De notre bureau de Bruxelles Aziouz Mokhtari Les tournures de phrases, les entourloupes et les expressions les plus vagues possibles à destination des médias ne font pas recette et ne trompent que ceux qui veulent bien l'être, qui ont des dispositions naturelles à ça. Bruxelles avant-hier, en conclave des ministres des AE des 27 a autorisé, à partir du 1er juin, les Etats membres à vendre des armes à la rébellion syrienne. Mot croisé pour ne pas dire les djihadistes, les partisans d'Al- Qaïda. Il est évident que cette décision engendrera du nouveau et du pas beau dans le pays, le régime syrien, première conséquence, ne reculera, désormais, plus devant rien. La Russie a déjà averti qu'elle ne se privera pas d'alimenter Damas en autant de «munitions» qu'il veut. L'Iran et le Hezbollah libanais s'appuieront sur cette nouvelle donne pour justifier leur soutien, déjà important, au pouvoir central syrien. Qui et au nom de quoi empêchera-t-on Téhéran et Nasrallah de choisir leur camp alors qu'en face, les djihadistes bénéficient de l'appui des 27 européens et de leur dorénavant alliance militaire. La Syrie vivra, c'est évident, les semaines à venir un véritable enfer si tant est qu'elle ne le vit pas déjà. Pourtant, ce qui arrive est de loin plus cruel et plus sanglant que ce qui est. Tout le monde ou presque sera armé en Syrie à cause de la décision européenne. Avec les djihadistes qui arriveront en masse des «pays du printemps» (Libye, Tunisie, Egypte), d'Afghanistan et pour certains de Palestine — quel comble ! quitter El Qods pour aller guerroyer au pays ommeyade ! —, tout est prêt pour la conflagration. Comme la décision des Européens est tout sauf irréfléchie, on se pose la question de savoir pour quel projet Bruxelles travaille-telle ? Voltaire, un Européen s'il en est, estimait : «Je ne puis penser que cette horloge existe et n'ait point d'horloger.» Alors attendons la fin, sans doute la fin de la Syrie, pour savoir. En attendant, l'Etat-Qaïda en Syrie bénéficie d'un sacré coup de pouce de la part de Bruxelles.