De Tunis, Mohamed Kattou Le parti islamiste tunisien, Ennahdha, vit une période de turbulences qu'il n'avait jamais connue. Son secrétaire général, Zied Laadhari, vient de claquer la porte. La démission qu'il vient d'annoncer traduit, clairement, la situation inédite que vit ce parti connu pour être un solide édifice dont la discrétion est presque légendaire. Zied Laadhari, plusieurs fois ministre imposé, comme on peut le deviner facilement par son parti, a exprimé son ras-le-bol. Il lui est, désormais, impossible de poursuivre sa mission au sein du parti islamiste. Que lui reproche-t-on ? Apparemment, rien. En revanche, c'est lui qui a égrené un chapelet de reproches à des camarades rendant la coexistence impossible. Il n'arrive plus à comprendre les membres du majless choura d'Ennahdha, dont les divergences rendent compliquée son action au niveau du secrétariat général. De plus, il serait déçu par la tournure prise par les événements au sein du parti. En outre, et c'est grave, il nourrit certaines inquiétudes quant à la manière dont son parti conduit les affaires du pays. Par ailleurs, et selon certaines sources, Zied Laadhari se voyait chef de gouvernement alors qu'Ennahdha lui a préféré Habib Jomli qui se dit indépendant. Cette supposition serait confirmée par l'attitude qu'il a observée à l'égard du chef du gouvernement désigné. Pour lui, la Tunisie a besoin d'un homme compétent à la tête du gouvernement. Cette déclaration laisse-t-elle supposer que son parti a fait le mauvais choix et que sa déception est telle qu'il ne briguera plus aucun poste, selon des dires ? Quoi qu'il en soit, cette démission reflète les fissures qui lézardent le corps du parti islamiste qui perd, désormais, sa puissance comme l'ont prouvé les récentes législatives. En effet, en cinq ans, ce parti a perdu la moitié de ses électeurs. Serait-ce le début de la fin d'un parti qui domine la scène politique tunisienne depuis 2011? Tout porte à le croire. Il y a trois semaines, un autre grand de ce parti a mis fin à sa carrière politique. Il s'agit du cheikh Abdelfattah Mourou, numéro deux de ce parti qu' il avait lui-même fondé au cours des années 1970. Celui-ci serait déçu par le manque, voire l'absence de soutien lors de sa course à la présidentielle. Il ne l'a pas caché et a dit tout haut que son propre parti lui a préféré un autre candidat. Aujourd'hui, ce n'est plus un secret. Ennahdha a préféré soutenir Kaïs Saïed. Autant de déceptions qui, sans doute, affaibliront un parti qui tenait sa force de la solidarité de ses dirigeants et de leur discipline. Ainsi, à Ennahdha, il y a du grabuge. Le parti serait-il en voie de devenir un parti comme les autres ? M. K.