Sous une pluie fine, des milliers de manifestants ont battu le pavé, hier à Alger, réitérant les revendications du mouvement populaire inhérentes au changement radical du système politique. Pour ce premier vendredi du mois de Ramadhan, le nombre de manifestants était moins important que les derniers vendredis, mais la détermination demeure toujours importante. Karim Aimeur - Alger (Le Soir) - Contrairement aux vendredis précédents, la manifestation d'hier s'est déroulée dans un climat tendu à la rue Didouche-Mourad, suite à l'interpellation de quelques manifestants, dont le professeur de physique à l'Université de Bab Ezzouar, Mahana Abdeslam, par les services de sécurité quelques minutes seulement après le début de la marche. La procession humaine s'est stoppée devant le commissariat du 6e, rue Didouche-Mourad. Surpris par ces interpellations, les manifestants ont observé un rassemblement sur place, exigeant la libération des personnes arrêtées. Pour parer à toute éventualité, le passage vers le commissariat a été barricadé par un premier cordon d'agents de l'ordre, renforcé par une barrière de fourgons de police. Les manifestants ont appelé à la libération des détenus d'opinion qui seraient plus d'une soixantaine, selon le Comité national pour la libération des détenus (CNLD). Arborant leurs portraits, les marcheurs ont exprimé leur soutien et solidarité à ces détenus, notamment les 23 qui croupissent à la prison d'El-Harrach et qui ont entamé une grève de la faim depuis plus de 10 jours. Plusieurs organisations ont déjà tiré la sonnette d'alarme quant à la dégradation de leur état de santé, mettant en garde contre le pire. En effet, dans un appel commun, plusieurs organisations dont le Comité national pour la libération des détenus (CNLD), la Coordination nationale des universitaires algériens pour le changement (Cnuac), la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'Homme (Laddh) et le Comité contre la répression d'Oran ont alerté « l'opinion nationale et internationale sur le danger de mort qu'encourent les grévistes de la faim ». Exigeant leur libération immédiate et inconditionnelle, ces organisations tiennent pour responsables les autorités de tout développement dramatique dans cette affaire. Tout au long de la manifestation d'hier, les marcheurs n'ont cessé de réclamer la libération de ces détenus, dénonçant leur détention arbitraire. Les manifestants ont réitéré, en outre, le rejet des élections législatives du 12 juin prochain, appelant à une véritable transition démocratique et le respect de la volonté populaire. Comme ils ont demandé le respect de la liberté d'expression. En marge de la manifestation, des groupes de citoyens débattant de la situation du pays et des perspectives du mouvement populaire. Certains estiment que le temps est venu pour l'organisation du mouvement. « Il faut que les démocrates dont le courant est très présent dans ce mouvement d'essence démocratique s'organisent et s'entendent sur un projet », soutient Ali Brahimi, militant démocrate rencontré à la place Audin. Il y a quelques jours, le président de l'association RAJ, Abdelouahab Fersaoui, a appelé à une rencontre nationale de concertation du Hirak à Kherrata pour le 8 mai prochain. « Il est temps d'unir les forces du Hirak, de travailler pour créer des synergies et des jonctions entre les différentes dynamiques de la société, fidèles au Hirak. Il est temps de traduire le consensus populaire dans la rue en un consensus politique autour d'une feuille de route consensuelle consignant les préalables, les fondements et les mécanismes d'un véritable processus démocratique pour un changement politique et pacifique du régime », a-t-il expliqué. L'idée fait débat au sein des collectifs engagés dans le mouvement. K. A.