Par Zineddine Sekfali Parler aujourd�hui de la Bourse d�Alger et appeler � la relance du march� des valeurs mobili�res, est-ce opportun ? Ne risque-t-on pas d��tre en d�calage par rapport � l�actualit� internationale marqu�e par une grave crise financi�re et une longue s�rie de scandales boursiers ? Tout le monde sait en effet, que d�importantes places financi�res fr�lent le krach, que de grandes banques sont ruin�es ou en faillite, que des Etats chancellent sous leurs dettes dites souveraines et que d�autres, en proie � des troubles sociaux, risquent l�implosion. Et pourtant, cette contribution ne vient pas � contretemps, et moins encore sans raison. Bien au contraire, il est temps, dix-huit ans apr�s l�institution de la Bourse d�Alger, de se demander quelles seraient les mesures � prendre pour relancer cette Bourse, et apr�s avoir tir� les le�ons de ce qui se passe dans le monde, de chercher comment nous pr�munir des d�rives et d�viances qui menacent les march�s des valeurs mobili�res. D�o� la structuration de cet article en trois parties. Dans la premi�re, on parlera de la crise financi�re qui agite les places financi�res les plus grandes du monde ; on tentera d�en faire un r�sum� synth�tique et simplifi�, sans cependant en minimiser la gravit� et sans rien occulter. Dans la deuxi�me partie on pr�sentera la Bourse d�Alger, en tant que structure ; on dira ensuite son utilit�, en tant que march� financier. Dans la troisi�me et derni�re partie, on exposera les voies et moyens de nature, � notre avis, � aider � la relance du march� des valeurs mobili�res en Alg�rie. Sur la crise financi�re mondiale De New York � Tokyo, en passant par Londres, Paris, Zurich, Frankfurt, Madrid, Amsterdam, P�kin, Shanghai, Singapour, Duba� et Qatar, les valeurs, les cours et les indices boursiers jouent au �yo-yo�. Chaque matin et chaque soir, � l�ouverture et � la fermeture des bourses, c�est l�affolement et la panique, d�un bout � l�autre du monde. Les investisseurs qui effectuaient en Bourse des placements s�rs, en acqu�rant des actions ou des obligations �mises par des entreprises en expansion ont �t� remplac�s par des �traders�. Riv�s � leurs ordinateurs, ceux-ci sont � la recherche de profits financiers imm�diats. A vrai dire, sur la plupart des grands march�s financiers, on �n�investit � plus ; d�sormais, on �sp�cule�, en fonction des variations erratiques � haussi�res et baissi�res � de certains produits financiers et de titres nouveaux, qui ne seraient ni des actions ni des obligations au sens classique de ces termes, mais des montages financiers, plus ou moins sophistiqu�s, comme par exemple les �titrisations� auxquelles les banques, pour accro�tre leurs gains, ont recours sans aucun �gard pour les �pargnants. C�est ainsi que s�explique le scandale des �subprimes� qui ont mis sur la paille pr�s de trois millions de foyers am�ricains de condition modeste. Ces produits financiers �pourris� ont aussi entra�n� la faillite en septembre 2008 d�une grande banque de Wall Street, la banque Lehman and Brothers, ce qui a jet� le trouble dans tout le march� am�ricain et par effet domino dans d�autres places financi�res � travers le monde. Il faut encore citer l�affaire �B.L Madoff Investisment Securities LLC�, gigantesque affaire d�escroquerie qui a �clat� en d�cembre 2008 et d�stabilis� plusieurs banques am�ricaines et europ�ennes, que Maddoff, affairiste peu scrupuleux, avait prises dans ses rets, en leur faisant miroiter des gains faramineux. On rappellera enfin ces trois autres scandales : l�affaire J�r�me Kerviel, trader de la Soci�t� G�n�rale, qui a fait perdre � son employeur environ 5 milliards