En Afrique, le football est une discipline sportive et politique. Car, c'est une affaire d'Etat, de l'homme fort du moment. Surtout quand il est drapé du costume militaire, flanqué de médailles pour des guerres qui n'ont jamais eu lieu. On peut être président et aimer le foot, ça n'a rien d'incompatible, du reste on a bien eu un président-footballeur en la personne de feu Ahmed Ben Bella. Tout le monde trouve ça bien, sympathique. Cependant, il faut le reconnaître, la balle ronde charrie des millions de fous du ballon qui peuvent faire la différence dans des élections. Ou tout simplement donner de la popularité. C'est dire que l'on ne transige pas avec les enjeux supposés ou réels. C'est pourquoi les animateurs de ce sport font l'objet de toutes les sollicitations. Ils sont adulés, portés au pinacle mais très vite ils sont traînés dans la boue en cas d'échec. D'ailleurs, tous s'en mêlent : ministre, sélectionneur (c'est son rôle), fans, soigneur ou porteur d'eau. Sans oublier l'influence des arbitres, déterminante dans le cours d'un match ! Résultat, tout le monde est heureux ou... malheureux. À telle enseigne qu'il faudra inclure un poste supplémentaire dans le staff gouvernemental, celui de « ministre du bonheur ». Que l'on se rassure, cette fonction est déjà assumée chez nous, ainsi en a décidé la vox populi. Toutefois, il se trouve aussi des situations cocasses qui prêtent à sourire mais laissent parfois songeur. Deux cas d'espèce : en Côte-d'Ivoire et récemment en Guinée. À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles. Au pays de Didier Drogba, ses précédents coéquipiers, pourtant donnés favoris, ont vécu un mauvais quart d'heure pour avoir été éliminés dès le premier tour de la 22e CAN. Le général Gueï, auteur d'un coup d'Etat qui l'a porté au pouvoir (il sera, un an après, assassiné par ses pairs), n'est pas content. Sanction : trois jours d'internement dans un camp militaire. Un honteux abus. Il n'empêche, ce scénario ubuesque se répète. En Guinée, le chef du récent putsch militaire, le colonel Mamady Doumboya, vient de mettre en garde les footballeurs guinéens qui participent à l'imminente Coupe d'Afrique des Nations. S'ils ne gagnent pas, ils devront rembourser tous les frais engagés par le gouvernement. Comme on n'est pas à une aberration près, la dernière Coupe arabe-Fifa a fait des dommages collatéraux. L'ex-footballeur international Abdeslam Ouaddou a fait l'objet de lâches attaques d'une partie des supporters marocains pour avoir félicité le vainqueur de la compétition qui n'est autre que l'Algérie, il est vrai dans un contexte de crise diplomatique. Pour ses détracteurs, c'est à M6 que devait revenir le trophée. Rendez-vous la prochaine semaine. Brahim Taouchichet