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CHRONIQUE D�UNE �LECTION PAS COMME LES AUTRES LA PROBL�MATIQUE DU FICHIER NATIONAL �LECTORAL
Entre la main lourde pr�coce du FIS et les aveux tardifs de Zerhouni
La cl� de vo�te fondamentale de tout processus �lectoral repose sur l�existence d�un support mat�riel qualitatif et ad�quat, une collection organis�e d�informations de m�me nature regroup�es en une unit� ind�pendante de traitement se rapportant au corps �lectoral et aux �lecteurs : le fichier �lectoral. L�absence de ce moyen moderne de gestion de consultations �lectorales de plus en plus complexes politiquement et techniquement et d�un consensus minimum sur sa fiabilit� a de tous temps constitu� un facteur de pollution politique suppl�mentaire des sc�nes �lectorales, d�j� fort encombr�es de fausses pol�miques dans nos pays, qui s�essayent au dur apprentissage d�mocratique. En Tunisie, les r�centes �lections de l�Assembl�e constituante ont �t� report�es une premi�re fois � cause justement du fichier �lectoral qui n��tait pas d�ment r�vis�. Au S�n�gal, deuxi�me exemple d��lections organis�es en 2012 dans notre sph�re g�opolitique, le fichier �lectoral utilis� pour l��lection pr�sidentielle, dont le deuxi�me tour vient de d�livrer le secret de ses r�sultats, le fichier �lectoral a fait l�objet en 2010 d�un audit international qui a conclu � sa fiabilit� fondamentale. C�est peut-�tre pour cette raison que les partis politiques alg�riens ont accentu�, au cours de la p�riode qui a suivi la convocation du corps �lectoral pour les prochaines �lections l�gislatives du 10 mai prochain, leurs pressions multiples sur les services du minist�re de l�Int�rieur charg�s de l�organisation des �lections, afin d�obtenir une r�vision r�ellement �exceptionnelle� des listes du fichier �lectoral. Pour le Parti des travailleurs (PT), �les partis ont le droit de consulter les fichiers �lectoraux�. �Le minist�re de l�Int�rieur n�a pas � leur en interdire l�acc�s�, affirme le porte-parole du PT, Djelloul Djoudi. �Nous proposons dans ce cadre, ajoute-t-il, une double r�vision ordinaire du fichier �lectoral pour un meilleur assainissement.� M. Djoudi indique que �la participation des partis politiques � l��laboration du fichier �lectoral est plus que recommand�e et ce, des mois avant un scrutin�. �Pr�sentement, les d�lais ne sont pas suffisants�, estime-t-il. Le Rassemblement pour la culture et la d�mocratie (RCD) va plus loin ; il propose carr�ment �l�assainissement du fichier �lectoral par des institutions ind�pendantes et internationales, sans la participation du minist�re de l�Int�rieur�. Pour l�actuel patron du RCD, Mohcine Belab�s, �seule une organisation autonome en gestion et en financement peut aboutir � l�assainissement du fichier �lectoral d�une mani�re fiable et cr�dible�. Selon ce dernier responsable, �10% des �lecteurs sont virtuels. Des gens sont inscrits dans plusieurs communes, des personnes d�c�d�es ne sont pas radi�es, et dans des communes, on s�aper�oit qu�il y a de faux noms. L�assistance et la surveillance internationales restent les seules solutions pour garantir des �lections transparentes�. Seul le Front de lib�ration nationale (FLN) pense que �l�opposition, faute d�argument, focalise son discours sur la nonfiabilit� du fichier �lectoral pour crier, d�s le lendemain d�un scrutin, � la fraude�. Pourtant, quand nous continuons � enregistrer des d�clarations telles que celles dont s�est fendu � dix jours d�intervalle le premier responsable du d�partement minist�riel charg� de la gestion du fichier �lectoral, le ministre d�Etat, ministre de l�Int�rieur, Nourredine Yazid Zerhouni en 2002, nous sommes enclins � corroborer les propos du tout nouveau secr�taire g�n�ral du RCD actuel. En effet, et dans une conf�rence de presse organis�e le 10 septembre 2002, faisant le point des pr�paratifs des �lections l�gislatives de 2002, Zerhouni d�clarait : �Le fichier �lectoral comportait 85 497 doubles �lecteurs ou multiples inscriptions qui ont �t� radi�s � l�occasion de l�assainissement des listes �lectorales !..