d�euros ; l�affaire Fabien Tourre, de la banque am�ricaine Goldman Sachs qui, sans �gard pour les souscripteurs et pleinement conscient � il l�a dit lui-m�me � des risques auxquels il exposait sa banque et ses clients, pla�ait des produits financiers �toxiques�, et pour terminer la tr�s r�cente affaire Kweku Adoboli, trader de la banque Union des Banques Suisses-UBS, qui a perdu 2,3 milliards de dollars dans des op�rations tout aussi complexes qu�opaques. Ainsi donc, de d�rive en d�rive, de man�uvres frauduleuses en op�rations d�lictuelles, les march�s des valeurs mobili�res ont cess� dans certains pays d��tre des outils de collecte de l��pargne � des fins de d�veloppement et d�expansion �conomique, pour se transformer en lieux �d�agiotage immod�r� et de sp�culation effr�n�e�. Ces march�s financiers, coup�s de l��conomie r�elle, ont produit des �bulles sp�culatives� qui ont ��clat� quand les prix, anormalement sur�valu�s, ont chut� d�un seul coup en provoquant des ruines retentissantes. A cet �tat de fait d�plorable d�sormais patent, s�ajoute la pr�tention des agences priv�es de notation (Standard and Poor�s par exemple) de fixer la cote de solvabilit� des Etats. C�est l� le comble : les financiers, apr�s avoir, au nom du lib�ralisme, d�poss�d� les gouvernants du pouvoir de d�finir la politique �conomique de leurs pays distribuent de mauvaises notes aux Etats les moins dirigistes ! Mais il y a pire encore : quand les banques sp�culatrices s�effondrent par la faute des dirigeants et des sp�culateurs, on demande aux Etats de les sauver en les recapitalisant ! Il y a pr�s de soixante ans, un pr�sident fran�ais avait pourtant mis en garde les financiers contre toute tentative de captation du pouvoir politique, en s�exclamant : �Non, la politique fran�aise ne se fait pas � la corbeille !� Aujourd�hui, il n�y a plus ni corbeille ni salle des cri�es � la Bourse de Paris qui a, du reste, chang� de nom pour s�appeler Euronext. Partout, les march�s financiers sont informatis�s et les traders travaillent sur ordinateur, dans les banques et dans les organismes financiers qui les emploient. De leurs bureaux, ils ach�tent et vendent d�un simple �clic�, souvent sans rendre compte � qui que ce soit, comme on l�a vu pour Kerviel, Tourre ou Adoboli� On sait par ailleurs qu�il existe dans certaines places financi�res des �traders-robots� qui font du �Trading Haute Fr�quence�, en r�alisant des milliers d�op�rations boursi�res � la minute ! Les march�s financiers, apr�s avoir �t� d�r�glement�s et d�r�gl�s au nom du dogme lib�ral ont �t� livr�s aux sp�culateurs qui op�rent au nez et � la barbe des �gendarmes de la bourse�, comme la �COB� fran�aise ou la �Securities and Exchange Commission� (SEC) am�ricaine. En fait, les Etats n�exercent plus sur les bourses qu�une lointaine surveillance. D�brid�e et fr�n�tique, la sp�culation ne pouvait que mal finir ; presque partout, les �conomies des pays peinent, les peuples grondent et l�on commence � voir, notamment en Gr�ce et � Wall Street � c�ur de la finance mondiale �, des manifestants crier leur indignation et leur col�re. Dans cette d�b�cle de fin de cycle, il y a peut-�tre une lueur d�espoir : les pays dits �mergents, notamment le Br�sil et la Chine, paraissent s�en tirer convenablement. On dit m�me qu�ils seraient dispos�s � venir au secours du syst�me financier occidental gravement ab�m� par la sp�culation. Enfin, des voix s��l�vent pour appeler � contraindre les march�s boursiers � revenir aux fondamentaux qui les r�gissaient et � s�organiser de sorte � se pr�munir contre les d�rives, les d�viances et les comportements irresponsables, qui sont � l�origine de la crise actuelle. La Bourse d�Alger : forces et faiblesses A - Ses structures et leurs attributions La Bourse d�Alger a �t� institu�e par le d�cret l�gislatif n� 93-10 du 23/05/1993, qui a fix� son organisation, ses missions et attributions ainsi que son fonctionnement. Ce d�cret-loi fondateur a �t� modifi� et compl�t� par la loi n� 03-04 du 19/02/2003. La Bourse est constitu�e d�une structure institutionnelle : la Cosob, et de deux structures commerciales de gestion : la SGVB et Alg�rie Clearing, enfin d�un corps d�intervenants appel�s les interm�diaires en op�ration de Bourse (IOP). 1� La Commission d�organisation et de surveillance de la Bourse (Cosob) Elle est l�Autorit� de r�gulation du march� des valeurs mobili�res. C�est un organe administratif coll�gial form� de sept membres dont un pr�sident nomm� par d�cret pr�sidentiel. Les six autres membres sont : un magistrat d�sign� par le ministre de la Justice, un fonctionnaire de l�administration financi�re d�sign� par le ministre des Finances, un repr�sentant du gouverneur de la Banque d�Alg�rie, un professeur d�universit� d�sign� par le ministre de l�Enseignement sup�rieur, un repr�sentant d�une soci�t� admise et cot�e en Bourse, et un expert comptable et commissaire aux comptes. La commission a pour mission, comme son nom l�indique, l�organisation et la surveillance du march� des valeurs mobili�res. Il lui revient de veiller au bon fonctionnement de la Bourse, � la l�galit� et � la transparence des op�rations, � la sinc�rit� des transactions, au respect des droits des �pargnants. Elle dispose d�un pouvoir r�glementaire. Elle est en effet habilit�e � r�glementer les conditions dans lesquelles doivent s�effectuer les �missions de valeurs mobili�res, les conditions et modalit�s d�octroi des agr�ments aux interm�diaires en op�rations boursi�res (IOP), les publications et autres formalit�s de publicit� auxquelles sont astreints les soci�t�s �mettrices de valeurs mobili�res, les obligations li�es � la tenue de certains comptes, et bien entendu les conditions dans lesquelles doivent �tre tenus et g�r�s les portefeuilles des �pargnants et des investisseurs. Ces r�glements sont soumis � l�approbation du ministre des Finances. Ils sont publi�s au Journal officiel. La commission dispose aussi d�un pouvoir d�investigation. A ce titre, elle peut faire proc�der � des v�rifications et contr�les de pi�ces et autres documents, dans les soci�t�s �mettrices, dans les banques, dans les locaux des IOP et dans les administrations. Elle est enfin une juridiction disciplinaire et arbitrale. En effet, la commission comporte en son sein une �chambre disciplinaire et arbitrale� pr�sid�e par le pr�sident de la Cosob et comprenant deux membres de la Cosob et deux magistrats d�sign�s par le ministre de la Justice. Cette chambre conna�t des poursuites pour fautes professionnelles et d�ontologiques commises par les IOP et des litiges pouvant opposer les IOP � leurs clients, aux soci�t�s �mettrices, et � la Soci�t� de gestion des valeurs de Bourse (SGVB). S�il est � mon sens �vident que les recours contre les d�cisions disciplinaires rel�vent de la comp�tence du Conseil d�Etat, les choses sont moins claires pour ce qui est des recours contre les d�cisions arbitrales qui peuvent en effet relever � en raison de leur nature commerciale � de la comp�tence de la chambre commerciale de la Cour supr�me. 2� La Soci�t� de gestion des valeurs boursi�res (SGVB) C�est une soci�t� par actions constitu�e par les IOP. Elle a pour mission l�administration et la gestion mat�rielle de la Bourse, et notamment l�organisation des introductions en bourse, des s�ances de cotation et des n�gociations. 