Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.
ENTRETIEN AVEC PHILIPPE TANCELIN, PO�TE, PROFESSEUR � L�UNIVERSIT� PARIS VIII ET FONDATEUR DE LA TROUPE EL ASSIFA La grande aventure du th��tre de l�immigration
Par Ahmed Cheniki Philippe Tancelin, ce �paysage humain�, pour reprendre ces beaux mots de Nazim Hikmet, est un po�te de l�insoumission, de la r�sistance qui continue, contre vents et mar�es, � traquer les injustices et � porter haut une parole po�tique travaill�e par l�in�vitable intrusion du social au moment o� les d�missions et les reniements marquent le territoire de la po�sie et du th��tre. Auteur de nombreux recueils po�tiques, il clame haut sa singularit�, offrant � la po�sie actuelle un ind�niable souffle humain. C�est vrai que Philippe Tancelin est un touche � tout : po�sie, th��tre, cin�ma, r�flexion politique insistant fortement sur la corr�lation entre tous les arts. Fondateur, avec Genevieve Clancy, du CICEP (Centre international et interuniversitaire de cr�ation d'espaces po�tiques), ce coureur de fond po�tique est un grand sp�cialiste des questions esth�tiques. Pour lui, comme d�ailleurs pour les grands po�tes, la po�sie a une efficacit� pratique. Ce n�est pas sans raison qu�il est de tous les combats et de toutes les r�sistances, il est l�un des premiers � avoir pris fait et cause, � partir des ann�es soixante-dix, pour des immigr�s, ghetto�s�s, marqu�s du sceau de l�ineffable, cr�ant une troupe de th��tre, El Assifa, un clin d��il � la r�sistance palestinienne, �voquant les probl�mes multiples de l�immigration. C��tait un v�ritable th��tre d�intervention qui s�engageait dans les luttes aupr�s de ces immigr�s. Dans cet entretien, Philippe Tancelin, professeur de philosophie esth�tique � l�universit� Paris VIII nous entretient de l�exp�rience du th��tre en milieu immigr�. Le Soir d�Alg�rie : Quand on parle de th��tre de l�immigration, on pense spontan�ment aux ann�es 1970. C�est durant cette p�riode justement que vous avez entam� votre exp�rience dans cet univers. Quelles sont les conditions sociologiques, politiques et artistiques qui ont permis l��mergence de ce th��tre ? Philippe Tancelin : Le th��tre de l'immigration des ann�es 1970 en France a �merg� depuis un contexte politique de contestation de la r�glementation de l'immigration � travers deux circulaires, l'une du ministre du Travail de l'�poque, M. Fontanet, et l'autre du ministre de l'Int�rieur de la m�me �poque, M. Marcellin. Ces circulaires �crivaient un cercle infernal pour les travailleurs dits �clandestins�, c'est-�-dire non recrut�s par l'ONI (Office national d'immigration), dans la mesure o� sans carte de travail, pas de carte de s�jour et sans carte de s�jour pas de carte de travail. Sous l'impulsion d'organisations d'extr�me gauche soutenues en partie par certains syndicats et associations caritatives, des gr�ves de la faim de travailleurs immigr�s, d�s 1972, pos�rent la question du droit des immigr�s tandis que dans le m�me temps, des actes racistes �taient perp�tr�s contre ces m�mes immigr�s (en majorit� Arabes du Maghreb). Se forma � l'�poque un Comit� de d�fense des droits et de la vie des travailleurs immigr�s (CDDVTI) rassemblant nombre d'intellectuels, d'artistes et de d�mocrates fran�ais qui soutinrent les gr�ves de la faim. Durant un an de ces luttes et gr�ves de la faim, le mouvement de contestation s'�tendit au point de g�n�rer la cr�ation du MTA (Mouvement des travailleurs arabes) qui lan�a une gr�ve g�n�rale des travailleurs arabes en France (clandestins et non clandestins). En 1973, la conjonction du MTA et du CDDVTI permit la pr�sence des travailleurs immigr�s et de Fran�ais antiracistes au grand