principe à satisfaire les préalables notamment concernant les détenus.»
Rassemblement National Démocratique (RND) :
«Le panel de dialogue est tenu de faire de la stabilité des institutions de l'Etat, sa principale mission»
Le parti que dirige Azzedine Mihoubi a réagi, à son tour, via un communiqué rendu public hier mercredi : «Nous avons suivi avec intérêt le discours du chef de corps d'armée Ahmed Gaïd-Salah, vice-ministre de la Défense nationale. Le fait que le chef d'armée félicite le panel de dialogue est une preuve que le dialogue entre les différents acteurs sur la scène politique et sociale est le seul moyen de sortie de crise, pour arriver à constituer une commission chargée de tenir l'élection présidentielle.
De ce fait, le panel de dialogue est tenu de faire de la stabilité des institutions de l'Etat, sa principale mission, et de ne pas se concentrer sur des questions qui ne constituent pas le noyau des réformes espérées d'autant que les revendications populaires seront satisfaites d'une façon graduelle, et le principal objectif ne sera atteint qu'aà travers l'élection d'un président de la République, dont les prérogatives seront de traduire sur le terrain les revendications du peuple. Le Rassemblement national démocratique partage la vision de l'institution militaire qui a affirmé que la justice est souveraine dans ses décisions, et que toute interférence dans son travail constitue une atteinte à son pouvoir et son indépendance.»
S. A./K.A.


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