Le dernier single de Amel Zen Djamila mis en ligne le 12 octobre dernier est une ode au soulèvement citoyen en cours en Algérie. Cette allégorie, autant poétique que politique, met du punch dans le répertoire de la chanteuse. Dans une atmosphère gothique et crépusculaire, Amel Zen se lance dans une sarabande frénétique en compagnie d'étranges personnages qu'une musique rock-métal fait s'agiter en diables dans un décor sombre et sinistre. Amel Zen est l'une des figures emblématiques de la musique algérienne actuelle et d'une génération d'artistes dont elle incarne la volonté d'innovation mais dont elle se distingue par un style singulier basé sur une recherche exigeante et un travail musical complexe. Cette quête d'une jonction harmonieuse entre ses sensibilités rock et le répertoire classique algérien est saillante dans son dernier single Djamila où la chanteuse, également autrice des paroles, co-compositrice et metteure en scène du clip, nous concocte un mélange réussi entre les rythmiques les plus vivaces du métal et les sonorités chaouies, notamment. Depuis le début du mouvement citoyen, Amel Zen fait partie de ces artistes qui ont immédiatement affiché leur engagement au sein du soulèvement. Après Youm Echaâb, tout premier clip collectif sorti au lendemain du 22 février, qu'elle a conçu et coécrit, elle a célébré en mars dernier la présence massive des femmes dans les manifestations et leur engagement dans les combats cruciaux qu'a connus le pays à travers le titre Hourra (Libre). Elle revient aujourd'hui solo avec Djamila. L'opus s'apparente, contrairement au premier, à un conte parabolique qui évoque, néanmoins, clairement l'actualité politique et le combat des populations pour la liberté et la justice. Clins d'œil poétiques et scéniques au Hirak mais aussi à la classe dirigeante d'hier et d'aujourd'hui foisonnent, en effet, dans ce clip où on voit notamment la chanteuse, habillée et maquillée en noir, menottée, se battant contre des personnages spectraux et effrayants. Parallèlement, Djamila, une petite fille captive, tente de s'évader mentalement de sa prison avant de parvenir finalement à s'enfuir pour de vrai de sa cellule. Chantant en arabe algérien et en chenoui (sa langue maternelle), Amel Zen offre un single aussi percutant qu'intéressant visuellement où elle réaffirme sa volonté de bousculer les codes et s'affranchir des carcans. Née à Tipasa en 1985, elle touche son premier instrument de musique à l'âge de dix ans, l'âge auquel elle rejoint l'association cherchelloise de musique andalouse « Kaïssaria ». A dix-sept ans, elle intègre l'Orchestre régional d'Alger puis l'Orchestre national avant de se faire connaître, cinq ans plus tard, dans l'émission « Alhan wa chabab » où elle atteint les quarts de finale. En 2015, elle s'illustre dans la reprise de la chanson chaâbie Tlata zahwa w mraha à laquelle elle insuffle une seconde vie avec un habillage musical résolument pop-rock. Suivra un autre tube, Saken bali en 2017 puis les chansons dédiées au Hirak. S. H.