rassemblement de la lutte autogestionnaire des LIP (usine de fabrication de montres). C'est au cours de ce rassemblement que naquit la premi�re troupe ouvri�re d'immigr�s en France et de Fran�ais (trois jeunes intellectuels) qui prit le nom : El Assifa (la temp�te) avec une premi�re pi�ce intitul�e �a travaille, �a travaille et �a ferme sa gueule. Cette premi�re pi�ce fut jou�e � travers toute la France plusieurs centaines de fois durant deux ans, dans les rassemblements politiques, les lieux de lutte antiraciste mais aussi les th��tres, les maisons de la culture, les cin�mas de province... La pi�ce retra�ait le parcours d'un immigr� depuis son pays d'origine jusqu'� son embauche ou son ch�mage en France. La pi�ce eut un �norme succ�s et fut couronn�e par les critiques de th��tre et nombres d'intellectuels qui �crivirent dans les journaux. La troupe El Assifa v�cut ainsi trois ans de gloire et de combat sur le front culturel antiraciste et les luttes ouvri�res. Elle donna naissance en 1975 au collectif Assifa regroupant travailleurs et artistes-intellectuels fran�ais et immigr�s. On peut dire qu�El Assifa fut le d�tonateur d'un immense foyer culturel th��tral de l'immigration maghr�bine qui vit surgir de nombreuses troupes de travailleurs immigr�s et de jeunes artistes arabes (on peut citer parmi les plus connues Week-end � Nanterre, la Kahina (troupe de femmes) etc., le tout d�boucha en juin 1975 sur le premier festival de th��tre immigr� dont une partie fut abrit�e par Peter Brook dans son th��tre des bouffes du Nord. Comment avez-vous d�couvert ce th��tre ? Dans quelles conditions aviez-vous commenc� cette exp�rience ? Pour ma part, je fis partie des trois Fran�ais qui all�rent au rassemblement des LIP en 1973 avec la premi�re pi�ce de El Assifa cit�e plus haut. Je pr�cise que toute cette exp�rience th��trale a fait l'objet d'un ouvrage de r�flexion sur la culture, le th��tre et les luttes de 1970 � 1979. Ce livre intitul� Tiers-Id�es a �t� �crit par moi-m�me et l'une des deux autres Fran�aises du groupe El Assifa (Genevi�ve Clancy, � l'�poque jeune universitaire philosophe et po�te). La troupe comprenait en 1973 sept personnes (3 jeunes intellectuels fran�ais et quatre travailleurs arabes dont deux des usines Chausson et Billancourt et les deux autres, travailleurs clandestins dans des entreprises de d�m�nagement et de nettoyage. Les trois Fran�ais de la troupe ont fond� en 1973 le CDDVTI dont j'ai parl� plus avant. Lorsque nous animions en 1976 une radio libre clandestine nomm�e Radio Assifa qui donna ensuite naissance en 1981 � Radio-Soleil goutte d'or, je me souviens avoir re�u, avec Genevi�ve Clancy, Kateb Yacine qui nous parla de son exp�rience de th��tre dans la campagne alg�rienne, et durant l'�mission nous e�mes le plaisir de confronter nos exp�riences r�ciproques de th��tre en milieu rural populaire. C'est � cette occasion que Kateb nous parla de ses propres orientations, de sa d�marche dont nous avions connaissance depuis la fin des ann�es 1960 � travers le premier accueil que Jean-Marie Serreau lui r�servait dans le petit Th��tre de l'�p�e de bois au c�ur du quartier Mouffetard � Paris. Je ne puis dire Si Kateb a directement influenc� le premier th��tre de travailleurs immigr�s. Ce qui est certain, c'est que le mouvement social, politique d'o� �merge ce th��tre r�sonnait tr�s fortement avec les orientations esth�tiques et politiques de Kateb. Ce qu�El Assifa va cr�er participe pour une part de la m�moire de cette �poque yacinienne mais je crois aussi qu�El Assifa avait sa sp�cificit�, son originalit� car elle n'�tait pas un th��tre d'auteur mais un th��tre de cr�ation collective au sens le plus radical et