La propagation rapide du Covid-19 en Algérie préoccupe et fait réagir de plus en plus de spécialistes de la santé. La corporation médicale ne cesse d'alerter et met le doigt sur les défaillances de notre système de santé, lequel démontre, à travers la gestion des autorités de cette épidémie, son obsolescence. Massiva Zehraoui - Alger (Le Soir) - Venant confirmer ce constat accablant, le président de la Fondation pour la promotion de la santé et du développement (Forem), Mustapha Khiati, a estimé hier, en marge d'une conférence de presse organisée au forum du journal La Rencontre, que «l'apparition du coronavirus en Algérie a mis à nu les sérieuses carences dont souffre le système de santé algérien». Dans son diagnostic, le professeur reproche aux autorités leur «manque de réactivité» face à la propagation du virus. «Non seulement les mesures préventives ont été prises tardivement, mais encore, elles n'ont pas été fermes», a-t-il lancé. Un propos qui fait référence au long débat qui a précédé la fermeture des mosquées, notamment. «Dans ce genre de situation, il faut passer outre ce genre de considération», a-t-il insisté. Et d'ajouter qu'aucune «exception» ne doit être faite dans ce sens, les écoles, les lieux de culte, ainsi que tous les espaces publics doivent être fermés afin de restreindre les rassemblements, tant il s'agit de la santé publique. Pour Mustapha Khiati, dès l'apparition des premiers cas de Covid-19 en Algérie, la fermeture de toutes les frontières aériennes, terrestres et maritimes s'imposait. D'autant plus que, poursuit-il, «la propagation du coronavirus en Algérie a été entraînée par l'entrée au sol de personnes contaminées à l'étranger». Par conséquent, il aurait fallu suspendre tous les vols en provenance et en partance vers l'Europe, notamment la France. Ce dernier s'est, d'ailleurs, demandé pourquoi les autorités algériennes n'ont pas suivi l'exemple de la Russie, de l'Autriche ou encore de l'Allemagne, qui ont réagi au bon moment et avec efficacité, qui plus est en prenant des mesures strictes. Mustapha Khiati a, en outre, fait savoir que l'existence d'une haute instance de veille sanitaire aurait, sans doute, beaucoup apporté en pareilles circonstances, en matière de prévention. Le texte de loi qui s'y réfère n'est paru qu'en 2018 dans la loi sanitaire, mais n'a pas été créé à ce jour, regrette le professeur. Il notera que, hélas, «nos décideurs écoutent la politique et non la science». II affirme, pourtant, que la sécurité sanitaire doit nécessairement constituer une priorité pour tous les pays. S'appuyant sur le discours du Président français, Emmanuel Macron, qui a mis en évidence l'importance de s'en remettre aux spécialistes et experts de la santé et d'élargir davantage leurs prérogatives, Mustapha Khiati souhaite que, de leur côté, les responsables algériens prennent conscience. Il juge donc que «les décisions liées à la sécurité sanitaire doivent éminemment être prises par des acteurs du milieu de la santé». Au volet des recommandations, le président de la Forem considère qu'à ce stade, le confinement se trouve être la meilleure solution dans l'espoir de limiter la propagation rapide du coronavirus. Mustapha Khiati soutient, également, qu'il faudra penser à isoler les régions où se sont manifestés de nombreux cas, et ce, «pendant 15 ou 20 jours au moins». Cela permettra, dans un premier temps, de limiter la transmission du virus. Il rappellera qu'en termes de prise en charge, les capacités en réanimation ne dépassent pas les 400 lits, et encore, à l'heure qu'il est, elles sont certainement saturées. Dans la mesure «où nos infrastructures de santé comptent déjà un nombre important de cancéreux ou de patients atteints de diabète», précise-t-il. Dans le cas de figure où l'épidémie atteint le stade 3, Mustapha Khiati fait savoir que l'armée n'aura d'autre choix que d'intervenir en mobilisant tous ses moyens matériels et humains. Cependant, bien que Mustapha Khiati appelle les citoyens à la vigilance, il estime, néanmoins, que l'Algérie pourra dépasser cette phase tant bien que mal. Il n'a pas manqué de souligner, à ce titre, que les Algériens commencent à suivre les consignes et prennent enfin la question au sérieux, ce qui est un «bon signe». Par ailleurs, ce dernier invite les uns et les autres à faire preuve de rationalité tout en étant prudents. «Vu que le coronavirus a touché le monde entier, «nous avons les recommandations et les conclusions». Ne restera plus qu'à «faire ce qui a été fait en Chine, en Corée et ailleurs». Mustapha Khiati conclura que la situation n'est pas hors de contrôle et est «maîtrisable». M. Z.