La Gambienne Fatou Bensouda, d�sign�e procureur de la CPI, ne changera pas sur le fond l'attitude du tribunal � l'�gard des criminels en Afrique, les seuls actuellement poursuivis, mais offre au continent un poste majeur qui peut changer la perception de la CPI par les Africains. Fatou Bensouda n'est nullement perturb�e par les accusations de �justice de Blancs� rendue par la Cour p�nale internationale (CPI) qui ne s'est, � ce jour, attaqu�e qu'� des Africains, le dernier �tant l'ex-pr�sident ivoirien Laurent Gbagbo transf�r� � La Haye o� il sera jug� pour crimes contre l'humanit�. �Je ne pense pas aux dirigeants que nous poursuivons, je travaille pour les victimes d'Afrique, elles sont africaines comme moi, voil� d'o� je tire ma fiert� et mon inspiration�, dit celle qui �tait depuis 2004 l'adjointe de l'actuel procureur, l'Argentin Luis Moreno-Ocampo. Ben Kioko, conseiller juridique de l'Union africaine (UA) dont Mme Bensouda �tait la candidate, estime cependant qu'il n'y a �absolument aucune justification � ce que les seuls cas trait�s par la CPI soient en Afrique, il y a �norm�ment d'autres endroits o� cela aurait pu �tre fait�. �La CPI est une justice des Blancs pour r�gler le compte des Africains�, affirme l'opposant tchadien Yorongar Ngarlejy, qui ajoute : �Je ne vois pas comment Fatou peut renverser la tendance, les puissants de ce monde vont la contr�ler pour qu'elle ob�isse au doigt � l'�il.� Pour Michel Sery Gouagnon, responsable juridique du Front populaire ivoirien (FPI), le parti de Laurent Gbagbo, la nationalit� de Fatou Bensouda ne changera pas � elle seule cette perception. �Il ne faut pas trop t�t se r�jouir du fait qu'il s'agit d'une Africaine. Car ce c�t� sentimental nous a toujours induits en erreur en Afrique. Un procureur de la CPI, qu'il soit africain, reste un procureur de la CPI�, dit-il. Un sentiment partag� par Lovemore Madhuku, professeur de droit constitutionnel de l'Universit� d'Harare, qui a souvent eu maille � partir avec le r�gime du pr�sident Robert Mugabe : �Ce n'est pas une question de nationalit�.� �Dans toutes les institutions o� il y a l'Occident d�velopp� et les pays africains, les rapports seront toujours fauss�s�, selon lui. �Elle saura parler aux Africains� S'il pense qu'elle �va travailler de fa�on ind�pendante�, Dolly Ibefo, responsable de l'ONG La Voix des Sans-Voix en R�publique d�mocratique du Congo (RDC), juge parall�lement que, �en fonction des pays qui ont financ� le plus (la CPI, ndlr), elle risque d'�tre manipul�e ou s�lective par rapport aux personnes qui doivent �tre poursuivies �. Alioune Tine, de la Rencontre africaine pour la d�fense des droits de l'homme (Raddho), bas�e � Dakar, estime au contraire qu'elle �saura parler aux Africains� dont les dirigeants, qui �continuent de tra�ner des pieds� pour juger leurs criminels, n'auront �plus de pr�texte pour dire que la CPI, ce sont des Blancs pour juger des Noirs�. Professeur de droit public � l'Universit� de Pretoria, Christo Botha, qui a re�u Mme Bensouda l'an dernier, affirme aussi qu'elle peut, �parce qu'elle est africaine, apporter une contribution positive pour en finir avec la suspicion entre l'Afrique et la Cour�. Laurent Gbagbo, le Lib�rien Charles Taylor, le Congolais Jean-Pierre Bemba et d'autres ex-miliciens de RDC, toutes les personnes transf�r�es � la prison de la CPI pour y �tre jug�es viennent d'Afrique, sans compter les mandats d'arr�t lanc�s contre le pr�sident soudanais Omar el- B�chir ou encore Seif al-Islam Kadhafi, fils de l'ex-dirigeant libyen Mouammar Kadhafi. Hiss�ne Habr�, ancien pr�sident tchadien r�fugi� � Dakar depuis 1990, est �galement dans le collimateur de la justice pour crimes contre l'humanit� et, apr�s d'innombrables p�rip�ties, pourrait �galement �tre un jour jug�, soit en Belgique, soit au Rwanda.