En face des vedettes – ou crypto vedettes – le reproche fait à des journalistes parisiens est de tour à tour les « lécher, lâcher et lyncher ». Cette tentation des « Trois L » dans la fabrication des noms porteurs de célébrité, voire d'icônes déifiées, a refait surface de façon frappante depuis dimanche, avec le singulier coup de tête de Zidane en finale de la Coupe du monde de foot. L'industrie du spectacle a besoin de ça pour marcher. Les patrons et les vedettes des médias (consacrées en gourous) y trouvent leur compte. La qualité de l'information est reléguée à la marge. A Berlin, Zidane a peut-être donné aussi, en cible collatérale, un coup de tête à ce moule déformant des réalités, comme le montre son traitement journalistique dans le journal L'Equipe. Lundi, la bible quotidienne des sports a succombé au piège. Sans recul, sermonneur et méprisant, son éditorialiste, en première page, a joué au pouvoir du procureur s'adressant directement à Zidane. Une leçon d'instit acariâtre et carré à son élève : « J'imagine qu'avant que vous ne commettiez ce geste irréparable, et difficilement pardonnable, qui a mis un terme à votre fabuleuse carrière, Materrazi a dû vous dire les pires horreurs. » L'éditorialiste continue de culpabiliser le sportif, en entrant par effraction dans son foyer : « Zinedine, je vous imagine très malheureux ce matin. Je suis certain que vous avez pensé qu'il va falloir expliquer ce coup de tête pour vos quatre garçons pour qui vous êtes tant… » Un suivisme d'une partie des confrères a commencé à pousser. Mais le lendemain, l'éditorialiste a dû se fendre d'un mea culpa : parce que les réalités, comme toujours, sont plus complexes et ne peuvent être instruites et réduites d'un papier aussi sophistiqué soit-il. Entre temps, le président français lors de son déjeuner offert aux Bleus a gratifié le sportif – « cher Zinedine Zidane » – de « virtuose et d'homme de cœur ». Entre temps, la vox populi a vibré de son nom dans les rues ; un sondage lui a « pardonné à 61% de voix ». Ces vibrations doivent toucher Zidane pour vivre avec ses deux ailes de cœur et d'honneur. C'est ce monsieur qui est grand. P S : Médiascopie marque une pause d'été. A septembre si vous le voulez bien.