A l�international, le risque de fraude en entreprise a augment� avec la crise. Dans un entretien accord� r�cemment au quotidien fran�ais Les Echos (�dition du 8 janvier 2013), Mohamed Nassiri, sp�cialiste des probl�matiques de d�linquance financi�re, livre les meilleures m�thodes pr�ventives pour limiter les fraudes et quelques cl�s de la d�tection a posteriori. L�OCDE a fait de la lutte contre ces fraudes une de ses priorit�s. L�Alg�rie est cibl�e par ces pratiques, tant de la part des entreprises �trang�res de dimension moyenne que des multinationales. Le gouvernement alg�rien n�est pas �quip� pour y faire face. Dans cet entretien, Mohamed Nassiri expose quelques bonnes pratiques pour limiter la fraude dans l�entreprise, mais aussi pour la tracer en cas de soup�ons. Il consid�re que �la fraude est un sujet qui touche toutes les entreprises, sans exception : les enqu�tes faites sur le terrain par de grands cabinets d�audit montrent que la fraude financi�re est largement r�pandue sous ses trois principales facettes : les d�tournements d�actifs, la corruption et l��tablissement d��tats financiers frauduleux, c'est-�-dire la manipulation des comptes communiqu�s aux tiers. La crise, qui s�vit depuis 2008, a favoris� les fraudes pour deux raisons. D�un c�t� parce que les fraudeurs, de plus en plus nombreux, cherchent � maintenir leur niveau de vie, alors que celui de toute la population baisse. De l�autre, les entreprises r�duisent leurs budgets et en particulier celui de leur contr�le : un auditeur interne constitue une charge fixe mensuelle importante et ne produit pas� Il semble que les grandes entreprises soient plus affect�es que les petites, mais c�est peut-�tre parce qu�elles disposent de moyens de d�tection bien sup�rieurs. Concernant les PME, son diagnostic est encore plus tranch� : �Les PME sont moins soucieuses du risque de fraude : ce n�est pas leur priorit�, elles sont avant tout concentr�es sur leur activit� et la croissance de leur chiffre d�affaires. Contrairement � ce que l�on pense, beaucoup de fraudes sont r�alis�es par le management : autour de 30%, selon moi. Or, les cons�quences de ces fraudes peuvent �tre dramatiques pour la soci�t�, beaucoup plus que les fraudes r�alis�es par les salari�s ou la fraude externe.� L�audit de fraude, une nouvelle discipline Interrog� sur les m�thodes de d�tection, a posteriori, de la fraude en entreprise, qu�il recommanderait, Mohamed Nassiri fait part des changements op�r�s depuis quelque temps : �Bien install� aux Etats-Unis, l�audit de fraude est une nouvelle discipline qui commence � se d�velopper en France. Concr�tement, c�est un audit orient� sur la recherche des stratag�mes frauduleux, notamment ceux qui sont de nature � recevoir une qualification p�nale. On analyse les indicateurs de fraude et on d�finit un plan d�investigation. Il existe des techniques, des logiciels informatiques d�analyse et d�investigation, s�appuyant, pour certains, sur des lois statistiques. L��tude de l�exception est la r�gle de l�audit de fraude : � chaque exception, il y a un risque. On proc�de aussi � des entretiens avec les employ�s, � des informations aupr�s des tiers, voire � l��tude des relev�s t�l�phoniques et des enregistrements informatiques� Sans sortir du cadre l�gal, bien s�r.� Mais alors quelles m�thodes de pr�vention pr�coniser ? Mohamed Nassiri a ses solutions : �Il faut d�abord proc�der � une �valuation des risques de fraude dans la structure. C�est un processus qui consiste � cartographier les risques propres � l�entreprise, en consid�rant son environnement interne et externe, et � lister en parall�le les mesures anti-fraude mises en place en interne. On obtient ainsi �les zones de non-couverture � sur lesquelles r�fl�chir. On peut alors d�cider d�accepter du risque, en particulier si sa pr�vention se r�v�le plus co�teuse que la perte potentielle.� Il propose aussi une m�thode plus compl�te : �On peut aussi adopter une strat�gie d��vitement, en supprimant par exemple un produit ou une activit� qui pr�sente un fort risque de fraude. On peut aussi opter pour une strat�gie de transfert, en s�assurant. D�autre part, il est possible d�avoir une politique de r�duction de la fraude en multipliant les mesures pr�ventives. Parmi elles, la v�rification des ant�c�dents du personnel � l�embauche, la mise en place de programmes anti-fraude et la communication continue sur ce programme, en interne.