[email protected] Dans sa chronique habituelle sur le quotidien Echourouk (DZ), l'�crivain Amine Zaoui a pos�, au d�but de ce mois, la question du si�cle : �Que lisent les partis islamistes ?� En fait, la forme interrogative �tait juste une clause de style puisque notre talentueux auteur s'est d�j� fait une religion l�-dessus, si on peut dire. Pour l'�crivain, ceux qui n'ont pas lu des ouvrages du patrimoine national, ceux qui n'ont pas lu notamment Bennabi, Lacheraf et Arkoun, ne peuvent pas constituer des partis politiques. �Je ne peux imaginer, dit-il, qu'un dirigeant islamiste utilise l'iPhone et l'Ipad, voyage en avion et en premi�re classe, dispose d'un site sur internet, alors qu'il ignore tout de ce qu'ont �crit les enfants de ce pays.� En fait, ce que retient Amine Zaoui d'un quart de si�cle de lecture du discours islamiste, c'est son extr�me pauvret�, sans attaches particuli�res avec les �crits de nos penseurs et de nos philosophes. C'est ainsi que des pr�dicateurs, �clabouss�s par des scandales, ont eu tout le loisir de polluer le cerveau de nos jeunes. Et Amine Zaoui de citer le cas du best-seller arabe du moment Ne d�sesp�re pas, du th�ologien saoudien A��dh Alqarni, qui s'est r�v�l� �tre un plagiat manifeste. On se souvient de quelle mani�re A'�dh Alqarni avait �t� encens�, voire adul�, par les m�dias alg�riens, dont Echourouk pr�cis�ment. En 2009, pr�c�d� par un battage qui n'avait rien � envier, toutes proportions gard�es, � l'accueil de M�dine, Alqarni avait daign� faire une halte en terre alg�rienne. Il avait ramen� dans ses bagages, outre son livre, un po�me sur l'Alg�rie, ce qui a failli noyer le pays sous un flot d'adr�naline nationale. Tout le monde sait que le proverbe �A beau mentir, qui vient de loin� a �t� mal expliqu� aux Alg�riens qui l'interpr�tent toujours en faveur du visiteur (menteur ?) �tranger(1). Dame : avec un livre dont on disait qu'il �tait aussi lu que le Coran, il avait d�j� la partie gagn�e. Mais en consacrant un po�me � l'Alg�rie, il a r�ussi � faire de nous des fans inconditionnels, comme le montre la discr�tion avec laquelle nos m�dias ont trait� cette affaire de plagiat. Or, l'affaire dure depuis des mois, voire depuis des ann�es, et oppose la Saoudienne Saloua Aloudhaidane � son compatriote Alqarni qu'elle accuse d'avoir pill� son �uvre. Le pr�dicateur aurait recopi� des passages entiers du livre intitul� C'est ainsi qu'ils ont vaincu le d�sespoir, publi� des ann�es auparavant par l'�crivaine. Cette derni�re raconte qu'� son insu, elle avait aid� le plagiaire en lui offrant un exemplaire de son livre. De plus, elle a affirm� r�cemment qu�A'�dh Alqarni lui avait propos� un d�dommagement financier pour prix de son silence, ce qu'elle avait refus�. L'affaire a donc connu un rebondissement la semaine derni�re avec la sentence rendue par le minist�re saoudien de la Communication. L'institution a, en effet, condamn� l'auteur du plagiat � une amende de 90 000 dollars am�ricains, et a d�cid� de retirer le livre contest� de la vente en Arabie saoudite. Je peux supposer, au risque de me tromper, que les bons croyants qui vendent ce livre, comme une eau b�nite, le retireront de nos �talages. Encore une de nos idoles import�es qui s'�croule, avec fracas, une chute accompagn�e par le silence assourdissant des disciples et des adorateurs ! Il semble cependant que le cheikh saoudien, �Qibla� des Alg�riens en mal de pi�t�, ne se soit pas content� de plagier( 2) une de ses compatriotes. Le chroniqueur du magazine Elaph Sammy Buha�ri rapporte le cas du po�te �gyptien Samir Farradj qui a d�cid� d'attaquer A'�dh Alqarni en justice pour le m�me motif. Il accuse le pr�dicateur saoudien d'avoir plagi� son