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S�curit� alimentaire en Alg�rie
La subvention, ce facteur handicapant
Publié dans Le Soir d'Algérie le 09 - 04 - 2013

A l�occasion d�un s�minaire sur la s�curit� alimentaire organis� hier, � Alger, � l�initiative du Forum des chefs d�entreprises (FCE), une question de taille est revenue au-devant de la sc�ne : la subvention des produits de premi�re n�cessit�. Si le ministre de l�Agriculture pense que les subventions dans son secteur repr�sentent une facture tr�s minime et qu�il n�est pas possible de sortir dans l�imm�diat de la politique de soutien d�une mani�re brutale, vu la politique nutritionnelle du pays, d�autres, tels que les chefs d�entreprises et les repr�sentants d�op�rateurs �conomiques, consid�rent cette approche comme un v�ritable frein pour le d�veloppement des fili�res agricoles. Une menace � long terme sur la s�curit� alimentaire du pays.
Bena�ssa, ministre de l�agriculture :
�Les subventions ne doivent pas influer sur la production nationale�
�Il y a la subvention � la production agricole et les subventions aux produits � la consommation. Il est convenu dans le monde entier que l�agriculture est un m�tier � risque. Il faut donc accompagner l�agriculteur et le prot�ger. Pour ce qui est des produits alimentaires subventionn�s, cela rentre dans la politique nutritionnelle du pays qui a pour premier objectif, d�assurer un minimum de prot�ines animales et v�g�tales pour tous les alg�riens. Ce qu�il faut aussi savoir, c�est que le montant des subventions aux produits de premi�re n�cessit�, qui sont le pain, le lait, le sucre, la semoule et l�huile, ne repr�sente que 1,1% du PIB du pays. C�est tr�s minime par rapport aux autres subventions. Maintenant, il ne faut pas que la politique de soutien perturbe le march� et la production nationale en la mati�re. Il ne faut pas que le producteur pense qu�il est tenu de travailler sur un produit parce qu�il est � la base subventionn�. L��quation est l� et pour la r�ussir il faut une approche d�ing�nierie, notamment le travail qui est en train de se faire pour rationnaliser les subventions et encourager en parall�le le d�veloppement de la production nationale�.
R�da Hamiani, pr�sident du FCE :
�Les subventions profitent aux riches et aux pays limitrophes�
�C�est pour avoir une certaine paix sociale que le gouvernement alg�rien continue de subventionner les produits de premi�re n�cessit�. Mais jusqu�� quand ? Le paradoxe est que ces soutiens profitent aux riches et aux pays limitrophes, tels que la Tunisie, le Maroc, le Mali, le Niger et la Libye. Dans les pays d�velopp�s, la subvention est inject�e dans la production. C�est donc le producteur qu�on subventionne et non pas le produit fini. Car lorsqu�on subventionne le produit fini pour faire baisser les prix, personne ne songera � investir dans le secteur, car il n�y a pas de marge de b�n�fice. Si nous voulons favoriser la production et augmenter l�offre c�est donc en amont qu�il faut injecter de l�argent. Il faudra que le gouvernement trouve le moyen de faire �voluer cette subvention � travers une transition du produit fini vers la production de mati�res premi�res. Tel est le d�fi. Il est vrai que c�est un peu difficile puisque la politique actuelle fait de l�apaisement social sa priorit�, mais si l�on veut rester dans le domaine strictement �conomique, il faut revenir � une logique plus orthodoxe, car la subvention est un facteur handicapant. Demain, m�me avec notre argent, nous risquons de ne pas trouver qui nous vendre des produits de premi�re n�cessit�.