� Moins d�un mois plus tard et dans un point de presse face aux cam�ras de Canal Alg�rie, le m�me ministre enfon�a davantage le clou en d�clarant : �15% environ des femmes ont chang� de r�sidence et un nombre important de d�c�s n�ont pas �t� radi�s du fichier �lectoral�� Oser porter � la connaissance de l�opinion publique en 2002 apr�s 8 consultations �lectorales organis�es en moins de 7 ans (1995-2002) � la suite de la reprise du processus �lectoral interrompu en 1991, que le fichier �lectoral �tait dans cet �tat de d�labrement, a effectivement de quoi faire douter plus d�un sur le niveau de fiabilit� de ce fichier. Quand on sait que le minist�re de l�Int�rieur s�est dot�, d�s 1995, de puissants moyens informatiques capables de d�tecter en un seul clic de souris tous les doubles �lecteurs du fichier national et de les radier avec la m�me rapidit� que la man�uvre de souris qui les a identifi�s, la premi�re grosse question qui nous taraude l�esprit est la suivante : existe-t-il un fichier �lectoral national unique centralis� et informatis� ? Pour avoir assist� personnellement dans ma vie professionnelle ant�rieure � plusieurs r�unions de pr�paration d��lections au niveau du minist�re de l�Int�rieur, je puis affirmer de la mani�re la plus cat�gorique que ce fichier-l� n�existait pas avant 1997. Depuis, motus et bouche cousue ! Jusqu�� cette date, ce qui faisait en fait fonction de fichier �lectoral national �tait compos� d�un assemblage h�t�roclite de sous-fichiers de wilayas dont certains �taient carr�ment domicili�s dans des centres informatiques priv�s. Le plus consistant en volume de donn�es de ces fichiers �tait celui de la wilaya d�Alger, informatis� en 1984 et confi� � une entreprise de wilaya, l�EIWA. L�analyse succincte de son contenu nous donnera de pr�cieuses indications sur la mani�re dont il a �t� constitu� et surtout de la l�g�ret� avec laquelle il a �t� livr� � une certaine �poque (1990-1992) aux manipulations partisanes du parti dissous, qui pr�parait � sa fa�on les �lections l�gislatives d�cisives pour sa conqu�te du pouvoir de 1991. En comprenant ce qui s�est pass� � Alger, le lecteur d�duira de lui-m�me les situations bancales ayant caract�ris� les donn�es des fichiers �lectoraux de certaines wilayas qui n�ont, circonstances aggravantes, pas fait l�objet en leur temps du m�me effort d�assainissement radical que celui de la wilaya d�Alger. L�exemple significatif du fichier �lectoral de la wilaya d�Alger Constitu� au rythme des additions et couches de donn�es successives des diff�rentes �lections organis�es � l��re du parti unique, le fichier �lectoral de la wilaya d�Alger �tait jusqu�en 2000 un vieux et d�cal� syst�me informatique datant de l��poque o� il fallait mettre une blouse blanche pour acc�der � son syst�me nerveux central. Avant 1990, l�actualisation, l�assainissement et la conformit� de ce fichier avec la r�alit� d�mographique du corps �lectoral n�avaient jamais pos� probl�me, en raison, comme nous l�avons signal� dans l�une de nos pr�c�dentes chroniques, du peu d�int�r�t qu�accordait le parti- Etat FLN � la production et au traitement de la statistique �lectorale. A partir de 1990, date de la premi�re �lection pluraliste qui a vu le FIS prendre la t�te de la quasi-totalit� des APC de la wilaya, cet instrument de gestion de consultations �lectorales a commenc� � �tre projet� au c�ur d�un d�bat public aux interlocuteurs