Repères incontournables pour qui veut avoir une idée proche de la réalité sur l'état de santé économique du monde, les places financières fortes affichaient, jeudi, des chiffres qui donnent froid dans le dos, pas très loin de refléter la panique. En effet, Wall Street a vécu sa pire séance depuis 1987, la Bourse de Tokyo a bouclé avec une chute de 6,08%, alors que les places fortes de la finance européenne se remettaient péniblement, hier, d'une journée horrible comme celle vécue à Paris où le CAC40 a consommé la plus forte baisse de son histoire. La décision de Donald Trump de mettre carrément en quarantaine l'Europe, en interdisant d'entrer sur le territoire américain les étrangers ayant séjourné dans les 26 pays de l'espace Schengen dans les deux dernières semaines, exprime, si besoin est, le degré d'inquiétude suscité par la propagation du Covid-19, le nouveau coronavirus. Pour tout dire, le spectre de la grande crise de 2008 est désormais là, palpable avec des dégâts qui commençaient à prendre forme depuis la fin janvier, comme l'illustrent les chiffres tels les plus de 15% de perte de Wall Street ou encore les 19% de chute du principal indice de la Bourse parisienne, le CAC40, en moins de deux mois. Un tableau qui s'assombrit chaque jour un peu plus depuis que la Chine a commencé à se faire toute petite sur la carte de l'économie mondiale, quelques semaines à peine après l'apparition du virus. Une disparition de l'empire du Milieu qui s'est fait sentir d'abord sur le monde du pétrole avec, jusqu'à ces deux derniers jours, comme conséquence immédiate la baisse de moitié du prix des deux références que sont le Brent et le WTI depuis le début de l'année. Une chute des prix qui a occasionné une guerre des prix de l'or noir comme le monde n'en a pas vu depuis une trentaine d'années. Et le plus grave, c'est que, selon les toutes dernières analyses, les pays producteurs n'en sont pas encore au pire, tellement tous les indicateurs du marché sont au rouge, malgré les propos se voulant conciliants entre les acteurs principaux du marché du pétrole, la Russie et l'Arabie Saoudite. Le pire est qu'on ne compte plus les avis d'experts qui s'attendent que le «vrai choc» de la demande d'or noir est encore à venir. Revue à maintes et maintes reprises depuis le début de l'année par toutes les institutions spécialisées, la demande de pétrole est partie pour subir d'effrayants niveaux en raison de l'augmentation du nombre de pays consommateurs en puissance qui ont fermé ou entendent fermer leurs frontières, interrompant ou réduisant les déplacements en avion, aggravant ainsi les perspectives, déjà sombres avant cela, de la demande. La désormais déclarée pandémie et la décision de Donald Trump de mettre en quarantaine les 26 Etats de l'espace Schengen ont fait rechuter très fortement le prix du pétrole, jeudi. A Londres, le baril de Brent a perdu 7,2% de sa valeur pour boucler la séance à 33,22 dollars, alors que sur le marché de New York, le baril de WTI s'est vendu au cours de 31,5 dollars, perdant ainsi 4,5% de sa valeur de mercredi à la clôture. Encore heureux qu'avant la grande tempête qui s'annonce sur les marchés, l'or noir, comme les indices des principales bourses aient retrouvé un peu d'allant, hier, pour limiter la casse de cette horrible semaine pour l'économie mondiale. Le baril de Brent valait 34,99 dollars, soit en hausse de 5,33 % vers la mi-journée de vendredi, alors que le WTI était à 33,12 dollars, en hausse de 4,14%, sur le marché de New York. Un impact du Covid-19 qui a fait dire, hier vendredi, à Christine Lagarde, la présidente de la Banque centrale européenne, que la pandémie est en train d'engendrer «un choc majeur» sur l'économie et, en conséquence, les prévisions officielles de croissance économique de la zone euro qui étaient de 0,8% pour cette année devraient, en fin de compte, dans le meilleur scénario, être proches de zéro. Pour illustrer ce début de crise, il est cité par exemple les 40% du chiffre d'affaires mondial que représente la Chine pour Volkswagen qui risquent de plonger lourdement quand on sait que les ventes de la marque ont chuté de 90% depuis janvier dans le pays d'origine du virus. Un «petit» exemple comparé aux chiffres qui risquent de choquer lorsque viendra le moment des comptes pour les compagnies aériennes du monde entier. Azedine Maktour