3� Alg�rie Clearing C�est une soci�t� par actions, constitu�e par cinq banques publiques et trois entreprises publiques �mettrices d�actions, en l�occurrence Saidal, EGT El Aurassi et Eriad S�tif. Elle a pour mission : la conservation comptable des titres �mis, l�ouverture de comptes courants de titres, l�identification des valeurs �mises en les codifiant selon les normes internationales, la �scripturalisation � des mouvements r�glements/livraisons. Pour l�accomplissement de ces missions, la SPA Alg�rie Clearing a mis en place un syst�me de gestion et d�administration automatis�, int�gr� et s�curis�, ouvert aux professionnels du march� financier. 4� Les interm�diaires en op�rations de Bourse (IOP) Ils constituent le trait d�union entre les soci�t�s �mettrices et les �pargnants. La fonction d�IOP n�est ouverte, depuis la loi n� 03/04 du 19/02/2003, qu�aux personnes morales suivantes : les soci�t�s commerciales (quelle que soit leur forme juridique : SPA, SARL, SNC, SCS�) constitu�es �� titre principal� pour cet objet, les banques et les �tablissements financiers. L�agr�ment en qualit� d�IOP est donn� par la Cosob. Les candidats � la fonction d�IOP doivent justifier de capacit�s financi�res suffisantes, de moyens techniques en ad�quation avec leurs t�ches et d�un personnel form�, qualifi� et exp�riment�. En cas de refus d�agr�ment, le demandeur peut se pourvoir devant le Conseil d�Etat. La fonction essentielle de l�IOP agr�� consiste � acheter et vendre des valeurs mobili�res sur le march� boursier, conform�ment aux ordres qu�il re�oit de ses clients. Il effectue ces op�rations en son nom, pour le compte de ses clients envers lesquels il est responsable. L�IOP est pour ses clients un conseil en mati�re boursi�re, financi�re et fiscale. C�est lui qui g�re les portefeuilles de valeurs de ses clients. Telle est l�organisation g�n�rale de la Bourse d�Alger : elle n�a rien � envier � celle des autres bourses. Qu�en est-il � pr�sent de ses activit�s ? C�est l� que les choses laissent � d�sirer. B � L�activit� de la Bourse Il est, en effet, de notori�t� publique que la Bourse d�Alger peine � d�marrer et que son activit� en tant que march� des valeurs mobili�res est tr�s modeste. Est-ce en raison de sa jeunesse ? On est tent� de le penser. En effet, si le texte qui l�a institu�e date de mai 1993, la Bourse d�Alger n�a en r�alit� commenc� � fonctionner en tant que march� des valeurs mobili�res qu�� partir de septembre 1999, date � laquelle, pour la premi�re fois dans l�histoire de l�Alg�rie ind�pendante, une soci�t� � en l�occurrence Eriad S�tif � a �t� introduite et cot�e en Bourse. La derni�re admission et cotation � la Bourse d�Alger date de mars 2011 ; cela concernait une soci�t� par actions priv�e, la soci�t� Alliance Assurances. De 1999 � 2011, seules deux autres soci�t�s, Saidal et l�EGT El-Aurassi, ont obtenu leur admission et cotation � la Bourse d�Alger. C�est bien �videmment tr�s peu, sachant qu�il y a : - 550 � 600 soci�t�s cot�es � la Bourse du Caire, - 75 � 80 dans celle de Casablanca, qui s�est organis�e pour porter ce nombre � 150 � l�horizon 2015, - 60 � 65 dans celle de Tunis, - et plus de 1 600 (dont les 40 du CAC 40) � Paris, dont la Bourse est tr�s ancienne. Il n�est donc pas surprenant que le volume des affaires trait�es par notre Bourse soit modeste et que l�activit� �n�gociation� reste faible. Ce qui surprendrait et en plus choquerait, c�est qu�on laisse cette situation perdurer, sans que rien ne soit entrepris pour y rem�dier. Or, tout le monde sait que de nombreuses entreprises �conomiques du secteur public comme du