Issad Rabrab, pr�sident de Cevital :
�Nous vivons au-dessus de nos moyens�
La politique de subvention ne se pose pas uniquement comme un handicap par rapport au d�veloppement des fili�res, mais pire encore, elle fait que nous vivons au-dessus de nos moyens. Aussi, ce que nous importons et nous subventionnons, � l�exemple du bl�, est en partie d�tourn� pour l�aliment de b�tail et plus grave encore, pour nourrir les pays voisins. Des produits subventionn�s par l�Etat traversent nos fronti�res pour �tre vendus ailleurs. Nous nourrissons environ 12 millions d��mes humaines, au niveau des pays limitrophes. Il faut aussi regarder les poubelles des Alg�riens pour se rendre compte du gaspillage. Maintenant, il est normal que l�Etat vienne en aide aux familles n�cessiteuses, mais au lieu de subventionner les produits de premi�re n�cessit� il faut prendre cet argent et le distribuer directement aux familles qui sont dans le besoin et vendre les produits � leur v�ritable prix. Ce qui permettra moins de gaspillage et nos produits n�iront pas dans l�aliment de b�tail et ne traverseront pas nos fronti�res pour atterrir chez les pays voisins. Il faut changer les modes de subvention, car nous vivons au dessus de nos moyens. Dans les pays d�velopp�s, tels que la France, les produits de premi�re n�cessit� sont par exemple d�tax�s. Le co�t des subventions actuelles revient � plus de 3 millions de familles de six personnes chacune, ce qui revient � 18 millions d��mes. Les subventions de produits de premi�re n�cessit� co�tent 13 milliards de dollars � l�Alg�rie. Si nous divisons cette somme par 4 000 dollars, vous avez 3 millions de familles qui peuvent b�n�ficier chacune, directement de cette somme. On parle d�un montant de subvention qui repr�sente un taux de 1,1% du produit int�rieur brut (PIB), de l�Alg�rie. Ça peut para�tre minime sauf qu�il faut savoir que le PIB de l�Alg�rie est de 150 milliards de dollars. Faites le calcul et vous allez constater par vous-m�me ce que �a donne comme chiffre. Ce n�est pas parce que nous avons de l�argent que nous pouvons nous permettre de le gaspiller. Je donnerais un exemple par rapport au gasoil que nous importons et que nous vendons sur le march� alg�rien � un prix moindre que celui de l�importation. Entretemps des milliers de litres de gasoil traversent chaque ann�e nos fronti�res au profit des pays voisins. Ce n�est pas normal ! Il faut savoir qu�en 2025, nous serons 50 millions d��mes humaines � vivre en Alg�rie. Nous aurons 13 millions de personnes � nourrir en plus. Sachant que les 50 millions d�alg�riens de l�an 2025 consommeront plus d��lectricit�, de carburant et d��nergie en g�n�ral. Ce qui veut dire que nous exporterons moins d�hydrocarbures. Je tiens enfin � rappeler que 2025 c�est demain, et si nous ne comblons pas ce d�ficit en apprenant d�s aujourd�hui � ne pas vivre au-dessus de nos moyens, nous allons avoir de s�rieux probl�mes dans un avenir proche�.
Abdelwahab Ziani, pr�sident de la f�d�ration agroalimentaire (CIPA) :
�L�Alg�rien risque de ne pas trouver un jour le lait sur le march�
�Nous avons tir� la sonnette d�alarme depuis tr�s longtemps pour transposer les subventions inject�es dans la fili�re, en amont. Aujourd�hui, nous soutenons le sachet de lait destin� directement au consommateur, une subvention qui repr�sente une facture de 27 milliards de DA. Nous aimerions inverser la tendance pour accro�tre la production de lait cru nationale. C'est-�-dire soutenir l��leveur alg�rien plut�t que l��leveur �tranger qui nous fournit la poudre de lait. Au lieu d�accro�tre la vache alg�rienne sur le sol alg�rien, nous donnons de l�argent aux agriculteurs �trangers, en achetant de la poudre pour ensuite la subventionner localement. L�ONIL vient de mettre en place un nouveau dispositif qui consiste � sortir progressivement de l�importation de la poudre de lait, � travers l�encouragement de la production du lait cru local. Or, cette logique est fausse, puisque c�est l�op�rateur �conomique qui se trouve en train de g�rer des t�ches qui ne sont pas � sa charge. Par exemple, payer l��leveur et sa prime d��levage et attendre que le directeur des services agricoles de wilaya lui rembourse dans le cadre de la subvention. Ça serait, � mon sens, plus simple d�aller directement vers l��leveur et le soutenir en amont. Aussi, le citoyen alg�rien doit �tre conscient que si on maintient le prix du lait � 25 DA, un jour il risque de ne pas trouver ce produit sur le march�. Car sa subvention se fait au d�triment d�un d�veloppement s�r de la fili�re. Or, si l�on lib�re le prix du lait progressivement, nous parviendrons dans un avenir proche � assurer notre s�curit� alimentaire en la mati�re. Aujourd�hui, nous sommes � moins de 30% de production nationale par rapport au besoin du consommateur alg�rien en mati�re de lait. Nos ministres ont attir� notre attention lors de ce s�minaire, en faisant savoir que le stock de guerre dans le monde entier est de deux mois seulement. En Alg�rie nous n�avons aucun stock de guerre�.


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