De Tunis, Mohamed Kettou Y aura-t-il réconciliation au plus haut sommet de l'Etat en Tunisie ? Bien malin celui qui pourrait émettre un pronostic. Toutefois, certains indices laissent prévoir un dégel des relations entre le président de la République, d'un côté, et du chef du gouvernement et du président du Parlement, de l'autre. L'échange, par téléphone, des vœux de l'Aïd est jugé, par les observateurs, comme un pas vers une réconciliation entre les trois hommes, réconciliation dont le pays a grandement besoin pour espérer débloquer une situation politique, économique et sociale suffocante. Cependant, la main extérieure ne serait pas étrangère à ce retour «salutaire». La géopolitique y serait pour quelque chose, sinon pour beaucoup. C'est suite à un entretien téléphonique entre Kaïs Saïed et la vice-présidente américaine et une rencontre entre Rached Ghannouchi et l'ambassadeur américain à Tunis, que, favorisés par l'avènement de l'Aïd, les contacts ont été rétablis. En attendant, Kaïs Saïed ne bouge pas d'un iota. Fidèle à ses positions antérieures, il récuse encore le dernier remaniement ministériel et refuse toujours de signer le projet de loi relatif à la Cour constitutionnelle malgré une deuxième lecture au niveau du Parlement. En revanche, Rached Ghannouchi semble assagi et revenir à de meilleurs sentiments. A cause des déboires que connaissent les mouvements islamistes à travers le monde. A ce propos, il n'est pas superflu de rappeler le soutien du Caire au Président Saïed, le rapprochement turco-égyptien ou l'échec de la visite de Ghannouchi au Qatar d'où il serait revenu bredouille. Ainsi, le chef des islamistes tunisiens aurait perdu ses soutiens extérieurs ajoutés à ceux perdus à l'intérieur du pays. Dans ce contexte particulier, les Américains instigateurs du «printemps arabe» et de la «révolution» tunisienne et soutiens indéfectibles des islamistes sont toujours écoutés. Tel serait le cas de Kaïs Saïed et de Ghannouchi. A contrario, le chef du gouvernement Hichem Mechichi, qui tient tête au chef de l'Etat et qui perd, quotidiennement, du crédit au niveau populaire, ne peut prétendre à aucun soutien extérieur bien qu'il soit appuyé, au plan intérieur, par le parti islamiste. En effet, novice en politique, il n'est pas, encore, l'homme à récolter des amitiés et des soutiens étrangers. À l'heure actuelle, ce ne sont que des suppositions et des analyses auxquelles s'adonnent les observateurs. D'autant plus que les trois têtes du pouvoir ne se pressent pas pour annoncer la fin de la crise à un peuple qui a perdu sa patience. Un peuple qui souffre de la détérioration de son pouvoir d'achat, un peuple qui voit le nombre des chômeurs augmenter (+15 000 depuis janvier) quotidiennement, sans compter le stress que fait peser sur lui la Covid-19. M. K.