En convoquant hier une rencontre des magistrats de l'Est du pays pour débattre des problèmes de la corporation, le président du Syndicat national des magistrats (SNM), Djamel Aïdouni, ne s'attendait pas, semble-t-il, à une salve de critiques. Des magistrats, en colère et déçus par le travail du SNM, ont même demandé sa démission. Les juges n'ont plus confiance en leur syndicat et ils le font savoir à son président, lequel a essuyé, lui et le bureau exécutif, hier à partir de Constantine, un chapelet de critiques et de reproches. Les magistrats, qui portaient l'estocade au syndicat n'y sont pas allés de main morte et ont vidé leur sac. «Le syndicat est une direction sous tutelle de l'administration. Le syndicat ne fait que draguer le pouvoir. Tout le monde nous prend pour des faibles parce que nous sommes des agneaux», a lancé un juge sous un tonnerre d'applaudissements de ses confrères. Et à un substitut d'un procureur de la République d'enchaîner, très en colère : «Treize ans que vous activez, qu'est-ce que vous avez apporté à la corporation ? Le syndicat n'est pas habilité à parler en notre nom. Monsieur, déposez votre démission.» Une demande, d'ailleurs qui est revenue dans la bouche des juges plusieurs fois tout au long de la rencontre. Une proposition pour convoquer une assemblée extraordinaire du syndicat, dont l'ordre du jour portera sur la révision des statuts intérieurs du syndicat a été formulée par les intervenants qui ne veulent plus, disent-ils, «garder le silence». Aussi, ont-ils exigé du président de fixer sur place une date pour débattre de toutes les questions et trouver des solutions concrètes aux problèmes dans lesquels se débat la corporation depuis plusieurs années. Des voix s'élèvent alors pour proposer l'organisation d'un sit-in devant le ministère de la Justice, pour revendiquer les droits de la corporation qui a fait l'objet dernièrement, estiment-ils, d'attaques infondées. «Nous n'avons rien à perdre. Nous sommes l'élite de la société», dira un juge. Et à son confrère de demander au président «de quels force et poids dispose- t-il pour faire pression sur le ministère ». En effet, la colère des magistrats était telle que ces derniers se sont lâchés, profitant de la tribune qui leur était offerte à cette occasion, eux qui sont tenus par le droit de réserve pour dire toute leur amertume et réclamer plus de dignité. En ce sens, certains d'entre eux ont demandé à ce que les pressions qui s'exercent sur les magistrats de toutes parts cessent. «Le magistrat est soumis à des pressions. Nous sommes persécutés. La justice doit être indépendante», a souligné un intervenant. Avant de répondre aux magistrats, le président s'excusera auprès des journalistes en leur demandant de quitter la salle. Ce dernier voulait répondre à un magistrat à propos du service national ; il ne pouvait pas parler devant la presse.