livre Des po�tes tu�s par leur po�sie, paru en 1997, et devenu Des po�mes qui ont tu� leurs auteurs sous la signature du cheikh. Comme on peut le constater, ce n'est pas le respect des nuances qui �touffe Alqarni. Il faudra cependant v�rifier si le po�me consacr� � l'Alg�rie ne provient pas du pillage d'une �uvre plus ou moins connue. Qu'il suscite des acc�s de tr�mulation chez certaines cat�gories d'Alg�riens, d'accord, mais qu'il ne le fasse pas avec des EPO produits par d'autres que lui ! En d�pit de tout cela, il y a encore des gens qui d�fendent le pr�dicateur, rel�ve Sammy Buha�ri, parce qu'ils consid�rent que les attaques contre Alqarni font partie d'un complot imp�rialiste, lib�ral, la�que, et chr�tien. Les admirateurs irr�dentistes du cheikh pensent que ce sont des attaques contre l'Islam et dans l'int�r�t d'Isra�l, de l'Am�rique, et sans doute de l'Iran. La messe est dite ! Comme notre chroniqueur ne manque pas d'arguments, il interpelle le monde religieux et tous ceux qui font fatwas de tous d�lits. Il s'adresse plus particuli�rement � l'universit� Al-Azhar et aux hautes autorit�s religieuses saoudiennes avec cette question : �Quel est le ch�timent r�serv� � quelqu'un qui vole les id�es et les livres pour s'en attribuer la paternit� ? Faut-il lui appliquer le ch�timent r�serv� � un voleur de ch�vre par exemple ? Eclairez-nous, que Dieu vous �claire !� Que les fans et les clients du pr�dicateur se rassurent ! Ce n'est pas demain qu'ils verront A��dh Alqarni amput� du bras qui recopie. En revanche, il y a un Saoudien qui n'en m�ne pas large actuellement et qui subit les foudres officielles, conjugu�es au lynchage virtuel que les foules d'internautes pratiquent sur lui. Il s'agit du po�te et journaliste saoudien Hamza Kashogri, qui fait l'objet d'une action en justice pour avoir port� atteinte � l'image du Proph�te. Employ� au quotidien local Al-Bilad, notre confr�re a cru pouvoir contourner la censure ambiante en se r�pandant sur le site d'�changes Twitter. En bon wahhabite, il s'est insurg� contre la comm�moration du Mouloud, mais avec un peu trop de hardiesse aux yeux de ses compatriotes. C'est ainsi qu'il a �crit, s'adressant au Proph�te : �Le jour de ta naissance, je ne m'inclinerai pas devant toi, je n'embrasserai pas ta main, mais je te la serrerai d'�gal � �gal, je te sourirai comme tu me souriras, et je te parlerai seulement en tant qu'ami.� S'il s'en �tait tenu � ces banalit�s, ce serait pass� inaper�u, mais il en a rajout� comme ici : �Le jour de ta naissance, je me retrouve face � toi, l� o� je vais. Je dirai que j'ai aim� des choses en toi et que j'ai d�test� d'autres sans trop comprendre ces autres choses. Je dirai que j'ai aim� le r�volt� en toi, pour autant qu'il m'inspirait, et que je n'aime pas les aur�oles de la saintet�. Je ne prierai pas sur toi.� Devant les r�actions d'hostilit�, Hamza Kashogri a fait machine arri�re et s'est repenti, en expliquant qu'il avait ob�i � des impulsions irr�sistibles. Reste � savoir si cette d�fense figure dans le lexique du syst�me judiciaire saoudien. A. H. (1) On se souvient de la ferveur avec laquelle le cheikh y�m�nite Zendani, pharmacien de profession, et �copieur� de documentaires scientifiques anglo-saxons, avait �t� accueilli en Alg�rie durant les �ann�es FIS�. La Mecque des r�volutionnaires, devenue La Mecque des faux proph�tes, quelle d�cadence et �a continue ! (2) Alqarni a commis un autre �Best-Seller� intitul� Ne sois pas chagrin�, que des sp�cialistes ont compar� avec le livre de l'Am�ricain Dale Carnegie : D�barrasse-toi de l'anxi�t� et commence � vivre. Des insinuations de plagiat avaient fus� �� et l�, sans aller jusqu'� des attaques frontales.