� Mettre en place une bonne gestion de la performance En fait, il y a une multitude de solutions � mettre en chantier, toutes indispensables pour pr�venir et lutter contre la fraude en entreprise, notamment pour Mohamed Nassiri ��.s�assurer que l�on a une bonne gestion de la performance et de la r�mun�ration du personnel : si l�entreprise pratique des salaires sous-�valu�s par rapport au march�, elle donne des motivations aux fraudeurs potentiels. En outre, il faut analyser les relations avec ses propres partenaires d�affaires (fournisseurs, clients, etc.) afin d�identifier tout probl�me de nature � favoriser une fraude : difficult�s financi�res, int�grit�, r�putation� Il vaut mieux, l� aussi, travailler avec des personnes de confiance. Enfin, il existe des proc�dures simples, comme la mise en place d��chelons de validations multiples (par exemple pour la validation des virements), la s�paration des t�ches, la mise en place de chartes �thiques, de contr�les al�atoires, de la tra�abilit� des op�rations et d�indicateurs de fraude qui mettent en �vidence les montants suspects. Dans les grandes entreprises, un comit� d�audit constitue aussi un moyen de contr�le du management. � Tout un programme. Des centaines d�entreprises �trang�res, PME et multinationales, se sont install�es ces derni�res ann�es en Alg�rie, ou y commercent : les fraudes en tous genres font rage. Le gouvernement alg�rien n�est pas �quip� pour y faire face ; il est temps qu�il �tablisse un diagnostic et d�finisse une strat�gie de lutte contre ces fraudes. Pour y parvenir, la coop�ration internationale est de mise, avec l�OCDE notamment (voir article ci-dessous). Synth�se de Djilali Hadjadj (*) L�audit de fraude et la d�linquance financi�re. Le guide pratique des auditeurs et des entreprises. Mohamed Nassiri, chez Emerit Publishing (France). FISCALIT� � L�INTERNATIONAL L'OCDE s'attaque � Google, Amazon ou Apple L'Organisation pour la coop�ration et le d�veloppement �conomiques (OCDE, organisation des pays riches), en pointe dans la lutte contre les paradis fiscaux, s'attaque aux pratiques d'optimisation fiscale des multinationales. Elle compte modifier les r�gles internationales en vigueur. L'OCDE lance une nouvelle fronde contre l'�vasion fiscale. Cette fois, il ne s'agit plus de traquer les avoirs des personnes physiques cach�s dans les paradis fiscaux. L'organisation s'attaque aux tours de passe-passe des multinationales qui leur permettent, en toute l�galit�, de localiser des profits dans des juridictions peu ou pas tax�es, afin d'�chapper � l'imp�t sur le lieu de leur activit�. Plusieurs entreprises � Google, Amazon (achats via internet), Apple ou Starbucks �sont vis�es. L'organisation internationale agit dans un contexte politique tr�s favorable. Tous les grands pays avanc�s, Etats-Unis en t�te, sont confront�s � de graves probl�mes budg�taires. C'est � l'occasion du prochain G20 �Finances�, � Moscou les 14 et 15 f�vrier, que l'OCDE exposera son projet avant de pr�senter, en juillet ou en septembre 2013, un plan d'action d�taill�. Une fois n'est pas coutume, les pays d�velopp�s peuvent compter sur le soutien des grands pays �mergents � l'Inde, la Chine, le Br�sil, la Russie �, qui se plaignent depuis des ann�es de ne pouvoir tirer profit sur le plan fiscal de la pr�sence des groupes �trangers sur leur sol. Coquilles vides Si l'OCDE privil�gie l'enceinte du G20 pour pousser ses pions, c'est pour contourner la r�sistance de petits Etats europ�ens, comme la Suisse, le Luxembourg ou m�me l'Irlande, qui affiche l'une des plus faibles impositions sur les soci�t�s � 12,5%. Sachant qu'en mati�re fiscale, la r�gle de l'unanimit� s'applique dans l'Union europ�enne qui autorise de facto le dumping fiscal. L'objectif de l'OCDE n'est pas de relever les taux d'imposition, au contraire. �Des taux bas, c'est mieux pour la croissance. Mais encore faut-il pouvoir collecter l'imp�t !� note un expert fiscal de l'organisation. L'objectif de l'organisation est de changer les r�gles en vigueur qui favorisent les pratiques d'optimisation fiscale en toute l�galit�. Le sch�ma de base consiste � localiser les produits de vente dans des coquilles vides install�es dans des paradis fiscaux. C'est la fameuse technique des �prix de transfert�. Si toutes les multinationales y ont recours, la pratique a explos� avec l'envol�e du secteur num�rique qui se passe d'activit� physique, et tirent leur profit de droits de propri�t� intellectuelle, facilement d�localisables. L'exemple caricatural, c'est Google : une maison m�re aux Etats-Unis, une filiale europ�enne install�e en Irlande, des royalties vers�es aux Pays-Bas avant d'atterrir aux Bermudes. R�sultat, un imp�t quasi nul et pas un dollar pour le pays d'origine, les Etats-Unis, o� le rendement de l'imp�t sur les soci�t�s ne d�passe pas 10%. Les Etats veulent changer les r�gles pour emp�cher que la fiscalit� ne soit d�connect�e de l'activit� r�elle. Pour emp�cher que Google ne paye que 4% d'imp�t en Europe. Parmi les r�formes envisag�es figure l'interdiction des soci�t�s qui ne sont reli�es � aucune activit� physique. Autre piste : �neutraliser � les soci�t�s hybrides qui permettent une double nationalit� fiscale. Ainsi, pour les Etats-Unis Google Europe est une soci�t� irlandaise ; mais en Irlande, c'est une soci�t� des Bermudes. L'OCDE souhaiterait rassembler ces nouvelles r�gles dans une convention internationale, sign�e par un maximum d'Etats, qui s'imposerait ensuite aux l�gislations nationales.