pur du terme. Quelle fonction avait ce th��tre ? Quelle place occupait-il dans le contexte th��tral, artistique, sociologique et politique de l��poque ? Les troupes faisaient-elles un travail de sensibilisation politique et sociale en direction des populations immigr�es ? J'ai d�j� en partie r�pondu � votre question, mais je pourrais ajouter qu�El Assifa puis plus tard les autres troupes et groupes qui se formaient occup�rent du moins au d�but une place tr�s importante dans le contexte th��tral artistique de l'�poque. J'ai �voqu� Peter Brook, mais je pourrais aussi citer Ariane Mnouchkine qui nous re�ut au Th��tre du Soleil en 1974. De m�me en 1975 lors d'une arrestation au Maroc du leader arabe d�El Assifa, Jean-Louis Barrault et Madeleine Renaud nous apport�rent leur soutien. Je ne parlerai pas en d�tail de la seconde pi�ce C'est la vie de ch�teau pour que �a dure qui fut pr�sent�e en 1975 � Paris dans la l�gendaire salle St Bruno et qui recueillit lors de cette premi�re des personnalit�s comme Claude Mauriac, Michel Foucault, Gilles Deleuze, Pierre Halbwachs, Jean-Paul Sartre et tant d'autres artistes musiciens, peintres, cin�astes qui soutenaient d'un point de vue politique et esth�tique la d�marche de ces immigr�s revendiquant, � travers leur lutte sociale et politique, une dimension culturelle, philosophique, esth�tique qui int�ressait ces grands intellectuels et artistes. Les troupes �taient-elles instrument�es par certains groupes politiques ? S�appuient-elles sur des soutiens militants ? L�acte th��tral faisait-il partie d�un projet politique et militant ? Les troupes, dont El Assifa, ne s'appuyaient pas sur les partis politiques mais sur les mouvements sociaux de revendications des populations immigr�es ainsi que sur quelques forces syndicales (CFDT) et associations de soutien caritatives. La force politique et de propagande de ce th��tre reposait sur une grande part du tissu associatif de l'�poque et sur des groupes d'extr�me gauche (Mouvement Mao, Lutte ouvri�re). L'acte th��tral �tait nourri d'un engagement militant plus culturel que politique au sens �troit de la politique. Il y avait effectivement un projet culturel artistique militant pour une autre culture et d'autres cat�gories esth�tiques que celles qui dominent l'ensemble de la cr�ation. C'est pourquoi, les �professionnels du th��tre� s'int�ress�rent si vivement � cette exp�rience de th��tre populaire au sens de th��tre par le peuple. Comment se d�finissait-il artistiquement ? Est-ce un th��tre d�intervention, type agit-prop ? Quelles �taient ses sources, ses influences et ses r�f�rences ? Au d�but, il s'agit d'un th��tre d'agitprop, issu du mouvement de 1968 qui, entre 1970 et 1972, se transforme en th��tre d'intervention ; il ne se revendiquera comme th��tre artistique qu'� partir de 1973 dans le brasier culturel et social du rassemblement des LIP. Les sources de ce th��tre sont le mouvement social et ses potentialit�s culturelles cr�atrices. Ses r�f�rences th��trales ne sont pas d�clar�es, est-il m�me conscient de ce qu'il devait au pass�... Ce n'est pas certain mais l'essentiel demeure qu'il porte les plus beaux fruits d'un r�ve du th��tre des ann�es 1920 en Europe, de 1936 en France... Comme Monsieur Jourdain qui faisait de la prose sans le savoir, le th��tre du peuple r�sonne de Brecht et des autres... mais les autres ne s'inspirent- ils pas de ces luttes d'hier et d'aujourd'hui qui sont le vivier d'une autre culture d'une autre conception de la cr�ation o� le �je� s'est effac� du devant de la sc�ne subjective, au profit du �nous� sans dispara�tre pour autant. Quant aux influences de ce th��tre des luttes, elles seront grandes sur la cr�ation