secteur priv�, souhaitent d�velopper leurs activit�s de production et de services, et ont besoin pour ce faire, de recourir � l��pargne priv�e. Personne n�ignore non plus qu�il y a dans notre pays, une importante �pargne priv�e, susceptible d��tre mobilis�e. Cette �pargne est pour partie d�pos�e dans les banques ; elle est donc facile � �valuer. Une autre partie est th�sauris�e � �l�ancienne�. Une troisi�me partie est inject�e dans les r�seaux parall�les qui irriguent l��conomie souterraine et le march� informel. Ces deux derni�res cat�gories d��pargne atteindraient, croit-on savoir, des montants sup�rieurs � l��pargne d�pos�e dans les banques. Il convient en outre de rappeler qu�il existe chez nous une tradition hostile au cr�dit, qui conduit certains d�tenteurs de capitaux � refuser de souscrire ou d�acqu�rir les obligations et les actions �mises ; ce probl�me est r�el, mais n�est pas insoluble de l�avis des juristes sp�cialis�s en droit musulman. Alors, pourquoi la Bourse d�Alger est-elle encore � la tra�ne ? A cause de sa jeunesse ? Je crois que l��ge de la Bourse n�est pour rien dans ce marasme. A cause des �ventuelles lacunes des textes l�gislatifs ci-dessus cit�s ? Ces textes, s�inspirant des l�gislations de pays ayant une longue exp�rience et une expertise av�r�e en mati�re de march�s de valeurs mobili�res, ne posent pas de probl�me particulier. Le probl�me proviendrait-il de la Bourse, en tant que structure ? A mon avis, ce n�est pas dans l�organisation de la Bourse que r�side le probl�me : c�est une organisation similaire � celle de beaucoup de Bourses. La r�organiser une fois de plus, ce serait perdre du temps. �Lorsque l�on ne veut rien faire, on dit qu�on va r�organiser !� aurait dit L�nine ; cette observation est, quoi que l�on pense de son auteur, pertinente !En v�rit�, la seule question qu�il convient de se poser est : que faire pour qu�il y ait plus de valeurs mobili�res cot�es et n�gociables, et comment cr�er un flux financier ample et continu � la Bourse ? C � Quelques mesures pour une relance Pour que les choses retrouvent un ordre logique et que la Bourse d�marre vraiment, il faut, � mon avis, entreprendre au plus t�t, les quelques actions ci-apr�s �num�r�es. Ces actions s�articulent autour des trois axes suivants : 1� - une augmentation significative du nombre des �metteurs ; 2� - une meilleure mobilisation de l��pargne publique ; 3� - des interm�diaires en op�rations de bourse � la hauteur de leurs missions. 1� - Par �metteurs, on entend : les soci�t�s commerciales, les collectivit�s publiques et toutes les autres personnes morales, susceptibles d��tre introduites en bourse. A cet �gard, il faudrait en premier lieu que l�Etat affiche sa volont� de favoriser la cr�ation de soci�t�s commerciales priv�es et adopte des mesures incitatives. Il y a, h�las, des personnes qui, ayant �t� longtemps nourries de la rente, sont syst�matiquement hostiles � l�apparition d�un secteur �conomique priv�, productif et dynamique. Il faudrait, ensuite, qu�on mette en place une structure dynamique charg�e de rechercher, prospecter et lister, sans laxisme ni exc�s, les soci�t�s publiques et priv�es, susceptibles d��tre admises en Bourse. Il faudrait dans le m�me temps simplifier et r�duire les conditions et formalit�s exig�es pour constituer les soci�t�s, notamment les SPA. On reconna�t dans le foisonnement du formalisme quelques vestiges de l��poque du socialisme triomphant. En outre, il ne sert � rien en l��tat actuel de notre �conomie, qui reste domin�e par l�Etat, d�allonger et compliquer les conditions que doit remplir la soci�t� d�sireuse d��mettre des valeurs mobili�res. C�est