Leila Aslaoui-Hemmadi Il y a à peine quelques jours, une avocate à la fleur de l'âge, Yasmine Terrafi, exerçant à Bouira fut assassinée à l'arme blanche à l'intérieur de son véhicule par quatre individus. Son fiancé qui l'accompagnait, agressé lui aussi, a survécu à ses blessures et a pu ainsi identifier les présumés criminels. Certains poseront la question : pourquoi ? Pour ma part, je ne retiens qu'une seule chose importante : nul n'a le droit d'ôter la vie à autrui et rien ne doit justifier un meurtre. Banalités que celles-ci ? me dirait-on. Pas tant que cela lorsqu'on sait combien la mort a été banalisée les dernières vingt années écoulées. Tellement banalisée que les terroristes islamistes ont été félicités sous le règne de Abdelaziz Bouteflika par l'infâme réconciliation nationale pour avoir été les fossoyeurs de l'Algérie. Tuer, détruire, massacrer des populations avaient été glorifiés et sublimés. Comment dès lors s'étonner de constater qu'au sein de la société dans son ensemble avait germé l'idée selon laquelle commettre un meurtre n'était plus considéré comme un acte grave ? Comment s'étonner également que l'idée de l'impunité avait, elle aussi, causé d'énormes dégâts ? Ce n'était pas la seule violence qui fut l'objet de banalisation mais également les crimes les plus graves et les plus horribles. L'on se souvient entre 2014 et 2017 des successions de kidnappings d'enfants, violés puis assassinés. Leurs âges oscillaient entre six et dix ans. Les auteurs de ces crimes d'une horreur absolue avaient été appréhendés pour certains d'entre eux puis jugés et condamnés à la peine capitale (peine de mort) conformément à la législation en vigueur. Certains ont poussé la plaisanterie d'un goût fort douteux jusqu'à comparer nos héros de la Guerre de libération guillotinés par l'armée coloniale à des criminels de la pire espèce. «L'Algérie garde dans sa mémoire le supplice de la guillotine, c'est pourquoi le moratoire est un grand pas l'abolition sera la consécration» ont-ils dit. Certes, les Algériens n'oublient pas Ahmed Zabana mais comment oser le comparer à un kidnappeur, violeur et assassin d'enfants ? Comment ne pas injurier la mémoire de ces martyrs en les comparant aux présumés assassins de l'avocate qui aurait pu être la fille, la sœur de l'un d'entre nous ? Aussi, est-il légitime aujourd'hui de se demander jusqu'à quand ces criminels vont-ils continuer à bénéficier de ce moratoire alors même que vingt-sept années se sont écoulées ? Jusqu'à quand l'impunité et la banalisation de la mort vont-elles demeurer les nouvelles valeurs de notre société ? Il n'existe aucune vengeance car celui qui sait tuer doit savoir mourir. Un Etat fort n'est pas un Etat répressif mais un Etat où le citoyen se sent sécurisé dans sa vie et dans ses biens. Un Etat fort est un Etat actif, qui applique le droit et protège les victimes les plus faibles telles que les enfants. Durant vingt ans, nous avons vécu dans un Etat de non- droit où tuer, voler, en usant et en abusant de ses hautes fonctions, étaient des actes «héroïques». Aujourd'hui, place à la loi et le moratoire spécifique à une période n'a plus sa raison d'être. L. A. H.