contemporaine en g�n�ral, elles ne perdront de leur influence qu'avec le recul des luttes sociales et leur po�sie et sur cela, le th��tre d'aujourd'hui, le th��tre dominant la production artistique actuelle, doit s'interroger. Avait-il des soutiens dans le milieu th��tral conventionnel ? J'ai en partie r�pondu ci-avant � votre question dans la mesure o� le soutien suscit� par le th��tre des travailleurs se situe dans le champ de l'intelligentsia et du monde artistique de gauche de l'�poque qui s'interrogent sur le r�le et la place des luttes et de l'histoire dans la cr�ation. Il va de soi que le th��tre bourgeois traditionnel ne porte gu�re d'attention � tout cela. Quels th�mes abordait-il ? Quels sont les lieux dans lesquels ils pr�sentaient leurs pi�ces ? Etaient-ils soutenus par les pouvoirs publics ? Locaux ? Moyens mat�riels et financiers ? On peut et doit parler d'un th��tre pauvre au sens grotowskien du terme, d'un th��tre de la vie en commun des hommes au sens brechtien dont les moyens mat�riels sont faibles mais si riches les moyens humains. Je n'ai pas souvenance de soutiens financiers publics mais parfois locaux suivant les municipalit�s et le rapport de forces des luttes selon les p�riodes. Pour El Assifa, elle n'eut qu'une seule fois un unique subvention de la fondation Patrice Lumumba (jeune r�volutionnaire africain des ann�es 1960) Peut-on parler d�une nouvelle esth�tique apparue dans le th��tre immigr� ? Quelles sont les composantes humaines de ces groupes ? Quel public allait voir ce th��tre ? On doit effectivement parler d'une nouvelle esth�tique de ce th��tre de l'immigration. C'est une esth�tique que je nomme dans un de mes ouvrages �une esth�tique du collectif�, c'est-�dire cette expression collective issue de la plus grande exp�rience sensible de la vie souffrante des hommes et des femmes et de leur lutte radicale pour leur dignit� et le respect qu'on leur doit. C'est une esth�tique de la verticalit� humaine dans un monde de profits qui cherche � coucher l'homme et � le r�duire en esclave. C'est une esth�tique du r�ve inachev� et inachevable de l'humanit� pour la beaut� de son �tre ensemble face � la difficult�. C'est une esth�tique du rassemblement qui parle d'ici et de maintenant en tant qu'instant d'�ternit� et espace d'utopie. C'est une esth�tique de la libert� commune qui commence avec les autres et chacun dans le respect de tous. Quelle place occupaient les femmes dans ce th��tre ? La Troupe Kahina, issue de ce mouvement de la fin des ann�es 1970, est un exemple de la place que les femmes ont su prendre dans ce champ de l'expression culturelle artistique des luttes. Ce fut une place difficile � occuper, � cr�er m�me, compte tenu des r�sistances culturelles religieuses des populations des femmes du Maghreb mais pas moins des femmes fran�aises dont la lutte depuis 1968 n'est pas termin�e loin de l�. En dehors de la sp�cificit� de Kahina, la place des femmes dans ce th��tre de l'immigration est peu importante mais elle �merge et on peut voir dans certaines pi�ces de cette �poque des sc�nes des pays d'origine au sein desquelles commence � pointer la revendication des filles, leur r�sistance contre une certaine r�signation des m�res devant le sort des fils, des p�res partis en occident. Je crois que ce mouvement de th��tre a initi� �galement une prise de conscience sur le r�le primordial des femmes dans la r�sistance ou au contraire l'acceptation de la situation d'immigr� des �poux et des fils. On peut voir ici et l� des sc�nes de retour au pays o� l'homme est soutenu par la femme pour r�sister � l'oppression, comment elle lui parle de la dignit� d'�tre Homme (au masculin comme au f�minin). Ce