en effet dans le formalisme tatillon et excessif que se nichent les passe-droits et le trafic d�influence. Une autre mesure de relance : on pourrait sans commettre d�h�r�sie juridique, permettre aux SARL qui sont juridiquement � la fois des soci�t�s de personnes et des soci�t�s de capitaux, d��mettre des obligations n�gociables. On pourrait, s�agissant pr�cis�ment des SARL, limiter cette possibilit� aux plus grandes d�entre elles qui jouissent d�une solide assise financi�re et justifient de plusieurs exercices b�n�ficiaires. Dans cette hypoth�se, on pourrait exiger que les obligations des SARL introduites en Bourse soient exclusivement nominatives. Il faudrait, par ailleurs, obliger chaque soci�t� �mettrice � communiquer ses r�sultats et bilans, � leur donner la plus large publicit� possible par voie de presse et par la diffusion sous forme de prospectus et de plaquettes de ses donn�es comptables essentielles, d�ment certifi�s par les responsables de la soci�t� et vis�s par l�expert comptable. Il faut enfin exposer le programme d�investissements et les plans d�actions que la soci�t� entend mettre en �uvre gr�ce � l��pargne publique collect�e. Des comptes rendus sur l��tat d�ex�cution de ces programmes et plans doivent �tre r�guli�rement pr�sent�s. Plus peut-�tre qu�ailleurs, il faut qu�� la Bourse r�gne la plus grande transparence. 2� L��pargnant a besoin pour souscrire des actions et/ou des obligations, d�explications claires et de garanties fiables. Il doit pouvoir trouver dans les banques en particulier, les conseils qui lui permettent de prendre sa d�cision en toute connaissance de cause et l�assistance technique pour la gestion de son portefeuille de valeurs mobili�res. Les explications que l��pargnant attend doivent porter sur la nature et les raisons de l�op�ration envisag�e, sur la soci�t� �mettrice, sur sa situation financi�re, sur les objectifs �conomiques et financiers vis�s, sur la proc�dure � suivre pour souscrire, sur les b�n�fices qu�il est raisonnable d�en attendre, sur les modalit�s de payement des produits des titres acquis, enfin sur les voies de recours ouvertes en cas de d�faillance de l��metteur. L��laboration d�un �Guide de l��pargnant investisseur en Bourse� serait une bonne chose. Il faut aussi donner toutes les assurances � l��pargnant en lui montrant que les titres �mis �tant n�gociables en Bourse, il lui est loisible de rompre � tout instant le lien qu�il a avec la soci�t� �mettrice et r�cup�rer son argent en vendant tout ou une partie des titres qu�il d�tient. Les souscripteurs d�actions doivent savoir que contrairement aux actionnaires originels, ils ne sont pas ind�finiment li�s � la soci�t� �mettrice. Il faut aussi �viter de laisser l�impression � l��pargnant qui se donne la peine d�investir en Bourse, qu�on le soup�onne a priori de blanchir des fonds mal acquis. On ne saurait par ailleurs continuer � reprocher � nos concitoyens un manque de �culture de l�actionnariat � ou de �culture boursi�re�, si d�un autre c�t� on ne fait rien pour les aider � acqu�rir cette culture, car celle-ci n�est pas un don inn� mais quelque chose qui s�acquiert : un peu de p�dagogie et de vulgarisation, via la t�l�vision notamment, serait une excellente initiative� Enfin, comme d�j� observ� ci-dessus, des efforts restent � faire pour attirer les d�tenteurs de capitaux qui, pour des raisons religieuses, h�sitent � souscrire des actions et plus encore des obligations. Il suffirait � mon sens de cr�er � leur intention et leur proposer des formules financi�res conformes aux prescriptions de la chari�a. Or, de telles formules ou de tels syst�mes existent depuis longtemps