multiples : presse, opinion publique, partis. Au lieu de corriger les insuffisances �videntes de ce fichier qui �tait subitement devenu un enjeu d�mocratique de taille pour les batailles ayant valeur symbolique qui avaient pour th��tre la capitale du pays, le parti dissous a proc�d� � l��chelon de base de confection de ce fichier (les communes qui �taient entre ses mains) � des op�rations en inscription et radiations d��lecteurs qui n�ob�issaient qu�� une seule logique : pr�parer de la fa�on la plus minutieuse possible ces fichiers � participer � la victoire du parti aux l�gislatives de d�cembre 1991. Les cons�quences furent particuli�rement d�sastreuses, notamment pour les citoyens qui ne partageaient pas le programme �lectoral de ce parti. Le ch�timent inflig� � ces derniers : une radiation en douce, tout simplement ! Tout le monde se souvient encore des milliers de personnes qui ne trouvaient pas leurs noms sur les listes �lectorales le jour des �lections du 26 d�cembre et qui erraient d�un bureau de vote � un autre � la recherche d�sesp�r�e du centre de vote pouvant abriter leur acte �lectoral ; tout le monde a �galement remarqu� que ces citoyens spoli�s de leurs droits �lectoraux n�ont jamais port� le kamis et pour des centaines d�entre eux, ne le porteront probablement jamais. Il aura fallu attendre les lendemains de l�arr�t du processus �lectoral, entre la fin de l�ann�e 1993 et 1994, pour engager une salvatrice op�ration d�assainissement d�envergure pour venir � bout de ce bourrage �hont� dont le fichier �lectoral d�Alger garde aujourd�hui encore les traces �g�ologiques �. Pour avoir une id�e de l�ampleur de cette op�ration de compression ill�gale du fichier de la wilaya d�Alger, nous donnons ci-apr�s les chiffres les plus significatifs, extraits d�un rapport d�un document interne de la wilaya d�Alger que nous avons en notre possession(I): �Doubles et multiples inscrits radi�s : 29 106 ; cartes d��lecteurs radi�s dont les titulaires �taient inconnus : 42 073 ; r�vision annuelle ordinaire : 8 222 ; total 79 401.� Ce chiffre repr�sentait � lui seul plus de 7% du corps �lectoral total de la wilaya d�Alger qui �tait � fin 1993, c'est-�-dire avant les op�rations d�assainissement que nous venons de citer, de 1 062 803. S�agissant de militants de la cause du FIS, ce chiffre repr�sente �galement 10% des voix exprim�es en faveur du FIS. Quand on sait par ailleurs que le taux de participation � Alger, en 1991, �tait de 61,01% et que la �victoire� du FIS a �t� officiellement cr�dit�e d�une large majorit� de 56,11%, une simple op�ration arithm�tique aurait fait fondre le mirifique score �lectoral de ce parti de 347 698 � 268 297, c'est-�-dire largement en de�� de la barre de la majorit� (43,30 %) ! Un score exorcis� a posteriori des fant�mes des faux �lecteurs et des doubles et multiples inscrits, bien s�r ! Au moment d�achever la r�daction de cette chronique, nous apprenons que l�INSEE (centre de recherche), qui g�re pour le compte de l�Etat le fichier �lectoral fran�ais, vient de mettre en ligne sur Internet le fichier qui permettra � tous les fran�ais �lecteurs ou non de se livrer � une op�ration de contr�le sans limites dans le cadre de la future �lection pr�sidentielle fran�aise et que nous en sommes encore sous nos latitudes � discuter de la question de savoir si les repr�sentants des partis peuvent acc�der au terminaux informatiques du minist�re de l�Int�rieur, nous nous rendrons compte que la transparence du fichier �lectoral national sans doublons et sans fant�mes n�est pas pour demain, malheureusement ! K. M. (I) Rapport final d��valuation des pr�paratifs et du d�roulement de l��lection pr�sidentielle du 16 novembre 1996, wilaya d�Alger, novembre 1996 ,141 pages.