th��tre ne sacrifiait-il pas le c�t� artistique pour favoriser l�expression ? Que repr�sentent les nouveaux auteurs dramatiques maghr�bins ? Que deviennent les troupes et les com�diens ? A l'occasion de la seconde pi�ce d'El Assifa, il y eut un grand d�bat sur la question de l'artistique et de la revendication politique. Notre livre Tiers-id�es d�j� cit� s'empare de ce d�bat pour r�affirmer qu'un des caract�res r�volutionnaires de ce th��tre a consist� � revendiquer une place dans la cr�ation d'une nouvelle esth�tique qui ne s�parait pas la dimension politique de la lutte et la dimension esth�tique de son expression. C'est dire en cela qu'une partie du th��tre immigr� de cette �poque a directement particip� � l'�volution du th��tre en g�n�ral. Cette participation s'est estomp�e, je l'ai dit avec le recul, des luttes mais la probl�matique demeure et je ne pourrai conclure sur ce point que par ce slogan d'El Assifa repris par d'autres : �Rien de trop beau pour nos luttes et toujours plus belle notre dignit� r�sistante.� Apr�s le th��tre dit immigr�, va appara�tre le th��tre dit beur. Dans les ann�es 1990-2000, nous avons surtout affaire � des auteurs r�cemment install�s en France comme Kacimi, Chouaki, Bena�ssa, Fellag ou Agoumi. Comment expliquez-vous cette nouvelle situation ? Comment l�immigration a-t-elle �t� saisie par les hommes de th��tre ? Le th��tre de l'immigration � sa naissance n'a pas �t� un th��tre d'auteur, mais un th��tre du collectif dans ce que ce terme peut rev�tir de plus noble et respectable. Au cours des ann�es 1980, les troupes, les groupes se sont dissous, les com�diens travailleurs ont pour certains d'entre eux repris le travail d'usine, d'entreprise, d'autres se sont engag�s sur une voie plus exclusivement artistique avec plus ou moins de r�ussite. Les nouveaux dramaturges �beur� m�me si je n'aime pas ce terme, sont d'une autre g�n�ration qui n'a pas connu l'exp�rience des luttes et du collectif mais n'ont pas moins profit� de la m�moire vivante que les actrices et les acteurs des ann�es 1970 ont pu leur transmettre. Cette transmission s'est faite plus effectivement au sein des populations immigr�es qu'indig�ne. Le r�le de la famille fut � ce sujet sans doute important. Le nouveau th��tre d'auteurs arabes install�s en France est porteur d'un espoir qu'il rend visible, celui d'une intelligence sensible des communaut�s entre elles, la confrontation de leurs originalit�s. Ce n'est pas, fort heureusement, un th��tre de l'int�gration, c'est-�-dire de l'effacement, mais un th��tre de �la pr�sence� enti�re sp�cifique et inesp�r�e de la soci�t�. Et c'est cette pr�sence qui cr�e l'identit� commune et non pas l'identit� qui autoriserait la pr�sence. C'est, je crois, ce qu'il faut comprendre aujourd'hui � travers l'expression dramatique. Je ne crois pas que les �hommes� de th��tre se soient empar�s de la question de l'immigration. C'est dommage. Ils ont plus cherch� dans la rubrique du pluriculturel ou de l'interculturel sans bien saisir, sauf quelques rares, que l'immigration dans son mouvement culturel artistique posait d'autres termes plus essentiels... Je veux dire qu'elle prenait la parole non point pour se faire conna�tre ou reconna�tre mais pour parler � �galit� de parole avec les autres dans une langue qui �tait celle de la r�sistance au quotidien dans la solidarit� avec la communaut� indig�ne... L'immigration a invent� une langue solidaire des langues d'origine et de la langue d'accueil, une solidarit� de langues, une troisi�me langue intervallaire des deux autres, fond�e sur le combat commun des �tres pour l'expression de leur commun et original devenir ensemble en toute qu�te d'�quit�.