dans beaucoup de pays musulmans. Leur l�gitimit�, de m�me que leur faisabilit� et leur fiabilit�, sont prouv�es. En effet, dans les pays du Golfe comme en Asie, chez les sunnites comme chez les chiites, on trouve des march�s financiers florissants et de r�putation internationale. On peut donc, sous r�serve peut-�tre de quelques adaptations de d�tail, adopter ces syst�mes. Persister � ignorer l�exp�rience et l�expertise des Etats musulmans qui ont d�velopp�, avec succ�s, d�importants march�s financiers, serait � mon avis une grave erreur �conomique et politique. J�ai lu dans le quotidien Echouroukdu 04/10 une information selon laquelle l�Institut sup�rieur du commerce d�Alger allait organiser, les 17 et 18 de ce mois, une rencontre internationale consacr�e aux march�s financiers dans la conception islamique. On ne peut que s�en f�liciter : il n�est en effet jamais trop tard pour faire bouger les lignes ! 3� Les interm�diaires en op�rations de Bourse forment le maillon qui relie les �pargnants souscripteurs ou susceptibles de souscrire, d�une part, et les soci�t�s et institutions �mettrices de ces actions et obligations, d�autre part. Autant dire que leur r�le est central et qu�ils constituent la clef de vo�te du syst�me boursier. D�o� une double exigence ; d�abord celle d�un statut juridique destin� � encadrer de mani�re stricte les activit�s des personnels charg�s des t�ches qu�implique la fonction d�interm�diaire ; ensuite, l�organisation � l�intention de ces personnels, d�une formation financi�re et bancaire de qualit�, m�lant th�orie et pratique. Cela implique l��laboration d�un cursus sp�cifique de formation de niveau universitaire et l�organisation de stages dans les banques et institutions financi�res tant en Alg�rie qu�� l��tranger. Les personnels charg�s de la fonction d�interm�diaires en op�rations de Bourse devraient normalement se trouver dans toutes les banques, et leurs agences les plus grandes dans une structure IOB distincte des autres bureaux et guichets. Tout en �tant au service de la banque qui les emploie, les personnels de l�IOB sont vis-�-vis des institutions �mettrices ainsi que des �pargnants souscripteurs, des conseillers en finances et fiscalit�, et les gestionnaires des portefeuilles de la client�le de la banque. Il est donc temps, tout en pr�parant la relance de l�activit� boursi�re � Alger, de s�lectionner et former ces personnels. C�est bien d�eux, en d�finitive, que d�pendent d�une part, l�apparition et la diffusion dans le public d�une culture de l�actionnariat et d�autre part, l�expansion du march� des valeurs mobili�res dans notre pays. En conclusion, on ne dira jamais assez que la Bourse est avant tout un outil de collecte de l��pargne priv�e, laquelle vient en compl�ment aux cr�dits bancaires et aux subventions publiques, dont l��conomie r�elle a besoin. En tant que telle, la Bourse peut devenir un puissant levier pour la relance de l�investissement productif et du d�veloppement �conomique. En outre, la Bourse donne aux �pargnants la possibilit� de participer au d�veloppement de l��conomie nationale et leur permet, en contrepartie de cette participation, de b�n�ficier des fruits de la croissance. Quant aux autorit�s publiques, il est de leur responsabilit� de veiller au fonctionnement normal de la Bouse, de pr�venir tout d�rapage vers la sp�culation et de sanctionner avec rigueur les irr�gularit�s qui s�y commettraient. La Bourse d�Alger vaut donc la peine qu�on s�y int�resse et m�rite qu�on la tire de sa l�thargie, en mettant le plus vite possible dans �sa corbeille� suffisamment d�actions et d�obligations susceptibles d��tre n�goci�es.